Ô Maloya Maloya !

3 octobre 2009

Ô Maloya Maloya1 ! Tous les Hommes sont Frères !!!
Ferme les yeux, Frère et écoute. La musique accompagne ma lettre.
Un Frère c’est une épopée, un grand voyage.
Je traverse ta peau, couleur de tous les continents… et m’unis à ton sang, rouge comme le mien.
Je regarde dans tes yeux et je parcours ce lieu : La Montagne. Saint-Bernard. Léproserie.
Les pierres pleurent encore. Souffrances des chairs en lambeau, de la honte, du rejet. Joie des Frères, des Sœurs acharnés à les aimer, à les soigner.

Ô Maloya Maloya ! Frère rouleur avec le bobre, le triangle, le kayamb, la guitare et autres…
vibrez pour honorer Frère Raimbaud, Filles de Marie, Marie Madeleine de la Croix (avec pour la première fois des sœurs noires et blanches anciennes esclaves et filles d’ex-maîtres), Raoul Follereau. Vibrez pour honorer les cœurs de fraternité et de justice : tant et tant, dont le notre, dont ceux des Anciens, de tes Transmetteurs, oh Maloya, à travers les siècles.

J’écoute ton cœur Maloya. Tu m’emportes. Avec toi, je redescends à la mer…. jusqu’aux fonds de cales. L’enfer fait aux noirs. Je suis leurs larmes, leurs silences. Lourd silence. Je perds jusqu’à mon nom, ma lignée, suis esclave en plantation ou en maison.

Ô Maloya Maloya ! Délivre-moi de la haine et de la rage. Gandhi, Martin Luther King, Angéla Davis, Bob Marley, Steve Biko, ramenez nous au Pays ! Comme un éclair dans un orage étrange, je remonte le temps, je retrouve l’Afrique mon origine,
ma civilisation, tout aussi importante, riche que l’indienne, l’européenne, la chinoise. Je respire enfin. Je reprends toute mon envergure. La Réunion aussi.

Je trace des lignes de mémoire sans interruption,
du présent à tous les passés, traversant les enfers esclavagistes et tyranniques pour rejoindre mon village d’antan, les ancêtres, la Grande Sagesse.
Ces lignes de mémoire me rendent ma Vie avec un grand V.
Je peux être enfin mon présent, Frère du village planétaire.
Alors je redonne à ma main sa réalité complémentaire : son ouverture totale des devoirs avec partage-soins et son poing serré des droits avec respect-égalité de valeur–égalité de chances.

Ô Maloya Maloya ! Tu accompagnes le chant, le mot. Frère mot oh combien quand il est au service du Beau, du Bon, du Vrai, du Juste, du Doux
Tu es la note aussi, quand une note noire vaut une note blanche, quand la note écarte les carapaces pour toucher la conscience de chacun, de chaque chose, de chaque mémoire.

Ô Maloya Maloya ! Cœur de résistance et de paradis, éveille-toi davantage au présent. Réveille le Frère qui sommeille encore en nous : femmes et hommes, de l’enfant au vieillard.
Secoue jusqu’à nos pensées parfois si basses.
Libère-nous des esclavages modernes : consommation, porno, prostitutions, maltraitance, violence, irrespect, alcool, drogues, communautarisme, apathie, égoïsme, sexisme, racisme, sectarisme, élitisme, eugénisme, manipulation, préjugés, domination-soumission…

Ô Maloya Maloya ! Une dernière fois, tu m’entraînes. Où ? Là haut dans le ciel. Vers quelle compassion ? Vers quelle action ? C’est notre île qui t’importe. Je descends en son âme et j’entends sa plainte. La Réunion a mal : mal à ces tunnels sans autorisation, aux pollutions, aux animaux massacrés, à la nature bafouée, pressurée jusqu’à la mort, aux avidités qui font croire à certains que tout leur appartient.

Ô Maloya Maloya ! Tu nous réunis en Fraternité et en vigilance, comme ici à l’ancienne léproserie.
L’île a chaud au cœur, à nouveau.
Oui ici et ailleurs, dans toutes nos couleurs, toutes nos religions ou philosophies, toutes nos origines, toutes nos conditions riches ou pauvres, tous nos états de santé, dans tous nos âges,
tu nous secoures.
Tu nous inspires des pensées, des gestes, des créations, des mots, des actes radieux de Justice, de Paix, d’Égalité et de Partage….
Frère maloya maloya sois-en un des garants,
comme toi, comme moi, comme nous.

Mercis.

Michèle P.

1 – Texte lu au Festival Ô Maloya (8-7-2007) Saint-Bernard La Montagne, avec Tibwa.

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