Festival International du Film d’Amiens 2017

« L’ombre des cannes », maloya, moutia et poésie : nos îles ensemble au FIFAM

8 novembre 2017, par Alain Gili

Gratifié d’un nouvelle équipe, le 37e Festival d’Amiens aura lieu du 10 au 18 Novembre prochains et sa nouvelle direction, la fougueuse Annouchka de Andrade pense à nous, aux « îles sœurs » malgaches, swahili-comoriennes, seychelloises et créoles des Mascareignes : en cela elle innove. En effet pour la première fois les cinéastes de ce jeune « cinéma » (au sens de « production de films-pays »), celui des îles du sud-ouest de l’océan Indien, « l’Indianocéanie » sera honorée. Ce grand festival ouvert pour « tisser le monde » est l’un des principaux dans l’hexagone, avec, grâce à son « père » et directeur de 1981 à 2013 Jean Pierre Garcia. Il est connu pour ses liens avec la Francophonie (l’Afrique, entre autres) et avec l’Amérique Latine. Il inaugure bientôt, du 11 au 18 novembre par ce programme, parmi plein d’autres, ce qui ne fut jamais encore fait… Une idée pour la COI.

Bénéficiaire de la bourse « Brouillon d’un rêve » de la SCAM, et produite par WE FILMS (Jonathan Rubin), ainsi que par un financement participatif chaleureux, avec l’aide de Reunion Première (RFO), la militante culturelle et jeune réalisatrice Sophie Louys envisage d’aller à Amiens pour être présente toute la semaine du festival, et pas seulement pour la toute PREMIERE de son film « Dann fon mon kèr » : un thème et une forme hardis, en 49 minutes .

Premier film indépendant sur les diseurs de textes en créole (ou autres) réunionnais, ou « fonnkezer », son film nous « met dans le rond » : pas celui d’une bataille-coqs, mais au milieu d’un cercle d’amies et amis, « an dalonaz » comme dit kreol. On y verra présentés par Jack Beng Thi, sculpteur s’ouvrant à tous les champs de l’expression, Anne Cheynet, Franky Lauret, Christian Jalma - Floyd-Dog et bien d’autres ! On y verra aussi des sorties initiatiques dans l’île Haute, l’île-mystères-tragiques…

Le charmant court-métrage de fiction autoproduit et réussi de Laurent Pantaléon « La face cachée du père Noël » projeté dans le nord français lui soufflera son air d’alizé bizarre et souriant, car il montre un chaud noël d’été austral, par son personnage, petit créole pauvre et modeste père de famille qui, sans le sou, cherche des cadeaux « pou son bann zanfan ». « La face cachée du père noël » surprit et plut à.. Ouagadougou, au FESPACO 2017, et ailleurs, comme à Vérone, en Italie, à Toulouse). Dans ces deux titres, de Sophie Louys et celui de Laurent Pantaleon, la présence si vraie mais « autre » de Flyod-Dog / Christian Jalma. Antoine du Vignaux, l’Ader (dès 1981) encouragèrent ce créatif issu du peuple, au calme timide, mais de diseur flamboyant. En ce moment, il énumère de semaine en semaine, en public, avec Karl Kugel, autour d’un vrai BAOBAB dionysien (*) sa reconstruction-rite du monde.

Les terres des insulaires, par eux-mêmes

Mickaël Gence, militant réunionnais de l’image pour une révision nécessaire pour l’histoire récente de son île, viendra au FIFAM présenter son travail « Rassine Papa, Monmon : un passé qui passe mal ». Ce doc de 70 minutes est pour lui le premier de plusieurs. Doc en Ile le révéla au public réunionnais ces mois derniers. La Creuse qu’un destin injuste et incroyable lia sous un mauvais signe à… La Réunion des gens très pauvres : ce film ré-examine cela sans mélodrame, avec pudeur donc avec force. Une terre insulaire : dans « Sirena », Camille Bessière-Mithra réinvente une fable de l’océan à travers l’inconscient d’un jeune créole. Cet acteur de nombreux films de La Réunion et même de Guyane devient réalisateur, dans le grand élan créatif que vit une jeunesse réunionnaise restée trop longtemps consommatrice-point-trait.

Une série d’autres « premières » aura lieu (beaucoup sont réunionnaises), parmi lesquelles le curieux et touchant film de fiction d’Olivier Carrette « Le mafatais », un titre de 40 minutes qui suscitera disons, des captations affectives et des débats à l’Ile de La Réunion… Sensible aux formes générales des reliefs, je sens que dans « Le mafatais » le héros évolue depuis les monts-autour-du-cirque-sans-route-ni-autos (Mafate), vers les Bas, la côte et le destin… Alors que toute autre est la vision de l’île moderne cherchant ses racines dans l’autre sens, c’est-à-dire vers les Hauts : « Au-delà de Cap Noir » est le documentaire de création d’Alain Dufau, son seul et très complet (mais discrètement allusif) film réunionnais.

Nous devrions aussi avoir quelques heures au festival FIFAM de Hedi Abidi, pour son film nouveau doc dionysien [1], en première en Europe pour ce film, mais aussi pour le reggae « austral » du groupe du Chaudron-St Denis qu’il défend et illustre « KOM ZOT ». Pour l’hommage au regretté François Kotlarsrki, le FIFAM offre la première en hexagone de son dernier film doc. Cette œuvre, réalisée avec son vieil ami Eric Munch permettra au public d’Amiens de le rencontrer en présence de la chanteuse Nawal, qui en est l’âme et la catalyse de ce film ! Ce Doc « mahorais » et musical (Mayotte Première et associés) s’intitule « NAWAL ET LES FEMMES DE LA LUNE ». C’est aussi une première « an Franss » comme dit kréol : les réunionnais, eux, ont pu le voir grâce au travail efficace de l’association « DOCS EN ILE » de Jean-Marie Pernelle et de ses amis.

L’ïle Maurice sera représentée au FIFAM par David Constantin, peintre, cinéaste, formateur, créateur et directeur du Festival ILE COURT. En première partie de sa soirée, l’Ile Maurice offrira un film court inédit en Europe, remarqué au festival de Madagascar, œuvre d’un des stagiaires de son organisation : « Lot koté lagar », de O’Brian Vinglassalon. Une soirée leur sera consacrée avec l’excellent premier long métrage de David Constantin, dont la première réunionnaise eut lieu au regretté festival FIFAI : « LONBRAZ KANN ». Film dont on souhaite la sortie en salles dans l’ensemble français, hexagone et dans les autres îles que les Mascareignes !

Alain Gili

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