
9 février 1513 – 9 février 2013 : le jour où Mascarenhas découvre l’archipel qui aura son nom
Il y a 500 ans aujourd’hui, une étape marquante de la colonisation de notre région
9 février 2013

Au moment où le peuple réunionnais célèbre le 350ème anniversaire de sa naissance en 1663, il est intéressant de faire un recul historique de 150 ans plus tôt ce 9 février 2013. En effet, aujourd’hui est le 500ème anniversaire d’un événement qui marquera l’Histoire des peuples de notre région, à savoir : la découverte, par un émissaire des colonialistes européens, dans le Sud-Ouest de l’océan Indien d’un groupe de trois îles, qui seront ensuite exploitées de diverses façons — y compris par l’esclavage et l’engagisme — au profit de monarchies et aristocraties européennes. Cet archipel est composé de La Réunion, de Maurice et de Rodrigues.
Voici un bref rappel historique de cet anniversaire, que nous a envoyé un ami historien et dont il y a de nombreux enseignements à tirer pour notre avenir. En particulier : 500 ans après le début de la colonisation de notre région, le peuple réunionnais a-t-il le droit de prendre enfin librement en mains la gestion de son pays pour régler lui-même ses problèmes ?
Il y a un demi-millénaire, le 9 février 1513, un navigateur portugais accoste sur une des trois îles d’un archipel inconnu par les Européens au cœur de l’océan Indien, à l’Est de Madagascar. Il est âgé de moins de trente ans et il se nomme Pedro de Mascarenhas.
Quinze ans plus tard, en 1528, son compatriote et ami Diogo Rodrigues va donner son nom (Mascarenhas) à l’archipel qu’il vient de découvrir à son tour. Lui-même va laisser son nom à la plus petite des trois îles de cet archipel, Rodrigues.
Les deux autres sont aujourd’hui connues en français sous le nom de l’île Maurice et La Réunion. L’archipel porte, quant à lui, en français le nom de Mascareignes.
La route des épices
Issu d’une famille fortunée du Portugal, Mascarenhas a équipé une flotte et s’est lancé sur la route des épices, sous l’égide de la "Casa da India". Cette "Compagnie des Indes portugaises" a été fondée en 1499, quelques mois après que Vasco de Gama eut contourné le cap de Bonne-Espérance et atteint les Indes.
À la fin 1511, tandis qu’il navigue aux alentours du cap de Bonne-Espérance, Mascarenhas apprend que le gouverneur des Indes portugaises est menacé par un soulèvement des populations locales. Il équipe sans attendre une flotte pour lui porter secours et décide de couper au plus court, sans faire de cabotage le long de la côte africaine comme à l’accoutumée.
Un archipel inhabité
C’est ainsi que Mascarenhas atteint l’archipel qui portera son nom. Poursuivant son voyage, on peut supposer qu’il atteint aussi l’îlot isolé de Diego Garcia.
Ce Portugais est peut-être le premier homme à mettre le pied sur l’archipel, même si d’aucuns supposent que les navigateurs arabes, actifs dans l’océan Indien, aient pu déjà le fréquenter.
Toujours est-il qu’à son arrivée, l’archipel est complètement inhabité en dépit de sa fertilité et de son grand potentiel agricole. Il compte une importante flore et une faune endémiques (sans équivalent ailleurs), comme le célèbre dodo, oiseau mythique de l’île Maurice. Une île initialement appelée par les Portugais Ihla do Cerne (île du Cygne). Ses derniers représentants se sont éteints au 17ème siècle, peu après l’arrivée des colons et de leurs chiens.
Mascarenhas poursuivra une brillante carrière au service de son roi. La vieillesse venue, il est nommé vice-roi des Indes. Il meurt quelques mois plus tard, le 23 juin 1555, à Goa.
Une colonisation très lente
Situé au Sud-Ouest de l’océan Indien, à l’Est de Madagascar, près du tropique du Capricorne, l’archipel des Mascareignes est composé d’une petite île de 100 km carrés (Rodrigues) et de deux grandes de 2.000 km carrés environ : l’île Maurice, indépendante, au relief assez plat ; La Réunion, aujourd’hui à la fois région et département français, dominée par un volcan, le Piton de la Fournaise. L’une et l’autre sont aujourd’hui peuplées de plus de 1 million et demi d’habitants au total.
Au 17ème siècle, les Hollandais s’installent sur la première île et la baptisent Mauritius, en l’honneur de leur gouverneur colonial Maurice de Nassau.
La deuxième île est colonisée par le gouverneur Jacques de Pronis. D’abord dénommée Appolinia, en raison de Sainte Appoline, fêtée le 9 février, jour de sa découverte, elle est rebaptisée Île Bourbon en 1649 en l’honneur de la dynastie royale française (elle sera une nouvelle fois rebaptisée La Réunion après la chute de la royauté, en 1793).
La naissance du peuple réunionnais
Le peuplement de La Réunion ne débute que très tard, en novembre 1663, soit un siècle et demi après sa découverte par Mascarenhas, avec l’installation de deux colons français et d’une dizaine de serviteurs malgaches, dont trois jeunes filles. En 1715, on ne compte encore que 2.000 habitants, dont une majorité d’esclaves africains et malgaches.
L’introduction de plants de café de Moka (Arabie) et l’obligation faite aux colons de le cultiver vont contribuer à une première expansion économique. Dans le même temps, en 1710, la France récupère l’île Maurice, que viennent d’abandonner les Hollandais, et la rebaptise Île de France. Sa capitale prend le nom de Port-Louis. C’est sur cette île que, plus tard, en 1787, Bernardin de Saint-Pierre situera l’action de son roman "Paul et Virginie".
Des épices à la canne…
François Mahé de la Bourdonnais, qui a déjà fondé aux Indes le comptoir qui porte son nom, Mahé, donne une remarquable impulsion aux Mascareignes. Sous son gouvernement, de 1735 à 1746, le botaniste Pierre Poivre introduit la culture des épices (girofliers et muscadiers).
Ces cultures ainsi que celle du café vont faire la fortune des colonialistes, avant d’être supplantées comme partout ailleurs par la canne à sucre. Au profit de qui avant tout ?
Des questions 500 ans après le 9 février 1513
Pendant les guerres de l’Empire colonial européen, les Anglais s’emparent de l’île de France. Ils s’en voient confirmer la possession au Congrès de Vienne sous le nom de Maurice.
Après l’abolition de l’esclavage dans leurs colonies en 1833, les Anglais importent massivement des travailleurs sous contrat des Indes du Sud et de Chine. C’est l’engagisme, que les colonialistes français appliqueront à La Réunion après l’abolition de l’esclavage chez nous en 1848.
Voilà comment, pourquoi et pour qui s’est faite la colonisation des pays de notre région depuis cinq siècles. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Quelles sont les perspectives dans le contexte actuel ? Comment et quand le peuple réunionnais va-t-il enfin assumer ses responsabilités dans la construction d’un développement durable, humain et solidaire de son pays ?
Voilà quelques questions auxquelles nous avons à répondre 500 ans après le 9 février 1513…
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