Fête de la musique au centre pénitencier du Port

’Mi aim pa la violans’

21 juin 2005

Demain, des détenus du centre pénitencier du Port fêteront la musique. Durant deux semaines, ils ont accordé “leur violon” avec l’oreille musicale de Duda. Avocat brésilien, Duda est un musicien des favelas et “un militant de la première heure du Parti Travailleurs de Lula”. Sa troupe les “Moleque de Rua” est l’invitée de la Ville du Port et de Kabardock pour cette fête.

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Entrer au centre pénitencier du Port, c’est comme pénétrer dans un labyrinthe. De longs couloirs mènent dans les divers quartiers des détenus. À chaque barrière, un contrôle. Tout au long de ce cheminement, on peut rencontrer de jeunes détenus... Ils disent poliment "bonjour monsieur". Certains conversent avec les gardiens en leur faisant part "des difficultés rencontrées au cours de la nuit ou de la journée".

Quand vous voulez, on démarre

Et puis dans une salle, on entend un homme chanter. Est-ce un détenu ? À première vue, rien ne le différencie des autres personnes. "Grat in kou... la, mi et le refrain c’est mi, si". "Quand vous voulez on démarre". "A ou, ou gaign fé la bass". Les participants de cet “atelier chant” synchronisent la guitare basse et rythmique ainsi que les tambours et djembés avec la voix du chanteur. Ils bénéficient de l’expérience de Duda et de sa troupe les “Moleque de Rua”.

Séga, samba, rock malin...

Demain de 15 heures à 17 heures, les détenus du centre pénitencier du Port chanteront “la fête de la musique” sur des airs “de séga, de samba, de rock malin, de funk efficace...”. "Mi aim pa la violans" fredonnait l’un des participants. Un séga où l’on parle des “ladi lafé” qui peuvent se terminer par un fait divers.

Jean-Fabrice Nativel


Les “Moleque de rua”

Moleque signifie enfant dans la langue africaine le “Quimbundo”. Au Brésil, “Moleque de rua” prend le sens de “gavroche” ou “petite racaille”. “Cette expression date de l’époque de la loi dite “du ventre libre”. Au temps de l’esclavage, elle fut une transition à l’abolition : les enfants nés libres de familles en esclavage se voyaient expulsés des exploitations agricoles, puisque que celles-ci ne pouvaient plus les employer comme main d’œuvre gratuite.
La première génération des populations de rue se perpétue jusqu’aujourd’hui dans une société marquée par l’inégalité, la misère, la corruption. C’est dans ce contexte de pauvreté et de violence endémique dans les favelas, que "Moleque de rua" est née comme un refus de l’exclusion.
Le fondateur des “Moleque de rua” est Duda, un avocat brésilien, né dans les favelas. En 1983, il convie les jeunes du quartier, Vila Santa Catarina, à jouer en sa compagnie au festival de “Jabaqura”. Ces jeunes ont pour instruments des bidons et des manches à balai. Ils se retrouvent régulièrement et répètent. Ils participent aux festivals et s’illustrent. Aujourd’hui, ils s’investissent dans les quartiers du Port.


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