Pour la défense de la chanson réunionnaise

7 décembre 2006

Lors de la conférence-débat consacrée à la chanson réunionnaise, mardi soir, au Centre Saint-Ignace à Saint-Denis, le premier à prendre la parole a été Arno Bazin, le leader de Tapok. Celui-ci a expliqué que son groupe avait été invité au fameux Festival de Bourges. En outre, il se rend dans 15 jours en Métropole pour participer au célèbre “Africolor”, programme de festivités impressionnant qui se déroule en Ile de France et qui a révélé de nombreux musiciens. Le meneur de Tapok a rappelé tout l’intérêt qu’il porte à la chanson réunionnaise puisqu’il a publié un livre à compte d’auteur portant sur les compositeurs de l’île qui ont édité un disque entre 1920 et 1991.

Puis, Bernadette Ladauge, l’auteur de la fameuse édition consacrée aux 100 ans de la chanson réunionnaise rassemblée en 4 volumes, a souligné les 3 périodes qui caractérisent le développement de celle-ci. La première va des premiers peuplements de l’île à 1830. Elle la qualifie de « période d’apport », avec les populations d’Afrique, de Madagascar et de France qui apportent chacune ses traditions musicales. Puis, la créolisation correspond au deuxième moment et s’étale entre 1830 et la fin du 19ème siècle, et un des auteurs les plus représentatifs de cette période est Frédéric Legras. Enfin, à partir du début du 20ème siècle, il s’agit de la folklorisation, avec la mise en scène de la chanson. Les premiers hérauts de cette tendance sont Georges Fourcade et François Lefèvre qui seront tous deux abondamment pillés et copiés par la suite.

Bernadette Ladauge indique ensuite l’importance du personnage de l’île comme thème récurrent des chansons. A une personne qui lui demande pourquoi les hommes sont surreprésentés, elle indique qu’il existe quand même quelques grands noms tels que Jacqueline Farreyrol. En ce qui concerne Nathalie Natiembé, elle la classe en revanche plus dans le domaine du chant.

Arno Bazin reprend alors la parole pour indiquer l’aspect prolifique de la production réunionnaise avec plus de 300 CD par an. Il mentionne la demande du public d’écouter la musique lontan. Pour ce faire, il rappelle le succès de l’émission qu’il anime depuis 6 ans sur Radio Arc en Ciel, qui passe des standards. Il parle ensuite des éditions Takamba qui ont édité 11 CD cette année, mais dont le plus grand succès reste le disque d’Alain Péters.
Lorsque le public demande quand est-ce que les artistes réunionnais se sont à nouveau intéressés à la musique indienne, les 2 intervenants ont proposé plusieurs pistes. Tout d’abord, ce renouveau a été facilité lorsque les transports se sont démocratisés. Puis, il y a eu la liberté d’expression apportée par l’arrivée de la gauche en 1981. Arno Bazin pointe aussi le côté commercial. Du fait du succès des Bollywood, il peut sembler porteur pour des artistes de surfer sur cette vague.

Après avoir écouté quelques morceaux dont “Cœur marron”, le leader de Tapok espère que Davy Sicard serve de Cheval de Troie à la musique réunionnaise pour enfin pénétrer le marché hexagonal.
Une personne, dans le public, fait observer qu’Alain Lorraine avec “Sur le Black” s’était directement inspiré du “Sur la route” de Jack Kerouac ou que Alain Péters a beaucoup été influencé par la musique contestataire américaine. De-là, il demande les répercussions que cela a provoqué dans la chanson réunionnaise. A cette interrogation, Bernadette Ladauge rappelle que c’est Pop’s Expérience qui a été pionnier en ce domaine. Puis, il y a eu Ti-Fok, Alain Péters et Ziskakan. Toute la difficulté, rappelle-t-elle enfin, est de ne pas être instrumentalisé. Et elle renvoie à la lecture du n°26 d’“Akoz”, consacrée à... “La chanson engagée à La Réunion”.

M.D.


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