SPÉCIAL 20 DÉCEMBRE

1848-2008 : Fête Réunionnaise de la liberté !

19 décembre 2008

Comment oublier que nos ancêtres aient été enchaînés, martyrisés et tués sur cette terre réunionnaise ?

Depuis le 20 décembre 1983, nous fêtons officiellement la liberté retrouvée des esclaves. Il y a 160 ans que l’esclavage fut aboli, ce fut le 20 décembre 1848. Nos pères, nos frères sont morts sur cette terre réunionnaise sous le “sabouc” et le joug des obligations qui les faisaient travailler du lever au coucher du soleil. Nous ne pouvons pas oublier le tribut qu’ils ont payé en larmes, en sueurs et parfois dans le sang.

Il ne faut, en aucun cas, que nos jeunes oublient qui nous sommes et d’où nous venons ? En un peu plus d’un siècle et demi, je ne suis pas mécontent de voir que nous nous sommes modelés une identité culturelle forte, où chacun, au fil des années, trouve sa place. Pour moi, il n’y a pas d’opposition entre le 14 juillet et le 20 décembre. Heureusement, qu’il y a eu un 14 juillet pour que l’histoire de France marque notre 20 décembre.

Oui ! à la Fête réunionnaise de la liberté. Non ! à la fête « cafre » ! Parler de fête « cafre », c’est une erreur historique. Le 20 décembre 1848, 62.000 esclaves ont été libérés. Certes une grande majorité venait de la côte d’Afrique, en particulier du Mozambique... mais ils étaient aussi nombreux à venir de Madagascar, d’Asie et de l’Inde. C’est pour cette raison qu’il conviendrait de parler de « Fête réunionnaise de la liberté ».

Crime contre l’humanité

Dans l’histoire d’un pays, 160 ans, c’est peu, très peu pour effacer dans la mémoire toutes les marques des souffrances de cette situation inhumaine que constituait l’esclavage devenu depuis, heureusement, « crime contre l’humanité ». Réunionnais, le mot “esclavage” doit nous interpeller. Comment oublier que nos ancêtres aient été enchaînés, martyrisés et tués sur cette terre réunionnaise ?

160 ans après, nous nous en souvenons, parce que de génération en génération, nos pères nous ont transmis notre histoire. Le 20 décembre 1848, les chaînes se sont brisées.
1983 : François Mitterrand, Président de la République française, décrète le 20 décembre jour férié et chômé, à l’occasion de l’abolition de l’esclavage. La culture du “fénoir” éclate en pleine lumière.
1989 : le mur de Berlin, le mur de la honte, le mur du silence est tombé.
10 mai 2007 : le Président Nicolas Sarkozy décrète que dans toutes les écoles de la République, on parlera de l’esclavage.

La culture du “fénoir” éclate en pleine lumière

160 ans après, c’est-à-dire un siècle et demi, nous avons à briser d’autres chaînes :
Celle de la misère,
Celle de la pauvreté,
Celle du chômage,
Celle de l’inégalité des chances,
Celle de la place de chacun de nous dans notre société réunionnaise.
Et surtout les 12 millions d’esclaves vendus, à ce jour, dans le monde... sans compter de nombreux enfants tués au travail forcé.

Il est criminel de la part des privilégiés de notre histoire, des nantis d’aujourd’hui de toujours chercher ailleurs des alibis pour minimiser la vérité historique sur l’esclavage à La Réunion.

160 ans après, notre jeunesse doit connaître l’histoire de ce pays pour s’armer, être forte, pour qu’à l’exemple des anciens, cette jeunesse continue de lever haut la tête et que, demain, elle soit responsable de sa destinée !

Nous avons notre propre personnalité réunionnaise qui est née du choc de nos cultures des cinq continents. Lorsque quelqu’un débarque pour la première fois sur cette île accueillante et foule aux pieds la personnalité du réunionnais, il aura du mal, des difficultés pour vivre avec les habitants de cette île.

L’homme Réunionnais porte en lui les gènes des cinq grandes civilisations du monde

Je fais mienne cette “définition” de la culture réunionnaise de Paul Mazaka, directeur des Affaires culturelles de la Ville du Port : « J’arpente le sentier de mes origines, et à chacun de mes pas se dévoilent : l’Inde, l’Asie, l’Orient, l’Afrique, l’Europe. Ce parcours intérieur me révèle une vérité que nul ne peut nier. L’homme Réunionnais porte en lui les gènes des cinq grandes civilisations du monde ».

32 ans après, “Moali l’Esclave” sera rejoué au stade de la Saline les Hauts par 30 comédiennes et comédiens. Venez nombreux rendre hommage aux esclaves tués, tombés pour notre liberté du 20 décembre 1848 et pour qu’aujourd’hui, nous vivons dans un pays de liberté. Nous ne les oublions pas : Anchaing, Bale, Bamboulou, Cimendef, Cote, Desmalé, Diampare, Dianamoise, Dimitile, Erico, Eva, Fanor, Landy, Latoine, Latouve, Laverdure, Mafate, Manonga, Manzague, Marianne, Matouté, Mazumba, Pyram, Raharienne, Renard, Sambe, Samson, Sarcemate, Sicille, Simanandé, Simangavol, Sankoutou, Simitave, Sylvestre, Tambi, Tangati, Rara, Vave...

Marc Kichenapanaïdou

20 décembre

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