33 ans après ’Peuple de La Réunion, peuple du Maloya’

Nouvelle victoire d’un combat réunionnais : le maloya de l’île de La Réunion dans le patrimoine mondial

2 octobre 2009

Durant des décennies, tout ce qui faisait l’identité culturelle du peuple réunionnais a été combattu par le pouvoir en place. Face à cette répression, une résistance s’est organisée autour du PCR. Les fêtes de ’Témoignages’ étaient le lieu où le maloya pouvait s’exprimer. La création de l’ADENOE et les premières victoires remportées sur la fraude en 1971 allait permettre d’enclencher une dynamique irréversible : le maloya et le 20 décembre sont des composantes essentielles et reconnues du peuple réunionnais. Les assemblées du Parti communiste réunionnais étaient aussi un autre lieu d’expression du maloya. À l’occasion de son 4ème Congrès en 1976, le Parti communiste réunionnais avait produit deux disques. Sur ’Peuple de La Réunion, peuple du maloya’, voici un texte écrit par le PCR.

Dans le Sud de l’île :
Le peuple du maloya

Il suffit de peu de choses.
Un tambour, un cayamb, un petit triangle de fer, un soliste, un chœur, des danseurs. Le soliste donne le ton, la note, le thème.
Lé lé lé lé lé lé lé lé
C’est l’enfance de l’art

Il suffit de peu de choses.
D’être descendant de "cafres" ou de "malabars". De porter encore dans son cœur la souffrance secrète du temps de l’esclavage, la cicatrice vive de l’engagement.

Il suffit de peu de choses.
D’avoir en commun un passé brûlant et silencieux. De n’avoir jamais entendu parler dans les écoles de nos ancêtres et de notre histoire.

Il suffit de peu de choses.
D’être né sur cette terre là, au bout d’une case en paille de l’époque. Une naissance à même le sol.

Il suffit de peu de choses.
De quitter l’école jeune. De travailler durement sur la terre des autres. De suer, de charroyer. De se marier, d’avoir des enfants, sans bien savoir si l’on aura de quoi les nourrir. D’avoir douté de soi en pensant qu’après tout, on était une "race" sans avenir, arriérée, inférieure.
Tout juste bon pour servir les autres. Puisque c’était ce qu’ils disaient dans leurs écoles, leurs administrations, leurs églises, leur métropole, leurs livres, leur musique.

Il suffit de peu de choses.
De n’avoir pas baissé la tête.
D’avoir été de ceux qu’un certain soir d’élections, les gendarmes sont venus chercher. D’avoir gardé l’espérance intacte qu’autre chose était possible, que la misère n’était pas une vocation.
Lé lé lé lé lé lé lé lé

Alors le maloya commence.
Ce n’est pas de la musique "engagée". C’est mieux que cela. C’est la vie. C’est la chronique quotidienne. C’est l’humour. Ce sont les saisons, les travaux, les rites, les fêtes, les tracas.

C’est le récit d’un peuple qui vient du plus profond, habité d’esprits, d’ancêtres, de tam-tam, de gros-blancs et de marrons, de parias tamouls et de religion interdite.
C’est une manière de se chanter et de se dire. Dans le naufrage de la misère, renaître et se reconnaître.

Dans cette nuit du 20 décembre où se chante et se danse l’abolition de l’esclavage, dans cette pauvre case en tôle de "sudiste", on comprend tout d’un coup que le maloya n’est plus une histoire de "cafres", mais de Réunionnais.
Ce soir-là, à la Ligne Paradis, autour du rouleur, il y a des "petits blancs" et des "chinois noirs", des métis "malabars" et des "cafres". Mais il n’y a pas de "gens bien".
Aucun propriétaire.

Et encore une fois on a la preuve qu’il existe dans ce pays une adéquation entre le discours politique et la culture populaire. Et cela peut être la réponse typique, naturelle, envoûtante du colonisé de La Réunion.

Il suffirait de peu de choses, simplement, d’un rouleur :
Lé lé lé lé lé lé lé lé
Ah chemin Grand Bois çà lé long,
Ah ti pas ti pas larivé…

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