Journée internationale du souvenir de la traite et de son abolition

300.000 personnes déportées à La Réunion

24 août 2004

Le 23 août 2004 a été choisi par la conférence générale de l’UNESCO comme la Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition. C’est en effet dans la nuit du 23 août 1791 qu’éclatera sur l’île de Saint-Domingue (Haïti) sous la direction de Toussaint Louverture, l’insurrection qui aboutira quelques années plus tard en 1804, à l’indépendance d’Haïti.
C’est à partir de cette grande victoire contre l’idéologie raciste du colonialisme et de ses outrances - l’esclavage, la traite des hommes - que s’affirmeront, au prix de longues luttes, les idéaux des lumières se fondant sur l’universalité des droits de l’Homme : liberté, égalité, fraternité, tolérance, droit à la diversité culturelle...
En ce 23 août à Paris, la communauté réunionnaise sera présente à travers l’action de l’ARCC et de ses adhérents qui nous représenterons dans la plus grande institution internationale qu’est l’UNESCO.
À La Réunion, où depuis le début de cette année deux grandes manifestations internationales ont eu lieu - du 24 au 28 mai 2004, à l’initiative de la Faculté des Lettres et Sciences humaines (CRESOI et UNESCO), nous devons nous souvenir aussi que la traite a été un drame pour la quasi totalité de nos ancêtres qui ont été déportés d’Afrique, de Madagascar, de l’Inde et de Chine comme esclaves ou engagés tout au long du 19ème et 20ème siècles.
Près de 200.000 personnes ont été déportées à La Réunion, autrefois l’Île Bourbon, en 1663 et 1848. Plus de 100.000 ont été ensuite transportées dans des conditions de la traite dans le cadre de l’engagisme qui n’est autre qu’un système d’asservissement dérivé. Nos ancêtres Africains, Indien, Malgaches et Chinois ont connu les souffrances morales et physiques de cette histoire...
Doit-on rappeler que dans les années 1930, des Malgaches Antandroy - du Sud de Madagascar - étaient encore déportés vers La Réunion... Peut-on occulter l’histoire des 1.313 petits Réunionnais de La Creuse et du Tarn (de 1963 à 1975) qui ont été eux-aussi déportés vers La France sans le consentement de leurs parents et dont l’histoire rappelle celle de la traite des hommes au 19ème siècle.
Peut-on effacer de nos consciences ces cris de souffrances qui se sont transmis de générations en générations dans notre inconscient culturel et qui continuent à marquer le présent dans nos attitudes, dans nos comportements de tous les jours, sans que nous nous en apercevions...
D’où la nécessité d’en parler, de se souvenir, non pour ressasser des souffrances comme pourrait le dire certaines personnes, mais pour les exorciser, pour les dépasser, pour les transcender ou au moins pour les dominer...
C’est dans ce cadre, que l’UNESCO a décidé d’agir il y déjà quelques années, en mettant en place le programme de la route de l’esclave, et en commémorant les abolitions. En 1998, La Réunion avait alors mis en place avec l’UNESCO les grandes cérémonies du 150ème anniversaire de l’abolition de l’esclavage. En nous souvenant de l’Histoire de la traite - officiellement abolie par la France en 1817, mais qui se prolonge sous d’autres formes plus perverses jusqu’au 20ème siècles, nous préparons des défenses pour que demain, l’homme ne redevienne pas un loup pour l’homme...
L’Université - a travers la chaire UNESCO - continuera à œuvrer pour que les pays de l’océan Indien qui ont tous connu la traite retrouvent un équilibre harmonieux et des liens étroits dans le cadre du dialogue des cultures de l’océan Indien.

Sudel Fuma. Professeur des Universités.


Célébrée depuis 1998

La Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition est commémorée le 23 août de chaque année. C’est dans la nuit du 22 au 23 août 1791 qu’a commencé à Saint-Domingue (aujourd’hui Haïti et République dominicaine) l’insurrection qui devait jouer un rôle déterminant dans l’abolition de la traite négrière transatlantique.
Les premières commémorations de la Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition ont eu lieu dans plusieurs pays, notamment le 23 août 1998 à Haïti et le 23 août 1999 à Gorée au Sénégal. Des manifestations culturelles et des débats sur la traite négrière ont été également organisés. En 2001, le Musée de l’étoffe de Mulhouse (France) s’est associé à la commémoration, en organisant un Atelier, présentant des tissus appelés “Indiennes de Traite” utilisés comme monnaie d’échange pour l’achat d’esclaves aux 17ème et 18ème siècles.


La route de l’esclave

C’est sur proposition de Haïti et des pays africains que la Conférence générale de l’UNESCO a approuvé lors de sa 27ème session en 1993, la mise en œuvre du projet “La route de l’esclave”.
Le projet a ainsi été lancé officiellement lors de la première session du Comité scientifique international de “La route de l’esclave” en septembre 1994 à Ouidah (Bénin), une des anciennes plaques tournantes de la traite négrière dans le golfe de Guinée. Les Actes de Ouidah ont été publiés par les Éditions UNESCO en 1998 sous le titre “La chaîne et le lien : une vision de la traite négrière”.
Si le concept de “route” exprime la dynamique du mouvement des peuples, des civilisations et des cultures, celui “d’esclave” s’adresse non pas au phénomène universel de l’esclavage, mais de manière précise et explicite, à la traite négrière transatlantique, dans l’océan Indien et en Méditerranée.
Le projet “La route de l’esclave” a un double objectif, d’une part, mettre fin au silence en faisant connaître universellement la question de la traite négrière transatlantique et de l’esclavage dans l’océan Indien, et en Méditerranée, ses causes profondes, ses modalités d’exécution par des travaux scientifiques, et d’autre part, mettre en lumière de manière objective, ses conséquences et notamment les interactions entre tous les peuples concernés d’Europe, d’Afrique, des Amériques et des Caraïbes.


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Messages

  • mi pens ke tout’ band zesclav la soufèr i mérit’ détr dan tout’ le mémoir lo band rényoné... jordi encor nou pe di a zot merci

    • La question de l’esclave demeure une des plus difficiles à aborder aujourd’hui. La traite négrière a mis en rapport des populations, des culutres, des langues et des coutumes différentes. Certains peuples de l’Amérique latine ont une identité totalement créole ou métissée. Une sorte d’hybride qui interdit toute identification excluse pure et simple des individus issus de cette rencontre à l’une ou l’autre des éléments constitutifs dont nous avons parlé plus haut. Un Haïtien n’est pas pas un Africain même si sa peau est noire, même si certaines de ces manières de faire, de croire et de situer dans l’existence rappellent bien des traits de pays africains. Il n’est pas non plus ni Français, ni Portugais, ni Espagnols. Il est Haïtien ! Il est créole. S’il s’agit là d’une identité inconfortable sous des aspects divers, l’identité créole se suffit à elle-même pour pouvoir se comprendre et dire le monde.

      Voir en ligne : JOURNÉE INTERNATIONALE DU SOUVENIR DE LA TRAITE ET DE SON ABOLITION


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