« RFO et la MCUR : combat d’arrière-garde… ou campagne précoce ? »

18 juillet 2009

Quelques jours après que le Premier ministre, inaugurant la route des Tamarins, ait qualifié la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise « d’autre symbole du dynamisme réunionnais », RFO relance la polémique.
Alors que le consensus relatif à la MCUR gagne du terrain, le service public de l’information a mentionné à deux reprises en une seule journée comme « alliés de circonstance » de la Région les membres d’un collectif d’artistes et d’intellectuels auteurs d’un manifeste en défense de la MCUR. S’essayant à la prophétie, le service public de l’information fait de la MCUR « l’un des enjeux des élections régionales ».

Lutter contre les stéréotypes et les discriminations qui perdurent dans notre société issue de l’esclavage et de la colonisation ; ouvrir La Réunion à l’ensemble des cultures du monde ; restituer aux Réunionnais le lien avec leurs ancêtres : tels sont les buts fondamentaux de l’édification d’une Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise (MCUR).
D’une ampleur inégalée dans l’histoire culturelle de notre pays, le projet appelle nécessairement à l’échange et à la réflexion dans les secteurs les plus larges de la population réunionnaise.

Un débat dévoyé

Fort malheureusement, les polémiques, invectives et règlements de comptes personnels se sont trop souvent substitués au débat de société fondamental que les Réunionnais étaient en droit d’attendre. Loin d’œuvrer à la construction d’un débat contradictoire constructif, plusieurs médias ont, au détriment de l’expression citoyenne, témoigné de la complaisance à l’égard d’opposants obsessionnels, laissant fréquemment resurgir une violence verbale que l’on croyait disparue.
Si brutale qu’elle ait pu être, la polémique a au moins eu le mérite de faire connaître aux Réunionnais les motivations véritables de ses protagonistes, incapables de dissimuler bien longtemps leurs motivations idéologiques sous de vertueux énoncés tels que la « défense du contribuable ». Ainsi a-t-on pu entendre une activiste « apolitique » de l’Association « apolitique » “Réagir”, spécialisée dans l’obstruction « apolitique » aux projets régionaux, déclarer que la colonisation n’avait pas eu lieu à La Réunion. Pareille affirmation révisionniste, qui va à l’encontre des évidences historiques les plus élémentaires et foule aux pieds la dignité des victimes d’un système aboli il y a peu, en dit long sur la connaissance de l’histoire et sur les conceptions du monde qui animent cette catégorie d’opposants à la MCUR… et en dit plus encore « l’apolitisme » qui les anime.

Derrière la polémique, le consensus

Issus d’un groupe restreint de démagogues, des propos de ce type ont été des mois durant relayés par les médias au détriment des débats de fond. Pourtant, ces vociférations ne reflètent pas l’état des consciences à La Réunion, où, depuis plus de vingt ans, un consensus se construit au-delà des clivages politiques autour de la nécessité de restituer aux Réunionnais leur histoire et leur mémoire.
L’actualité a récemment fait apparaître le soutien dont bénéficie la MCUR dans la population réunionnaise, mais aussi auprès des institutions républicaines. Ainsi, au mois de mai dernier, notre confrère “Le Quotidien” dévoilait les résultats d’une enquête de l’institut LH2-DOM, faisant clairement apparaître l’opinion favorable au projet d’une majorité des interrogés. Lors d’un déplacement dans notre île, M. Yves Jégo, alors Ministre délégué à l’Outre-mer, rappelait pour sa part l’évidence que représentait la réalisation du projet pour l’État, partie prenante du projet.
Enfin, le projet a très récemment fait l’objet d’un soutien revendiqué de la part des artistes et intellectuels les plus éminents de notre pays, rassemblés dans le comité “Mèt Ansanm Pou la MCUR”.
Celui-ci comprend des acteurs culturels de premier plan aux itinéraires très divers, tels que Meddy Gerville, Firmin Viry, Daniel Honoré, Axel Gauvin et Jean-François Sam-Long. Contacté par “Témoignages”, ce dernier fait part de la volonté résolue du collectif « de fournir des réponses à ceux qui se posent des questions », afin que « les Réunionnais s’approprient le projet », dans un contexte ou « la crise sociale », qui « accroît les risques de déstabilisation » de la société réunionnaise, « nécessite, plus que jamais, une réponse culturelle ».

L’intellectuel engagé… selon RFO

Fondées sur la croyance en la nécessité de « donner un fondement culturel à la nécessaire refondation des rapports économiques » en temps de crise, les déclarations de Jean-François Sam-Long et les prises de position du collectif s’inscrivent dans la tradition de l’intervention des intellectuels dans le champ social. Cette dimension échappe manifestement à RFO, pour qui les membres de “Mèt Ansanm pou la MCUR” sont à ranger indistinctement dans le même « sac » des « alliés de circonstance » de la Région…
Au-delà des réflexions que pourraient inspirer de tels propos au regard de l’obligation de neutralité incombant au service public d’information, financé lui aussi par les contribuables, l’attitude de RFO révèle un mépris choquant envers les intellectuels et les artistes réunionnais.
L’humeur idéologique d’anti-intellectualisme primaire que tentent d’instaurer certains opposants à la MCUR aurait-t-elle, à défaut de toucher la population, gagné une partie de la télévision publique ? Ou la campagne des Régionales a-t-elle déjà commencé ?

Geoffroy Géraud

Maison des civilisations et de l’unité réunionnaiseSpécial 50 ans du PCR

Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus