Philosophie et tolérance

16 novembre 2006

Aujourd’hui, partout dans le monde, à l’initiative de l’UNESCO, on célèbre la philosophie et la tolérance. Plusieurs manifestations sont organisées à travers le monde et notamment dans les pays suivants : Bénin ; Burundi ; Cameroun ; Canada ; Colombie ; Congo ; États-Unis ; Éthiopie ; Fidji ; Finlande ; Ghana ; Kenya ; Mali ; Mexique ; Namibie ; Népal ; Nigeria ; Sénégal ; Sri Lanka ; Tanzanie ; Panama ; Philippines ; République dominicaine ; Suisse ; Turquie ; Viet Nam et Zimbabwe... Et tout particulièrement à Rabat au Maroc et à Paris au siège même de l’UNESCO, avec des colloques sur “Penser la différence” et “La philosophie comme pratique éducative et culturelle : une nouvelle citoyenneté.
À l’occasion de la Journée Internationale de la Tolérance, le Prix UNESCO-Madanjeet Singh pour la promotion de la tolérance et la non-violence sera remis au lauréat de l’édition 2006. Créé à l’occasion du 125ème anniversaire de la naissance du Mahatma Gandhi - grâce à la générosité de l’écrivain et diplomate indien Madanjeet Singh, Ambassadeur de bonne volonté de l’UNESCO -, ce Prix est décerné tous les 2 ans pour récompenser des réalisations exceptionnelles, de personnes ou d’institutions, qui ont contribué à promouvoir la tolérance et la non-violence. Après l’écrivain et journaliste bangladeshi Taslima Nasreen, en 2004, cette distinction honore, cette année, le Sri-lankais Veerasingham Anandasangaree, Président du Front Uni de Libération Tamoule (FULT). Infatigable défenseur de la démocratie et de la résolution pacifique des conflits, il a contribué à mieux faire connaître, dans un esprit de dialogue, la cause des Tamouls, en tentant de promouvoir des solutions non-violentes au Sri Lanka et en s’élevant contre le terrorisme.

Ici à La Réunion, les entretiens de l’UCOI ont consacré hier un atelier-débat au thème très riche “Existe-t-il une philosophie réunionnaise ?”, dont “Témoignages” se fait l’écho ici même, complété de contributions reçues après l’appel que notre journal a lancé pour célébrer cette Journée Mondiale de la Philosophie.
Autant de thèmes de réflexion sur la société réunionnaise qui s’est construite autour de la rencontre des peuples venant de différents continents. On trouve la traduction dans : la population, la culture, la religion, la cuisine, l’architecture... Quelles sont les influences sur la réflexion et le comportement des Réunionnais dans leur vie quotidienne ?

Témoignages

• Radjah Véloupoullé, Président de la Commission Culture du Conseil régional, formateur de profession, possède un DEA et un Doctorat en philosophie. Plus qu’une matière scolaire, c’est « un art de vivre », un langage universel comme « l’élaboration de l’esprit critique » de tout être humain. La philosophie n’est pas réservée aux élites, mais s’offre à chacun de nous.

« Amener l’enfant à réfléchir sur lui-même et sur le monde »

Vos études en philosophie vous sont-elles utiles dans votre quotidien ?

- Si j’ai choisi des études de philosophie, c’est plus par obsession que par vocation. Elle m’a longtemps structuré. Je vis la philosophie au quotidien. Ce n’est pas une discipline comme une autre, elle s’immisce dans tout. Il y a une attitude, un rapport, une conception de la philosophie qui se pratiquent en Orient alors qu’en France, c’est une matière académique que l’on apprend de façon très technique à l’Université. Mais en Inde, en Chine..., elle ne se détache pas du quotidien, c’est plus un art de vivre. Pour ma part, elle me permet de prendre une certaine distance, un recul. Elle m’influence grandement. Qu’il s’agisse de traiter des dossiers qui ont un rapport avec la politique ou de formation, elle me permet de ne pas trop céder aux premières impulsions, émotions.

Que pensez-vous de l’enseignement de la philosophie à l’école ?

- Il faut absolument que la philosophie soit encore présente dans les programmes scolaires, mais peut être aménagée différemment. C’est uniquement en classe de Terminale que les élèves rencontrent la philosophie, son histoire car en 1 an, ils n’ont pas le temps d’aborder la phase pratique, de se mettre à l’élaboration de l’esprit critique. Il faudrait que la philosophie soit enseignée dès le collège. Cela peut être sur des questions d’ordre physique ou philosophique à proprement parlé : la liberté, le bonheur... afin d’être progressivement affiné pour amener l’enfant à réfléchir sur lui-même et sur le monde, à se poser les questions de la philosophie dégagées par Kant : D’où je viens ? Que faire ? Où allons-nous ? (question implicite de la mort). « La philosophie, c’est apprendre à mourir », comme disait Montaigne. Avec 8 heures de philosophie par semaine, les élèves de Terminales littéraires sont saturés. Une refonte est selon moi nécessaire vers un enseignement plus précoce. De plus, la langue est aujourd’hui très technicisée, très spécifique à certaines œuvres ou auteurs, mais d’autres prennent le relais pour simplifier le langage. Bien sûr, il faut aussi veiller à ne pas tomber dans un autre extrême : "le populisme", si je peux employer ce mot à la mode. Le rôle majeur de la philosophie, et c’est la définition que j’en donne, c’est de participer à l’élaboration de l’esprit critique. C’est donc une richesse à conserver et à cultiver.


• Dominique Herrbach, professeur de philosophie et de littérature classique au lycée agricole de Saint-Paul, se dit favorisé par ses conditions d’enseignement familial avec une classe de Terminale S de 15 élèves qui plus est intéressés par la matière.

La philosophie « commence à tout instant »

Usez-vous de philosophie en dehors des classes, dans votre vie personnelle ?

- C’est le vœu de chaque professeur, quelle que soit sa matière, d’être philosophe au quotidien. Mais dans ce métier, ce système, c’est difficile... c’est mon rêve d’être philosophe au quotidien. Quand je suis en classe, je ne suis pas le même homme. En classe, je suis dans le discours moral, éthique, mais dans ma vie...

Est-ce que l’on pratique la philosophie sans le savoir ?

- Bien sûr, la philosophie est ouverte à tous. Elle commence à tout instant, dès que tu t’étonnes. Aristote disait d’ailleurs que "La science commence avec l’étonnement". Si tu ne te lèves pas en admirant le soleil, la nature, les gens... tu ne connais pas. Ce n’est pas l’application de connaissances scientifiques et ce serait une grande amnésie philosophique de croire qu’il y a des canons philosophiques. Il faut que la philosophie soit modeste. « Il y a plus de choses au ciel et sur la Terre qu’il n’y en a dans la philosophie », disait encore Hamlet de Shakespeare.


• Du côté des élèves

David, 17 ans : Je trouve la philosophie intéressante, on apprend plein de choses. Elle nous explique plein de choses de la vie courante, met le doigt dessus. Par exemple, notre professeur dit que l’on désire forcément ce que l’on n’a pas. Peut-être alors que du coup, on ne prête plus attention à ce que l’on a ? Elle nous apporte toujours plein d’explications de ce genre.

Stéphane, 17 ans : La philosophie, c’est bien. On apprend de nouvelles choses, découvre des auteurs mais aussi, on retrouve un peu de ce que l’on vit tous les jours. Pour moi, même si je n’en ferai pas longtemps, c’est important la philosophie.

SL


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