’Le promeneur du champ de mars’

Réalisé par Robert Guédiguian, avec Michel Bouquet, Jalil Lespert, Philippe Fretun.

10 mai 2005

(page 6)

Il est sans doute plus facile à un Géant du théâtre de se glisser dans la peau d’un géant de la politique ! "Le promeneur du champ de mars", en ce moment dans les salles de cinéma de Saint-Denis, est le film à ne pas manquer. Ce film magnifique nous transpose dans l’intimité d’un président de la République dans ses derniers instants, les plus fragiles. Les deux dernières années de François Mitterrand au pouvoir sont décortiquées. Face au président, un interlocuteur tenace qui ne lâche pas d’un iota et pousse le grand homme dans ses derniers retranchements.
Avant d’être un film sur Mitterrand (qui n’est d’ailleurs jamais nommé, le générique lui-même le désigne subtilement par "le président"), c’est avant tout le combat poignant d’un homme face à la maladie, d’un homme qui vivait sa vie comme un personnage de roman, de ces romans qu’il affectionnait tant.
Michel Bouquet atteint le sublime dans cette œuvre, il est rentré dans les habits du Président comme certains rentrent dans une paire de charentaises, le soir au sortir du travail. Mise à part la bonne réalisation de Guédiguian, il y a quelque chose qui nous scotche au fauteuil, c’est Monsieur Michel Bouquet. On pourrait trouver dans son jeu une certaine ressemblance physique, qu’il ne cherche jamais à imposer, ce grand acteur devient dans ce film extraordinairement génial, il atteint sans aucun doute la perfection, il serait vraiment décourageant de ne pas le voir couronné par un grand prix pour son interprétation.
"Le Promeneur du champ de Mars" ne doit donc pas être vu comme une œuvre critique et pleine de révélations sur Mitterrand, mais comme un grand film humaniste.
Quant au volet politique de cette œuvre, Guédiguian n’a pas fait un film militant, mais il n’en demeure pas moins que certaines sentinelles socialistes viendront à raser les murs s’il leur arrivait d’assister à la projection. Ce film dans sa partie finale, je l’ai reçu comme un plaidoyer testamentaire au peuple de gauche qui est abusé, trahi par la pensée de certains prétendus Socialistes qui appellent à voter “oui” au prochain référendum. N’oublions pas que les dialogues que vous entendrez de la bouche de Michel Bouquet sont les propres paroles de Mitterrand recueillies par l’écrivain journaliste Benamou et lorsque le président dit qu’après lui viendra une Europe des marchands et de l’argent sans âme et sans véritable identité, lorsqu’il dessine le contour de ceux qui le renient dans son camp, on se met à penser que sans doute il était visionnaire.

Philippe Tesseron


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