
Mal-do-mèr dann sarèt
28 juin, parLo zour la pokor kléré, Zan-Lik, Mariz é sirtou Tikok la fine lévé, mèt azot paré. Madanm Biganbé i tir zot manzé-sofé, i donn azot, zot i manz. (…)
Conférence avec l’AMCUR à Sainte-Suzanne
22 décembre 2004
Les ancêtres ne sont pas morts, ils continuent d’exister et forment avec nous le cycle de la vie. Parmi les trois conférenciers qui sont intervenus lundi au Bocage, Prosper Ève a mis en évidence la nécessité, pour les esclaves malgaches, de s’enfuir pour renouer les liens avec leur lignée et ne plus se sentir étrangers sur cette terre.
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"Un mort qui n’est pas chanté est un mort qui ne continue pas à vivre", expliquait lundi Antoinette Betourné à Sainte-Suzanne. Des trois spécialistes invités, elle était la première à intervenir à la conférence-débat sur le thème de l’ancestralité, organisée au Bocage par l’Association pour la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise (AMCUR).
Antoinette Betourné est une sociologue camerounaise, elle vit depuis quatre ans à La Réunion, et est devenue une personne ressource de l’association Rasine Kaf. Elle est intervenue sur les questions d’ethnicité, de croyance, de tradition et de culture du peuple bantou. Elle a souligné l’importance de la solidarité dans le processus de l’ancestralité, empêchant toute désocialisation.
Processus, car pour atteindre le statut d’ancêtre, personnification de l’idéal d’une communauté et de ses valeurs, il faut répondre à plusieurs critères d’éligibilité : vie longue et féconde, intégrité physique et morale. Une mort non naturelle est frappée d’anathème.
L’intervention de l’anthropologue Charlotte Rabesahala sur la tradition malgache croisait parfaitement ce premier témoignage : seule une vie vénérable permet de devenir un ancêtre. Pour atteindre l’ancestralité, le défunt doit aussi recevoir les rites post-mortem.
L’ancêtre fait partie intégrante du monde des vivants, tous deux sont liés par des droits et des devoirs. Si le défunt n’a pas de soins posthumes, il est perdu. L’ancêtre est un être familier et bienveillant, avec qui l’on a une relation intime. Pour elle "l’exaltation de l’ancestralité est une victoire sur le temps" un moyen qui "offre l’éternité à l’échelle humaine".
L’historien réunionnais Prosper Ève est intervenu longuement et de manière très intéressante sur la question des ancêtres chez les esclaves de Bourbon. Quel héritage les esclaves nous ont-il laissé sur ce thème de l’ancestralité ? "Une minorité d’esclaves ont mené un difficile combat pour se forger dans cette île une lignée d’ancêtres, pour faire corps avec cette terre et perdre leur statut d’étranger. Le culte rendu aux ancêtres naît et grandit dans des conditions difficiles. Si leur action ne connaît pas un franc et total succès, leur effort offre d’excellents éclairages et ne peut être passé sous silence", affirme-t-il.
Les esclaves arrivés à Bourbon, séparés des leurs et de leur terre, se rendent compte dès leur arrivée qu’ils sont dans une impasse. Ils ne peuvent rendre hommage à leurs ancêtres.
"Ils sont désormais sans famille, sans tombeau familial, sans espoir de repartir. L’idée de mourir en terre étrangère sans respect du rituel funéraire leur est insupportable".
Et c’est la raison principale pour laquelle ils sont amenés à trouver refuge dans les montagnes : "En devenant marrons, ils ont la possibilité d’édifier des tombeaux selon les normes apprises dans leur pays de départ, pour constituer leur propre lignée d’ancêtres en terre bourbonnaise. Ils s’y installent pour terminer leurs jours. Ils s’approprient une portion de l’espace, pour vivre libres. Ils s’associent à elle pour pouvoir être désignés : Anchaing du cirque de Salazie, Bâle de Cilaos, Dimitile de l’Entre-Deux, Cimendef de la Rivière du Galet, pour que leur corps puisse reposer un jour en un endroit connu et ne pas tomber dans l’oubli de la mort".
À ce propos, Prosper Ève cite François Lautret-Staub, selon lequel "l’occupation de l’espace par les esclaves marrons ne s’est pas faite au hasard". Il soutient l’hypothèse de la domestication de l’espace par l’ombiasy (devin), en prenant comme site d’étude le cirque de Mafate. Selon lui, la distribution des toponymes dans ce cirque semble répondre à une logique et paraît suivre un schéma culturel qui se rattache à la tradition politique malgache. Il établit ainsi que "la maison astrologique malgache a été superposée au périmètre de ce cirque, avec des zones dont l’orientation est réputée bénéfique ou maléfique, celle de bon augure qui couvre les directions Nord (du Cap Noir au Cimendef) et Est (du Cimendef à Marla) et celle de mauvais augure le Sud (jusqu’au Trois Roches) et l’Ouest (qui rejoint le point septentrional en longeant le Maïdo". Les quatre coins ont une signification. "Le coin du Nord-Est ou destin Alahamady est la position du pouvoir souverain qui détient le destin le plus puissant (Cimendef). Le coin Sud-Est ou destin Asorotany, c’est-à-dire la position du pouvoir sacré, est celui des ancêtres avec les tombeaux et les monuments funéraires (Trois Salazes). Le coin du Sud-Ouest ou destin Adimisana, représente la position néfaste des sorciers et le coin du Nord-Ouest ou destin Adijady, c’est la position du profane. Le chef de guerre est généralement institué roi universel du milieu de la terre".
Eiffel
Quelques conseils de Prosper Ève
"Réunionnais, tes ancêtres ne sont pas à vendre !"
Le projet des marrons décrit par Prosper Ève (lire ci-dessus) ne se solde pas par un échec total. Pour l’historien, "Il suffit de cerner la toponymie des régions montagneuses qu’ils ont colonisées pour avoir un témoignage objectif de leur combat. Il suffit aussi de voir les oratoires ou p’tits bons dieux qui sont au bord des routes de l’île pour voir que la conception de l’âme transmise par les esclaves marrons est encore intacte dans notre société".
À la fin de son exposé, Prosper Ève a cette fois-ci pris la parole, non plus en tant qu’historien, mais en tant que Réunionnais pour prodiguer quelques sages conseils :
"Réunionnais afro-indo-sino-créolo-malgache, respecte ta culture ! Respecte l’héritage de tes ancêtres ! Ne forligne pas ! N’aie pas honte de ce qui se pratique ici !
Fleuris les p’tits bons Dieux des bords de route ! Si tu entends qu’une personne ne peut pas déposer une croix ou une statue à l’endroit où il a perdu accidentellement un des siens et ce pour les raisons les plus ineptes, que son problème devienne le tien, mets-toi à ses côtés, agis pour qu’elle ait gain de cause ! Si tu entends que des pierres des tombeaux de tes ancêtres esclaves ont été déplacées sans respecter les règles élémentaires de l’archéologie, ne reste pas les bras croisés, lève-toi et va demander des comptes aux responsables d’une telle forfaiture ! Sauvegarde les gestes de tes ancêtres et transmets-les intacts à tes enfants !
"Œuvre pour que tes enfants réussissent à l’école !"
Respecte cet héritage composite, véritable maillage interculturel ! Pour prouver que tes ancêtres te protègent, tu dois réussir mieux qu’eux, alors œuvre pour que tes enfants réussissent à l’école ! Fais de leur éducation, ta priorité !
Réunionnais ! Ceux qui t’ont précédé ont construit ici leur Afrique, leur Madagascar, leur Inde, leur Chine ! Alors si tu veux les respecter ou si tu crois les respecter, ne renie pas leurs gestes ! Garde-les dans la sphère de l’intime et pourchasse tous ceux qui viennent les filmer pour les besoins de leur promotion personnelle ! Tes ancêtres ne sont pas à vendre !
Le monde bouge, tout bouge en matière culturelle et cultuelle, c’est la vie ! Ne crois donc pas que les gestes des hommes des sociétés animistes venus ici au XVIIIème et au XIXème siècle ont été conservés intacts tout spécialement pour toi quelque part dans un coin du monde, par des êtres qui savaient que toi, tu allais revenir un jour à la quête des gestes disparus !
Maintenant s’il te plaît de tourner le dos à ce qui existe ici, tu es libre comme l’oiseau ! Fais-le ! Vas au bout de ta logique ! Mais ne dis surtout pas que tu vas à la recherche de tes racines ! Tes racines sont ici. Tu as pris racine sur cette terre. Ouvre tes yeux ! Découvre la richesse de ta culture ! Lorsque tu vas ailleurs, c’est pour te frotter et limer la cervelle, mais pas pour renier les gestes de tes ancêtres, pas pour copier comme un mouton de Panurge !
Sache donc qu’au bout de ta quête, tu imposeras à ceux qui te suivront ce qui se fait ailleurs aujourd’hui, aujourd’hui, mais tu ne rapporteras pas les gestes de tes ancêtres ! Les gestes de tes ancêtres sont ici et pas ailleurs ! Certes, ils ont été parasités, remodelés par des emprunts aux autres religions, mais c’est le fruit de l’histoire, c’est ce qu’ils ont construit, apprécie la richesse de leur construction, la richesse de la culture de la nuit !"
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