Fête de la Vanille à Sainte-Suzanne

« Ici Albius féconda la vanille »

3 août 2017

Samedi et dimanche, la municipalité de Sainte-Suzanne organise la Fête de la Vanille. C’est en effet Edmond Albius, alors jeune esclave, qui a découvert la technique de la fécondation de la vanille. Cette découverte permit de créer d’importantes richesses qui ne bénéficièrent pas à celui qui en est à l’origine.

En 1819, Pierre Bernard Milius, Gouverneur de l’île, décide d’introduire de nouvelles espèces de plantes ; pour cela, il organise des expéditions dans le monde entier. Le commandant Philibert, à la tête de l’une de ces expéditions, ramène de Guyane les premières boutures de vanille. L’année suivante, le commandant Philibert, de retour d’une nouvelle expédition, présente au gouverneur d’autres boutures de vanille provenant de Manille. Malheureusement, ces variétés ne s’adaptèrent pas au climat de La Réunion et elles dépérirent.

Septembre 1822, Monsieur Marchand, ordonnateur de Bourbon, ramène du Muséum de Paris des boutures de vanille du Mexique « vanilla fragrans ». Cette espèce s’acclimata très bien dans le nord-est de l’île, plus précisément à Sainte-Suzanne sur le domaine de « Belle-Eau » qui appartenait à madame Fréon, avant de se propager aux autres domaines. Les plants de vanille restèrent stériles dans les premières années et ce, malgré les efforts de recherche entrepris par les jardiniers et botanistes locaux et européens pour féconder la plante artificiellement. Le problème de la fécondation de ces fleurs devenait sujet à controverse.

A Sainte-Suzanne, Ferréol Beaumont Bellier, un homme passionné par la botanique et les orchidées, vivant sur les hauteurs de la commune, poursuit lui aussi ses recherches sur la vanille. En même temps, il se fait aider pour la fécondation de ses fleurs par le petit Edmond, orphelin dès sa naissance, qu’il a pris sous sa protection. Par exemple, il lui apprend à féconder une plante de la famille des citrouilles, appelée « Jolifiat », dans laquelle fleurs mâles et fleurs femelles sont placées sur des rameaux différents. Il montre à l’enfant comment cueillir les fleurs mâles pour les poser sur les fleurs femelles.

Fin 1841, à l’époque de la floraison du vanillier, Beaumont Bellier qui se promène dans son jardin avec Edmond, aperçoit sur son vanillier, une belle gousse. L’enfant lui explique alors que c’est lui qui a fécondé la fleur. Le maître refuse de le croire. Mais deux ou trois jours après, il voit une seconde gousse près de la première. Alors Edmond, pour prouver ses dires, exécute devant lui la délicate opération que tout le monde connaît aujourd’hui, à savoir mettre en relation les organes mâles et femelles.

Le petit Edmond est alors demandé par tous les planteurs des environs, qui veulent se faire expliquer le procédé. De nombreux botanistes refusèrent d’accepter qu’un esclave, d’autant plus un enfant, soit à l’origine une telle découverte.

Le 20 décembre 1848, l’esclavage est aboli à La Réunion. Edmond, homme libre, s’appellera désormais Albius (ce qui signifie « blanc »). Son ancien maître, Beaumont Bellier, et ses amis tentent en vain à maintes reprises d’obtenir de la colonie une « rémunération publique » pour Albius.

Edmond Albius est décédé, à Sainte-Suzanne dans le quartier de Village-Desprez, le 9 Août 1880.

Quoi qu’il en soit, le geste d’Albius, se perpétue dans toutes les plantations de vanille à travers le monde et a fortement contribué à la réputation de l’île. Pionnier du génie collectif réunionnais, Albius a préfiguré les grandes luttes qui ont parcouru la terre de Sainte-Suzanne. A travers ce rayonnement, Sainte-Suzanne est reconnue comme la ville pionnière dans le procédé de fécondation artificielle de la vanille. La liane de vanille qui orne le blason de la ville ainsi que la citation en latin « Hic Vanillam Albius fecundavit : ici Albius féconda la vanille » en sont des témoignages forts.


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