Semaine créole du 24 au 31 octobre

Kivi : la nouvelle revue ’pou démay la lang’

24 octobre 2008, par Edith Poulbassia

La Région a fait le choix de travailler à la valorisation de la langue et de la culture créoles ainsi que de faire de la transmission et de l’apprentissage de cette langue un élément de la construction de l’identité réunionnaise tant auprès du grand public que des scolaires.
Pour la Semaine créole du 24 au 31 octobre, la Région et l’association Office de la langue créole de La Réunion lancent des actions fortes, dont la publication d’une nouvelle revue : “Kivi, pou nout lidantité réyoné”.

Pour la Semaine créole 2008, le Conseil régional et l’Office de la langue créole ont décidé de franchir un nouveau cap avec des actions fortes en faveur du bilinguisme, et de la valorisation de la langue créole.
La première, c’est le lancement d’une revue baptisée "Kivi, pou nout lidantité réyoné", allusion au bois de kivi, plante médicinale qui appartient au patrimoine de La Réunion et qui raconte une histoire de "maronaz", celle des femmes esclaves qui n’acceptaient pas d’être réduites au rang de reproductrices. Cette revue prend ainsi le relais du magazine “Nout Lang”. Kivi s’inscrit dans une démarche volontariste de promotion de la langue créole, sans se fixer de limite quant aux thèmes des articles (culture, faits de société, sport, environnement, etc...) pour toucher un large public. Il n’est pas comme “Nout Lang”, un magazine sur la langue créole. Deux rédacteurs et des pigistes écrivent les articles en Tangol, écriture du consensus. “Kivi” est publié à 1.500 exemplaires pour ce premier numéro sur le "Mariaz la pa baninaz", disponibles dans les points presse. Une revue accessible à tous. « Les articles sont écrits en créole ou en français. Parfois, ils sont résumés en créole, ou alors les titres seulement sont en créole. Ce qui permet d’habituer l’œil du lecteur à l’écriture en créole », explique Teddy Iafare-Gangama, l’un des rédacteurs de “Kivi”.

Français et créoles en symbiose

Pour l’Office de la langue créole, les sondages ont prouvé l’attachement des Réunionnais à leur langue. « La majorité des Réunionnais pense qu’il n’y a pas assez de créoles dans les médias », rappelle Axel Gauvin. En 2007, un sondage demandé par l’Office a montré que 87% des Réunionnais veulent que la langue créole continue à vivre, de même qu’une majorité est pour son enseignement à l’école. La revue “Kivi” devrait donc répondre à cet attachement à la langue.
Il n’en reste pas moins que le chemin est encore long pour que tous les Réunionnais prennent conscience de la richesse du bilinguisme, créole et français, et pour que la langue créole soit reconnue à sa juste valeur, "pa plis, pa moin" que le français. Le chemin est encore long pour que les Réunionnais prennent conscience que le créole peut se doter d’une écriture, qu’il peut donner naissance à des créations littéraires, qu’il peut s’enseigner à l’école. Les résistances sont fortes, et même passionnelles, sans doute parce que débattre sur la langue créole, c’est toucher à ce que nous sommes, à l’identité.

Tèks kréol dans les rues

C’est pourquoi, la Région et l’Office de la langue créole de La Réunion lancent une campagne radio « pou démay la lang, pou mèt en lèr nout lang kréol », avec l’aide de l’association Tikouti. « Cinq spots reprennent une vieille tradition réunionnaise, le dialogue, avec une dimension humoristique dans la forme, mais très sérieux dans le fond », explique Axel Gauvin. Une invitation à la réflexion sur la langue qui sera complétée par une exposition de textes en créole rue de Paris et rue Pasteur à Saint-Denis. « Ce ne sont pas des textes revendicatifs, mais des fragments que nous trouvons beaux, qui nous touchent, qui sont poétiques », ajoute Axel Gauvin.

Cette Semaine créole est enfin l’occasion de faire un bilan, « de tracer les perspectives, affirme Alain Armand, vice-président régional délégué à la Culture. Il faut, à La Réunion, sortir de cette vieille bataille entre le créole et le français, et militer pour un bilinguisme réel, donner une place équivalente à chacune de ces langues. A vouloir combattre le créole, on ne rend service ni au français, ni au créole, et on dénigre la langue maternelle des Réunionnais ». Un colloque est donc programmé le 29 octobre sur “La patiente marche des langues créoles : bilan et perspectives". Un colloque qui réunira des spécialistes de Maurice, de Guadeloupe, de Martinique... et qui insistera en particulier sur l’enseignement du créole.

Edith Poulbassia

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