Histoire : Parution de ’Voyage à Rodrigue’

Récit de voyage, témoignage sur les Mascareignes au 18ème siècle

9 juin 2004

"Un jalon nécessaire à l’Histoire de La Réunion" : c’est ainsi que Marie-Paule Janiçon et Sophie Hoarau résument ce "Voyage à Rodrigue" effectué par le chanoine Alexandre-Gui Pingré dans les Mascareignes en 1761.
Ce texte, d ‘une grande richesse, et d’un intérêt autant scientifique qu’historique, aurait tout aussi bien pu rester dans l’anonymat d’une documentation dense, perdue au milieu d’une mine d’information. C’est tout le mérite de Marie-Paule Janiçon et de Sophie Hoarau d’avoir su se pencher avec passion sur ce qui peut apparaître en premier lieu comme un récit historique d’une richesse indiscutable, mais dont l’abord peut sembler rébarbatif.
Leur mérite est d’autant plus grand qu’elles ont eu à travailler sur ce récit de voyage dans le cadre d’une maîtrise soutenue en 1992 sous la direction de Jean-Michel Racault. "Deux années de notre vie sans vacances", plaisante Marie-Paule Janiçon. Les deux jeunes femmes venaient tout juste de commencer à enseigner et il a fallu concilier études, enseignement, vie familiale... L’une enseignait à Saint-Pierre, l’autre à Saint-Benoît, ce qui ne facilite pas les choses dans le cadre d’un travail en commun. Mais au final, ce travail de recherches fut couronné de succès avec une mention très bien et les félicitations du jury... "Si Jean-Michel Racault a choisi d’exhumer et de faire publier ce récit de voyage sur lequel nous avons travaillé pour notre maîtrise en 1992, c’est que ce document présente un intérêt incontestable pour la connaissance historique de notre région", expliquent les auteurs.

Témoignage de première main

Ce "Voyage à Rodrigue", écrit en 1761, relate l’aventure, et le mot n’est pas trop fort, du chanoine Alexandre-Gui Pingré. Qu’on s’imagine simplement qu’en ce siècle des Lumières, ce savant, âgé de 50 ans, envoyé par l’Académie des Sciences de Paris pour observer le transit de Vénus, allait parcourir un long, très long périple dont l’objectif initial était d’observer ce phénomène astronomique rare et d’une importance capitale pour l’époque, puisque cette observation pouvait permettre la détermination de la distance entre la terre et le soleil. Le chanoine Pingré faisait partie d’une cohorte de 120 savants expédiés de part le vaste monde, en des points différents.
Ce long périple qui le mena de la France à l’océan Indien, s’effectua sur fond de guerre franco-anglaise. Un conflit qui durait déjà depuis quatre ans et qui eut pour conséquence de raréfier les voyages sur les mers de l’Inde et de rendre encore plus rare les voyageurs, scientifiques ou autres, susceptibles de s’intéresser à des îles qui pour l’époque, n’ont d’intérêt que d’être de simples escales sur la route des Indes. Jour après jour, Pingré va consigner sur son journal aventures maritimes, exotiques ou scientifiques avec rigueur et précision. Ce qui n’empêche pas ce témoignage de première main d’attester de la part de son auteur d’une certaine curiosité, d’esprit critique, et même d’une certaine dose d’humour et d’ironie.
L’astronome Pingré sort volontiers de son champ d’observation pour s’intéresser à la flore et à la faune, avec l’aide de son assistant Thuillier, chargé par le naturaliste Buffon de ramener des spécimens de flore et de faune en France. C’est pourquoi ces trois mois et demi passé à Rodrigue, ce mois et cinq jours passés à l’Île de France et ce mois passé à l’Île Bourbon ont débouché sur des récits d’une grande richesse. Rien que pour ce qui concerne La Réunion, son récit, écrivent Marie-Paule Janiçon et Sophie Hoarau "s’avère un témoignage nécessaire pour une période qui reste peu traitée".

S.D.


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