Littérature : ’Monsieur Oscar’, le premier roman de Daniel Lauret

À la recherche d’une odeur de grand-père

15 juillet 2004

Professeur de français et de créole, formateur à l’Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM), Daniel Lauret publie aux éditions Ibis rouge ’Monsieur Oscar’. Une partie de la vie de l’auteur qu’il restitue en hommage à son grand-père, et qui a de suite intéressé la maison d’édition martiniquaise, très sensible à la question ’créole’.

Au cours d’un petit déjeuner de presse au B@bookafé, à l’Entrepôt, Daniel Lauret nous a présenté un livre profondément créole malgré le choix de l’écrire en français. "Ce qui n’est pas contradictoire", nous dit l’auteur qui a publié de nombreux écrits sur le créole et son enseignement, dont l’incontournable "Le créole de la réussite". "Le fonnkèr est déjà créole", nous explique-t-il, "quand on travaille à écrire un pays créole, on ne peut que swinguer sur des espaces linguistiques. Pourquoi donc s’enfermer seulement dans un code ?".
Là, il nous invite simplement à remonter avec lui jusqu’aux racines. "C’est parti d’une histoire de deuil. J’ai mis des mots sur cette absence. Moi j’ai du mal à écrire sur ce qui ne me touche pas", poursuit-il. "Monsieur Oscar", c’est l’histoire de Gilbert Oscar Lauret, son grand-père.
Mais l’histoire nous livre aussi à une intrigue amoureuse entre Thérèse et Rosario, obligés de s’installer en Alsace pour vivre leur amour. L’auteur porte un regard lucide sur une période coloniale, où la question du yab et du kaf se posait différemment. C’est avec des mots simples, disons même doux et cru, qu’il le raconte.
Auto-fiction, un poignant témoignage, Daniel Lauret porte aussi et surtout un regard d’un enfant, Bastien, sur "l’avènement d’une société forcée de se dégager des pesanteurs esclavagistes pour intégrer un autre système de valeurs, des principes égalitaires livrés dans le même colis postal que la départementalisation et les salaires des fonctionnaires". Une histoire à découvrir, à lire, et puis relire... "La recherche d’une odeur de grand-père".
Ce qui n’est pas sans rappeler le récit de Dany Bébel-Gisler qui signait "À la recherche d’une odeur de grand-mère". L’auteur réunionnais ne peut que signaler cette coïncidence, puisque Dany Bébel-Gisler a notamment préfacé sa thèse. Décédée l’année dernière, il a souhaité par ailleurs lui rendre hommage.
Et il ne devrait pas s’arrêter en si bon chemin. Il ne cache pas sa volonté de poursuivre son travail d’écriture : "Il y a plein de textes qui demandent à être aboutis. La tradition orale nous est livrée souvent fragmentée, mais mérite d’être retravaillée, fignolée..." Animant des ateliers d’écriture au Guillaume et à Plateau Caillou à Saint-Paul, Daniel Lauret note l’importance de donner aux enfants des outils, permettant d’inculquer les compétences fondamentales chez le jeune lecteur, "quelle que soit la langue utilisée", précise-t-il.
Peut-être donnera-t-il envie aux écrivains en herbe d’écrire l’histoire des innombrables “Monsieur Oscar”, nos grands-pères.


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