Notre Histoire : À l’occasion du 86e anniversaire de la naissance de Roland Jamin - 6 -

La ruineuse route littorale

26 juin 2004

Au milieu des années 50, la bataille des conseillers généraux de l’opposition contre la construction de la route littorale au pied de la falaise plutôt qu’en corniche, c’est à dire par le plateau de La Montagne, échoue. Près de 62 millions de francs seront utilisés pour construire 12 kilomètres d’une route qui non seulement aura été « un véritable gouffre financier », nous confie Eugène Rousse, mais qui représente également encore aujourd’hui un réel danger pour les usagers et qu’il faudra entièrement refaire.

Lors de sa session du 17 juin 1958, le Conseil général doit donner son avis sur le mode de financement de la route dite “en corniche”, implantée au pied d’une falaise pourrie et dont la première pierre a été posée le 7 avril 1956 par le préfet Pierre Philip.
Le préfet Jean Perreau-Pradier saisit l’occasion qui s’offre à lui pour souligner que "l’ouvrage sera peu vulnérable aux cyclones et au raz de marée". Il abonde ainsi dans le même sens que son prédécesseur, Pierre Philip, qui avait affirmé le 16 février 1954 que la route qui doit se substituer "aux 32 kilomètres et 110 lacets" de la route de la Montagne sera "une route large et moderne de 11 kilomètres".
Devant des propos aussi rassurants, les conseillers de droite n’hésitent pas à affecter la moitié du fonds routier départemental à la construction de la route en corniche dont les 12,400 kilomètres coûteront 1 milliard 600 millions de francs CFA [soit 32 millions de francs ou plus de 4 millions 800.000 euros] (1). Le coût final s’est chiffré à 3 milliards 100 millions de francs CFA [soit 62 millions de francs ou plus de 9 millions 400.000 euros].
Au nom du groupe communiste et progressiste, le conseiller général Henri Lapierre fait remarquer ceci :

- contrairement à ce que soutiennent la Préfecture et les élus de la majorité, la construction de la route en corniche n’aura aucune incidence sur le coût de la vie. La preuve en a été apportée après la fermeture du tronçon Sud (Saint-Pierre-Le Port) du chemin de fer ;

- sur les 532 kilomètres de routes départementales de l’île, 276 kilomètres seulement sont bitumés. 150 kilomètres seulement de routes communales sont bitumés sur un réseau long de 1.100 kilomètres ;

- si la moitié du fonds routier est affectée à la route en corniche, on se prive des moyens de moderniser l’ensemble du réseau routier de l’île ;

- le fonds routier étant alimenté par la taxe sur les carburants, ce sont finalement les Réunionnais les plus pauvres qui devront supporter la plus lourde charge dans le financement d’un projet aussi onéreux que dangereux (2).
En conséquence, déclare Henri Lapierre, le groupe communiste et progressiste
désapprouve le mode de financement proposé par la majorité.

(à suivre)

Eugène Rousse

(1) Le franc CFA (Colonies françaises d’Afrique) a été institué à La Réunion par décret du 25 décembre 1945. Il valait à sa disparition le 31 décembre 1974 0,02 franc)
(2) Comme chacun sait, cette route dite “en corniche” a été abandonnée 13 ans après son ouverture pour laisser place à la 4-voies actuelle qui, elle aussi, est un véritable gouffre financier.

Roland JaminRoute du littoral

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