Hommage au Rwa Kaf

’Nous devons revaloriser notre culture’

15 décembre 2004

Sainte-Suzanne sera la capitale du maloya. Lundi prochain, le 20 décembre, la ville du ’Beau pays’ dévoilera le nouveau nom de la salle des fêtes du Bocage. Honneur sera fait au Rwa Kaf, Gérose Barivoitse, un zarboutan de la culture réunionnaise, en présence du ministre malgache de la Culture, et du secrétaire général de la commission nationale française à l’UNESCO.

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Sainte-Suzanne sera lundi la capitale du maloya. Hier, durant la rencontre avec la presse, en présence de la famille de Gérose Barivoitse, d’artistes, de représentants de l’Association pour la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise et d’élus de la Région Réunion, le président de la collectivité, Paul Vergès, notait toute l’importance qu’accorde le Conseil régional aux passeurs culturels réunionnais.
D’autant que cette fin d’année a été marquée par la disparition de trois ténors de l’oralité réunionnaise. Après le décès de Gérose Barivoitse, dit Rwa Kaf, en juillet dernier, ce sont deux autres zarboutan culturels qui endeuillaient les Réunionnais par leur disparition. Granmoun Lélé et Granmoun Baba ont rejoint à leur tour le royaume du maloya.
Paul Vergès a souligné "le mérite des générations qui se sont succédé" et qui ont transmis les valeurs culturelles, qui font la force de notre pays. Malgré la ferme volonté d’un pouvoir oppresseur pour évincer ces valeurs, la transmission orale, entretenue par ses granmoun, a permis aux Réunionnais de continuer à porter leur culture.
"Notre papa n’est pas mort", déclarait Reine-Marie Héry, fille du Rwa, tandis que le président Vergès expliquait que "l’on est vraiment mort quand on est oublié". C’est ce qui justifie l’action exemplaire de la Région Réunion, qui rend hommage à un acteur incontournable de la culture réunionnaise, un artiste illettré créateur, gardien d’un savoir, d’un patrimoine, de notre culture réunionnaise et de son savoir de transmission.
Passeur de tradition, Gérose Barivoitse a transmis cet héritage aux générations futures, un héritage qu’il faudra savoir préserver. "Nous devons revaloriser notre héritage", déclare Paul Vergès. La jeunesse réunionnaise doit se montrer engagée dans ce sens.

Honoré “Zarboutan nout kiltir”

Pour la première fois, une région de la République décerne à un de ses artistes un titre, en immense gratitude pour sa contribution à la préservation et à la transmission d’un patrimoine.
"Rendre hommage au Rwa Kaf en tant que “zarboutan nout kiltir” est un signe symbolique fort de notre volonté de reconnaître la qualité et le travail de ceux qui ont œuvré pour que la culture réunionnaise ne meure pas et s’enrichisse de l’échange constant entre ce que nos ancêtres ont apporté et ce que nous construisons" indiquait hier Françoise Vergès, chargée de mission pour la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise. "À travers cet hommage, nous voulons aussi saluer la mémoire de deux grandes figures qui ont disparu cette année à la suite du Rwa Kaf, Granmoun Lélé et Granmoun Baba".
Ainsi, à titre posthume, le Rwa sera décoré en tant que zarboutan nout kiltir. À l’occasion des festivités du 20 désanm, la mairie de Sainte-Suzanne honorera deux personnages emblématiques du "Beau Pays" : Edmond Albius et le Rwa Kaf, en présence de deux personnalités extérieures.
Le ministre malgache de la Culture, Jean-Jacques Rabenirina, avec le secrétaire générale de la commission nationale française à l’UNESCO, seront présents pour cet hommage particulier. Cet hommage est celui que toute La Réunion se propose de rendre à quelqu’un qui fut une figure emblématique de la culture réunionnaise.
"Lo Rwa Kaf ... a développé cette culture par son œuvre et ses créations, qu’il s’agisse d’ethno-médecine, de musique, de chansons, de contes, dans une langue créole dont il a montré à la fois la richesse, la beauté, la force et la puissance créatrice", notait encore Françoise Vergès, qui n’hésite pas à parler de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, dont lo Rwa Kaf était garant, selon les critères de l’UNESCO.

Une statue d’Edmond Albius

En préfiguration de la manifestation organisée pour Lo Rwa Kaf le 20 désanm à Sainte-Suzanne, la famille du Rwa organise vendredi prochain une journée autour de la vie de l’artiste (voir encadré). Le 20, la famille Barivoitse tiendra un stand, de 10 à 16 heures, où seront exposées photographies, coupures de presse, agrémentés de supports vidéo et audio mis à la disposition du public.
Les Réunionnais viendront tout naturellement nombreux pour apprendre de ce personnage culturel. En fait, de 10 à 16 heures, c’est un véritable pôle “Village” qui accueillera les Réunionnais, avec présentation d’instruments traditionnels, atelier contes avec Sully Andoche, Annie Grondin, Marilyne Dijoux, Roger Valiamé.
De 14 à 16 heures, un sobatkoz, programmé par l’Association pour la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise, sera proposé au public. La Réunion porte une forte tradition du culte des ancêtres, que l’on retrouve dans les pratiques chinoises, indiennes, malgaches, africaines, catholiques.
Tout Réunionnais pourra s’exprimer sur son expérience personnelle, et débattre de “L’ancestralité en terre réunionnaise”, autour de l’historien Prosper Ève notamment. À la fin de ce débat, la salle des fêtes du site du Bocage prendra officiellement le nom de salle des fêtes Lo Rwa Kaf, tandis qu’une statue d’Edmond Albius sera inaugurée sur le site du Bocage. Autant dire que le Bocage deviendra un site tout naturellement dédié au maloya. 20 désanm la fèt Kaf èk son Rwa, la kour shemin trwa frèr.
S’ouvrira ainsi, à partir de 20 heures, un grand kabar, avec Firmin Viry, Mélanz Nasyon, Romuald, Dédé Lansor, Françoise Guimbert, Nathalie Natiembé, Jean Louis Fourlin, Babou B’Jalah, Sully Andoche, Renésens, Tapok, Kbis, Style Créole, Biel, Bitasion, Soleyé, Rasine Séga, Macriole, Claris Sianpirave et Tata Maloya, La Kroizé, Pierre Hoarau, Bernard Payet, Alain Armand, Oxid, Force Indigène, Natty Dread.
La scène sera ouverte à lantouraz pintad. Antenne Réunion présentera à l’occasion son journal télévisé de 19 à 20 heures, en direct du Bocage avec la famille du Rwa et des invités. Sainte-Suzanne, le temps d’un soir de fête, célébrera le Rwa du Beau Pays du maloya. Maurice Gironcel, le maire et conseiller général de Sainte-Suzanne, indiquait lors de la sortie du spécial Rwa Kaf édité par le magazine Kalbanon, que sa ville deviendra la capitale du maloya. C’est sûr.

Bbj


Journée lo Rwa

À l’occasion des festivités rendant hommage au Rwa Kaf, sa famille organise
ce vendredi 17 décembre
une journée autour de Gérose Barivoitse, le père de famille, l’ouvrier agricole, l’artiste chanteur, conteur, fonnkézèr. La famille vous propose un repas à midi. Goni vid i tien pa debout. L’après-midi sera chargé, avec une projection et un sobatkoz autour de la vie du Rwa Kaf. Avant-goût de la journée du 20 désanm, où l’on vous attend, au Bocage, de 10 heures à 2 heures et demie du matin. Le 21 décembre, la Région accueille un séminaire sur le patrimoine culturel immatériel.

Bbj


Association pour la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise

Conférence
en hommage au Rwa Kaf
le 20 décembre à Sainte-Suzanne

L’Association pour la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise (AMCUR) s’associe à l’hommage rendu à Gérose Baritvoitse dit lo Rwa Kaf, initié par la Région, en partenariat avec la Ville de Sainte-Suzanne, la CINOR et Antenne Réunion. Il se déroulera le lundi 20 décembre, sur le site du Bocage, à Sainte-Suzanne.

L’AMCUR participe à cet hommage en organisant une conférence sur le thème :

"L’ancestralité en terre réunionnaise",

avec les intervenants/es suivants/es :

l’historien Prosper Ève,
la sociologue Antoinette Betourné
et l’anthropologue Charlotte Rabesahala.

La conférence aura lieu sur le site du Bocage,
de 14 heures à 16 heures.


Nous avons choisi ce thème parce qu’il nous semble que l’hommage à un créateur réunionnais, riche de plusieurs origines indianocéanes, exige que l’on réfléchisse sur les diverses formes du passage d’un disparu au statut d’ancêtre.

Nous faisons le souhait de nous retrouver tous et toutes ensemble dans cette manifestation à haute valeur symbolique.

L’AMCUR

Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise

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