Le débat sur la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires pourrait ne pas avoir lieu

La reconnaissance du créole et la Constitution

27 octobre 2015

Le projet de loi constitutionnelle visant à autoriser la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires est examiné par les sénateurs, en séance publique, mardi 27 octobre 2015. Un vote a lieu sur une question préalable de constitutionnalité, demandée par la Commission des Lois du Sénat. La protection et la promotion du créole sont mises face à des principes tels que l’unité de la République ou l’égalité des citoyens.

Ce mardi 27 octobre à 14h30, le Sénat entamera l’examen du projet de loi constitutionnelle autorisant la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Présenté en Conseil des ministres le 31 juillet dernier, ce texte a pour objet de modifier la Constitution afin de pouvoir ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires adoptée à Strasbourg le 5 novembre 1992 et complétée par la déclaration interprétative annoncée par le Gouvernement français le 7 mai 1999.

Des décennies de luttes

La charte vise à « protéger et de promouvoir les langues régionales ou minoritaires en tant que telles » afin « de maintenir et de développer les traditions et la richesse culturelles de l’Europe ». Pour La Réunion, ce texte fera de la protection et de la promotion du créole un droit constitutionnel. Toutes les lois à venir devront donc en tenir compte. C’est une avancée considérable dans une bataille menée depuis le début par le Parti communiste réunionnais et ses alliés. À une époque où un vice-recteur voulait fusiller le créole, Témoignages publiait des articles écrits dans la langue maternelle des Réunionnais. La révision de la Constitution rendant possible cette avancée doit d’abord être approuvée par les parlementaires. Mais le débat pourrait très bien ne pas avoir lieu.
En effet, les sénateurs examineront cet après-midi la motion tendant à opposer la question préalable au projet de loi constitutionnelle. Si cette motion est adoptée, alors le débat s’arrêtera.
Un communiqué publié le 14 octobre par le Sénat précise d’où vient une telle initiative. Le 14 octobre dernier, la Commission des lois du Sénat a fait part de son opposition à la révision constitutionnelle. « Le rejet de ce texte résulte exclusivement de la volonté de la commission de veiller tout à la fois au respect de la Constitution et au respect des traités », précise le communiqué.

Créole contre « unité de la République » ?

La Commission des Lois rappelle tout d’abord que « la Charte n’a pas été ratifiée par la France, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 15 juin 1999, parce qu’elle comporte des clauses contraires à la Constitution ». Elle estime que le projet de loi constitutionnelle légaliserait des « dispositions qui ont été déclarées contraires à la Constitution par le Conseil constitutionnel en 1999 ».

La Charte serait donc en contradiction avec les articles 1 ?? et 2 de la Constitution qui disent que « la France est une République indivisible » et que « la langue de la République est le français ».

La Commission des Lois a également affirmé que « le projet de révision constitutionnelle serait incompatible avec l’article 21 de la Charte, qui prohibe les réserves d’interprétation, à l’exception de certaines dispositions ponctuelles ».
Elle rejette donc le texte qu’elle juge susceptible de « de déroger aux principes constitutionnels auxquels la France est attachée, l’unité de la République et l’égalité des citoyens ». D’où le dépôt d’une motion qui pose la question préalable de constitutionnalité.

Si cette motion est adoptée, alors le texte ne sera pas débattu, car le Sénat considérera alors qu’il n’est pas constitutionnel.
Ce vote sera donc très attentivement suivi aujourd’hui. Car si la majorité des sénateurs vont dans le sens de la Commission des Lois, alors cela voudra dire qu’ils rejettent une réforme constitutionnelle qui assure la promotion du créole.

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