Décès de Maxime Laope

Décès de Maxime Laope

16 juillet 2005

Le soleil réunionnais était en berne hier matin, et la rosée moins fraîche. On venait d’apprendre la disparition d’un artiste hors pair, un maître du séga, un père de la musique réunionnaise. Maxime Laope nous a quittés à l’âge de 83 ans.

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À bord de son "l’auto deux volants", il s’en est allé chercher repos "sous pied Camélia". Né le 5 août 1922 au Plate Saint-Leu, Maxime Laope aura passé sa vie à défendre un patrimoine d’exception, le séga, mais aussi le maloya, la langue créole, la culture réunionnaise.
C’est au cours d’un radio-crochet, en 1947, qu’il se fera connaître du public réunionnais. Deux ans plus tard, il sort son premier disque. Une légende était née.
Et puis, quel artiste ! Il fera "toutes les maisons de disques", note Arno Bazin, auteur du "Catalogue discographique de l’océan Indien", "souvent accompagné par Loulou Pitou". Il jouera avec les plus grands artistes réunionnais, dont Claude Vinh San, Serge Barre, Pierrette Payet, Marie-Armande Moutou. Il sera accompagné par les Superjet’s, Super Mix, les Playboys, l’orchestre Nativel, les Soulmen, Mastane aussi, qui donnera une couleur particulière à ses compositions. Sa chanson "La rosée tombée" sera plusieurs fois reprise, jamais égalée, en jazz, avec Danyèl Waro et Olivier Ker Ourio, en reggae avec Gondwana, ou encore par la voix de Laurence Beaumarchais.
Compositeur et interprète de nombreuses chansons, il restera à tout jamais gravé dans la mémoire des artistes réunionnais, qui continueront à se ressourcer à ce génie réunionnais, à ce chantre de la culture réunionnaise, ce conteur, ce chanteur aimé de tous.

"Sa dimension locale lui suffisait"

"Madina", "Grand Joseph", "La pêche camaléon", "Maloya longtemps", "Maloya Zarab", "Compère le guêpe"... les titres ne manquent pas. On lui prétend plus de 60 compositions et sera notamment l’interprète préféré de Jules Arlanda.
Pourtant, l’artiste restera proche des siens, de son pays, de sa culture, sans fausse hauteur, d’une humilité sans précédent ; il restera un artiste vrai. Maxime Laope ne donnera aucun grand concert en France. Ce ne seront que des concerts privés, dans le cadre familial.
Il donnera ses concerts extérieurs à l’île essentiellement dans l’océan Indien, à Maurice, à Rodrigues ou encore aux Seychelles. En 1996, il découvrira pour la première fois les États-Unis et le Canada, avec la tournée "Séga-Séga" orchestrée par Bernadette Ladauge et Christophe David.
"À 76 ans, il a découvert les États-Unis, et n’en était pas peu fier", raconte Expédite Cerneaux-Laope, fille de l’artiste, auteur du livre "Maxime Laope, un chanteur populaire", publié en décembre 1999 à la Barre du jour, collection Fonnkèr. Mais elle note : "sa dimension locale lui suffisait".

Un fervent défenseur de la langue réunionnaise

Proche de sa terre natale, qu’il connaissait plus que bien, il sera un fervent défenseur de sa langue maternelle, qui donnait toute la poésie à ses créations. En 2002, après 55 ans de bons et loyaux services à la culture de son pays, Maxime saluait son public, toujours fidèle à ce grand artiste réunionnais, qui aura fait danser nos grands-mères, nos mères et nos filles.
Son héritage restera cependant intact. En témoigne la création d’une association, nommément l’association Maxime Laope, qui s’est donné pour but de faire vivre le patrimoine de cet homme à la voix inimitable, qui le différenciait de tous les chanteurs de sa génération.
"Pépé lé ankor là, é nana tout son relèv", déclare Jean Amémoutou, son petit-fils, par ailleurs musicien. Artiste réunionnais à notoriété populaire, il marquera des siècles durant le parterre musical réunionnais. Aujourd’hui, une cérémonie religieuse lui sera dédiée, à 15 heures, en l’église Saint-Jacques à Saint-Denis, son lieu de culte préféré.

Bbj


Hommages à Maxime Laope

o Paul Vergès

"Le peuple s’est reconnu dans ses chansons"

C’est avec une très grande tristesse que j’apprends la disparition de Maxime Laope, dans la nuit de jeudi à vendredi, à l’âge de 83 ans.
Très jeune engagé dans les Forces françaises libres, Maxime a toujours été entier dans l’accomplissement de ce qu’il entreprenait.
Sous l’impulsion de Georges Fourcade, puis aux côtés notamment de ses amis Benoîte Boulard ou encore Henri Madoré, il était devenu emblématique de l’histoire du séga à La Réunion.
Des bals la poussière aux diffusions radiophoniques, traversant les époques, il est devenu le plus populaire des ségatiers parce que le peuple s’est reconnu dans ses chansons.
Chaque Réunionnais, même parmi les plus jeunes aux côtés desquels il a toujours agi, connaît au moins une chanson de Maxime, parfois sans savoir qu’il en est l’auteur. C’est ainsi le plus bel hommage qui est rendu à ce grand Réunionnais, dont le souvenir est à jamais inscrit dans notre mémoire et dont l’œuvre fait définitivement partie du patrimoine de notre pays.
Il était une des dernières mémoires vivantes de l’histoire culturelle de La Réunion et, sur ce plan, je crois que nous ressentons déjà le vide immense que laisse sa disparition.
Au nom du Conseil régional de La Réunion et en mon nom personnel, j’adresse mes très sincères condoléances à la famille de Maxime et à ses proches.

Paul Vergès,
président de la Région Réunion,
député au Parlement européen

o Nassimah Dindar

"Un grand artiste"

Maxime Laope, chanteur populaire, grand artiste, interprète et compositeur a marqué de ses mélodies plusieurs générations de Réunionnais.
L’auteur de "La rosée tombée" laisse derrière lui une œuvre de plus d’une centaine de textes écrits par lui-même et les plus grands auteurs réunionnais. Plusieurs générations de musiciens ont accompagné ce grand artiste, interprète et compositeur au cours de ses cinquante années de carrière.

Nassimah Dindar,
présidente du Conseil général

o Le Groupe Alliance

"La flamme du séga et du maloya"

C’est avec une profonde émotion que nous avons appris la mort de notre ami et artiste Maxime Laope. Un de ceux qui ont contribué à préserver avec force et talent la flamme du séga et du maloya vient de disparaître à son tour.
Le Groupe Alliance tient à exprimer ses plus sincères condoléances à son épouse, ses enfants et à tous ses proches. On retiendra parmi les paroles fortes de ses chansons, celle qui disait : "in jour si moin lé mor, antèr amoin sou pyé kamélya".

Le Groupe Alliance

o Marc Kichenapanaïdou

"Maxime au ciel des musiciens"

Maxime Laope est allé rejoindre au "ciel des musiciens" sa complice de la scène du spectacle, Benoîte Boulard, et bien d’autres musiciens. Maxime Laope a propulsé le séga réunionnais au plus haut de notre hit parade.
Les jeunes des années 60 ont chanté, dansé du Maxime Laope. "La Rosée tombée", cette chanson si populaire, combien d’entre eux l’ont chantonnée. Sa mort nous attriste. Son "récit de vie" est un exemple pour ses enfants et petits-enfants, mais aussi pour les jeunes Réunionnaises et Réunionnais de 2005.
La vie sur la terre est un passage. Nous le savons tous. Le passage de Maxime Laope est sans fausse note. Il nous laisse un patrimoine musical impressionnant. Sa voix continuera à faire vibrer notre intérieur de joie.
J’étais toujours heureux de le rencontrer dans les années 80 à la D.R.A.C. (Direction régionale des affaires culturelles) et par la suite dans les diverses manifestations culturelles. À chaque fois que nous nous voyions, nous parlions de la "vie lontan". Il regrettait que le séga ait quelque peu disparu de la musique réunionnaise. Mais il comprenait et appréciait les jeunes musiciens d’aujourd’hui, car il y avait du respect de part et d’autre.
Nous adorons le même dieu. Toute ta vie tu l’as prié, tu l’as adoré. Là-haut, Maxime, que ton regard protège la musique qui est une création divine et demande à Dieu la paix entre les humains.

Marc Kichenapanaïdou,
président du G.R.A.H.TER.

o Jacqueline Fareyrol

"Un homme discret, simple, poli..."

Lorsqu’un artiste disparaît, on a toujours le sentiment un peu inconfortable pour ne pas dire coupable de n’avoir pas suffisamment soutenu sa carrière... Heureusement que l’ODC a organisé récemment pour Maxime un spectacle en hommage à son talent. En effet, ce n’est pas par hasard qu’un artiste dure si longtemps... Je retiendrai de Maxime sa grande discrétion, sa grande simplicité, sa politesse exquise et bien-sûr sa voix au grave incomparable... Mais demandez à la jeune génération qui est Maxime Laope... Ils vous répondront souvent qu’ils n’en savent rien... Que deviendrons-nous si l’on ne s’attache pas à nos racines ? Merci Maxime d’avoir tenu si longtemps et d’avoir fait vivre notre patrimoine culturel aussi brillamment que tu l’as fait.

Jacqueline Fareyrol

o Dominique Barret

"Une grande perte pour La Réunion"

J’ai eu l’occasion de travailler avec Maxime il y a de cela deux ans. Je garde le souvenir de quelqu’un de simple et discret. Des qualités que j’apprécie beaucoup. C’est une grande perte pour La Réunion. Mais en même temps, ça m’encourage car j’ai l’impression d’œuvrer dans le même sens que lui. Puisse ce grand vide qu’il va laisser faire naître de nouvelles inspirations pour que notre musique continue à exister.

Dominique Barret

o Verzonroots

"Sété in bon Misié"

Mwin la koni Misié Laope par rapor son’ ti zanfan, Jean et Jack Amémoutou, sé in mizisien mon group’.
Jack la ral’ Verzonroots la Source pou in lomage Maxime zisteman. Apré Jack la parti en France, Jean la kontinié ek nou.
Le swar la mwin la pèt’ in tombé devan la kaze granmoun Maxime, lété vilin. Sété in bon Misié. Maxime, li lété in gran kamarad’ mon pépé dan son zèn’ tan. Li la rakont’ amwin ké li té bèk lésprid’kane ansam mon pépé dan’ tan lontan. Le pti lanékdock sé ke kan mwin la rankont’ Jean, nou la bèk lésprid’kane osi (mi koné lé pa bon, mé la tradision... i fo pa perd’).
Mé là, nou té koné pa ankor ke nout’ 2 pépé lavé viv’ le mêm passaz’ 2 générations avant. Mwin néna la chance de pouvoir jouer et chanter avec la famille Laope. Verzonroots lé kontan de jouer des chansons de Misié Laope lors de ses prestations, é le public lé ankor plus kontan.
Merci Maxime Laope.

Le groupe Verzonroots

o Danyèl Waro

"Done marmay manzé Maxime la done anou"

Nou la pèrd in poto, minm si la fine ariv in laz. Dopi in an, toulmonn i sava, la sé in moun dann séga-maloya. Sa i vé dir : arsézi anou vèy sat na déryèr. Mwin la pa zwé bonpé èk li, mé li la akonpany amwin, li la done amwin bokou. Sa minm dann in morso mi shant : "Maxime la done amoin séga-maloya...". I mérit fé plis in kont ankor, i fo marmay i aprann son bann morso lékol. Lomaz pa sélman kan i sava. I fo séga dan lékol, lo méyèr sèrvis ni pé fèr, sé sa. Done marmay manzé Maxime la done anou.

Danyèl Waro

o Mélanz Nasyon

"Un guerrier de la musique"

Maxime Laope est avant tout un symbole du séga, un séga teinté de maloya. C’est un personnage qui a mené un combat depuis l’époque glorieuse jusqu’à ses derniers jours. Il incarnait la musique réunionnaise, c’est une icône, un des pionniers, un des guerriers de la musique. Aux jeunes générations aujourd’hui de continuer dans cette filiation, de mettre en avant notre culture et de construire sur cette base l’avenir.

Stéphane Grondin, du groupe Mélanz Nasyon

o Fanie Précourt

Merci Maxime !

Merci à toi de t’être humblement porté défenseur de la culture réunionnaise, "Le cœur créole", en clamant partout "Touch pas mon z’histoire", "Mi aime mon patois". "Dégommé" pas vraiment, tu resteras toujours présent dans la mesure où tu as réussi à graver à jamais dans nos mémoires, mais également durablement à travers tes nombreux enregistrements, un pan des traditions créoles, "Not’ bon vieux temps" parties intégrantes de notre identité. Grâce à toi, les générations futures sauront concrètement comment se passait un "Mariage longtemps", "La coupe canne" ou encore "La pêche camaléon". "Nous sera bien" avec les leçons de composition que tu nous as données toute ta vie durant, et "C’est l’amour" que nous portons à ta musique "Séga maloya" qui la fera perdurer à travers d’autres. Permets nous aujourd’hui de changer quelque peu les paroles de ton séga pour écrire, à la place de "Grand Joseph", “Grand Maxime”, en guise de conclusion.
L’équipe du Pôle régional des musiques actuelles se joint à moi pour exprimer ses sincères condoléances à la famille Laope et à ses proches.

Fanie Précourt,
chargée de la mission Patrimoine au PRMA

o Jean-François Samlong

"Un ardent défenseur de notre culture"

Avec le départ de Maxime Laope, on tourne une grande page de l’histoire de la musique à La Réunion. Une de plus. Ils s’en vont l’un après l’autre, ceux qui ont travaillé à leur façon à l’émergence de la créolité ; ceux qui, année après année, ont consolidé les bases d’une identité réunionnaise dont les profondes racines sont le séga, le maloya, le moring, le quadrille, les traditions orales venant des quatre continents. À ce titre, Maxime Laope a été un précurseur, un ardent défenseur de notre culture. Toujours de bonne humeur, affable, il était à l’image de sa musique entraînante. Maxime Laope chantant des textes du poète Jean Albany, c’est un délice trop rare. L’UDIR a eu l’occasion de lui rendre un hommage vibrant lors de l’une de ses soirées. Et c’est une bonne chose que les collectivités, les associations, les journalistes pensent à reconnaître les valeurs de nos artistes avant qu’ils ne nous quittent, laissant derrière eux une œuvre inestimable.

Jean-François Samlong,
écrivain

o Parti communiste réunionnais

Hommage à Maxime Laope

Réunis à La Possession ce vendredi 15 juillet 2005 en Assemblée générale, les cadres du Parti communiste réunionnais apprennent avec consternation la disparition subite de Maxime Laope.
Ce grand artiste, auteur-compositeur-interprète, a su traduire dans ses chansons l’âme de La Réunion. Au fil de ses compositions - ségas, maloyas et romances - il a, un demi-siècle durant, témoigné des conditions de vie des Réunionnaises et des Réunionnais.
Dès son premier enregistrement, en 1952, il a affirmé sa fierté de chanter dans sa langue maternelle.
Maxime Laope conjuguait un réel talent avec une profonde modestie, une indéniable bonté, une générosité et une disponibilité de tous les instants qui l’ont maintes fois vu se porter de manière désintéressée aux côtés de celles et ceux que les accidents de la vie avaient frappés.
Au moment où disparaît ce grand artiste, les cadres du Parti communiste réunionnais veulent assurer ses enfants, ses proches et ses amis fidèles de leur profonde sympathie et de leurs condoléances émues.
Maxime Laope vivra longtemps encore dans le cœur et la mémoire des Réunionnais car ses mélodies et ses paroles sont connues de tous.

Le Parti communiste réunionnais

Parti communiste réunionnais PCR

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