Fête malgache du Barachois

Pour la reconnaissance de nos origines malgaches

26 juin 2006

Aujourd’hui, nous fêtons le 46ème anniversaire de l’indépendance de Madagascar. Quasiment un millier de Réunionnais ont roulé Salegy sur le Barachois, mais pas seulement. Le collectif pour Madagascar ouvrait la scène à des artistes malgaches, aux côtés de Réunionnais et Mahorais, enthousiastes tous, avec en prime les hymnes nationaux malgaches et français.

Notre histoire est indéniablement liée à celle de la Grande Île rouge. Peu de Réunionnais savent que notre grand-mère à tous portait le nom de Siarane, originaire de Madagascar. Dès le début de notre peuplement, l’apport malgache trouve son importance sur notre terre, bout de caillou dans l’Océan Indien, grain de sable à l’échelle de l’humanité. Victimes de la traite négrière, des Malgaches (Merina, Betsimisaraka...) ont foulé une dernière fois leur terre pour gagner Bourbon, c’est à qui via la Baie d’Antongil, de Foulpointe ou de Tamatave, pour les principaux centres de traite. D’autres ont quitté leur terre rouge natale bien plus discrètement, alors même que la traite était prohibée par de légères lois “humaines”. Encore faut-il citer Fort Dauphin dont sont originaires de nombreux Réunionnais. D’autres indicateurs, toponymiques, procéduriers, politiques, témoignent de la lutte initiée par des esclaves malgaches pour recouvrer une liberté éphémère. Les grands noms du marronnage réunionnais (Cimendef, Sarsmat, Mafate, Dimitile, etc.) nous renvoient à l’île pied droit, qui fit imaginer à l’illustre fou génial réunionnais Jules Hermann, l’écriture des "Révélations du Grand Océan". La mémoire orale réunionnaise conserve quant à elle précieusement cette origine matricielle. Le serviss kabaré, le moring, le maloya, sont tous empreints d’une succession malgache indéniable. Les Réunionnais en sont-ils seulement conscients ?

Une date réunionnaise pour l’indépendance malgache

La place du Barachois grouillait de Réunionnais, samedi, à un tel point que la route du Barachois initialement ouverte fut fermée aux automobilistes. Il faut dire que chaque année, depuis une année 2002 symbolique, cette manifestation attire de plus en plus de monde à La Réunion. Cette année-là, une manifestation vibrante exigeait la reconnaissance des urnes, le choix du peuple en faveur du prince Tiko. Didier Ratsiraka devait céder sa place à Marc Ravalomanana, ancien maire de Tananarive, qui plantera douze oliviers dans les jardins du Rova, le palais de la Reine, classé au Patrimoine de l’Unesco. Symboliquement religieux ? ou religieusement politique ? Bref ! Le public réunionnais répondait présent à la 5ème édition de la fête malgache du Barachois, qui eut pour marraine Tiana. La chanteuse animait la soirée. Les organisateurs jubilaient. L’intégration de la communauté malgache à La Réunion avance pas à pas. Les Réunionnais comprennent quant à eux "tilanp tilanp", la pertinence de la place de cette communauté dans leur construction identitaire. "Cette manifestation s’inscrit dans une volonté de s’insérer dans le calendrier des fêtes à vocation identitaire, au même titre de la fête Kaf, du Dipavali, etc.", explique Alain Couderc, membre du Conseil d’administration du collectif. Akoz pa ? Et ce dernier de poursuivre "cette fête a plusieurs objectifs : nous souhaitons l’intégration des Malgaches à La Réunion, et nous montrons le métissage réunionnais inhérent à une véritable cohésion sociale". Artistes chinois, mahorais ou réunionnais ont été sollicités pour cette manifestation aux côtés d’artistes malgaches, soit une trentaine de groupes. Séga, maloya, salegy ont fait la joie du public, et notamment les “guest stars” malgaches Zamba et Sami Andriamanoro. Aparté : le groupe Lindigo, qui se ressource à travers ses racines malgaches, lançait son maloya endiablé. Bougez jeunesse !

80% des Réunionnais sont d’origine malgache

Intégration, disions-nous ! "Malgré une avancée tangible car plusieurs Réunionnais n’hésitent plus à revendiquer leurs origines malgaches, il subsiste une forme de rejet ou de discrimination face à l’emploi, au logement, et face à une représentation institutionnelle", déclare Alain Couderc, qui continue "les historiens et les généticiens admettent que 80% de la population réunionnaise ont du sang ou des chromosomes malgaches. Donc 80% de la population réunionnaise sont d’origine malgache". Il faut savoir que notre île compte "environ 3000 étrangers réguliers, sans titre de séjour, à qui il faut ajouter 15.000 binationaux, qui ont la chance de détenir les deux nationalités, française et malgache", indique Alain Couderc. Les jeunes Malgaches ne semblent pas contrariés par l’accueil administratif français. La Réunion est une porte de la réussite. Espérons que cette manifestation saura réussir son pari : intégrer la communauté malgache, à l’origine de notre peuplement, de notre histoire, de la lutte pour la liberté. "Tilanp tilanp", pourrions-nous dire, nous avançons dans la reconnaissance d’une part indéniable de nos racines réunionnaises. La fête malgache du Barachois tient cet objectif. Anou ansanm ?

Babou B’Jalah


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