Notre Histoire : Tourisme, artisanat et mémoire avec l’OTI-Nord

Sainte-Suzanne sur les traces d’Edmond Albius

24 août 2004

Au cours du dernier week-end, l’Office de tourisme intercommunal (O.T.I.) du Nord et la ville de Sainte-Suzanne rendaient hommage à un de nos plus glorieux ancêtres, Edmond Albius, qui fit en 1841 une découverte importante pour l’humanité, à savoir la fécondation artificielle de la vanille. À cette occasion, la vanille a bien évidemment été mise à l’honneur à travers différentes animations, avec notamment des expos-ventes culinaires, artistiques, culturelles et même sportives.

"Dès 1980, nous avons décidé de rendre hommage à ce fils de Sainte-Suzanne", a déclaré samedi matin Maurice Gironcel, maire et conseiller général de Sainte-Suzanne, en présence de nombreuses personnalités, dont notamment Nassimah Dindar, présidente du Conseil général, et Jean-Marie Dupuis, président de l’Office du Tourisme. C’était lors de l’inauguration de l’animation organisée durant toute la journée et dimanche près du Bocage et intitulée : “Sur les traces d’Edmond Albius”.
Une stèle avait déjà été érigée par la municipalité lors du majorat de Lucet Langenier en l’honneur de celui qui ne bénéficiera d’aucune reconnaissance pour sa grande découverte. Esclave sur la propriété de Ferréol Bellier-Beaumont, Edmond Albius, alors seulement âgé de 12 ans, découvrait grâce à son intelligence et son goût pour la recherche, une technique de fécondation de la vanille. (voir encadré)
Il mourra pourtant en 1880 dans la pauvreté, sans la moindre gratitude. Aujourd’hui encore, sa découverte permet au monde entier d’apprécier l’arôme de cette orchidée devenue au fil des temps, et grâce à lui, un ingrédient culinaire incontournable.
Une autre stèle devrait être érigée en hommage à Edmond Albius, au Village-Desprez, le 20 décembre 2004. Au passage et pour information, un hommage sera également rendu à un autre valeureux fils du Beau Pays : Gérose Barivoitse, dit Rwa Kaf, qui nous a quitté récemment. Figure emblématique du maloya, conteur d’exception, il était avant tout un Réunionnais très attachant, un homme respecté à Sainte-Suzanne.
La salle des fêtes de Sainte-Suzanne s’appellera dès la fin de l’année “Salle des fêtes Gérose Barivoitse, dit Rwa Kaf”. Façon de cultiver notre mémoire. Et, confiait la présidente du Conseil général, "pour être un bon jardinier, il faut arroser les racines".
Malgré la pluie menaçante, les visiteurs n’ont pas manqué ce rendez-vous. Il faut dire que des animations étaient proposées aux petits, comme aux grands. Balades en ti train, brocante, ateliers culturels, moringue, activités nautiques, structures gonflables pour les enfants, personne ne pouvait s’ennuyer au Bocage, ce week-end. Mais, "honneur à la vanille avant tout". Celle-ci, sous la houlette de l’Office de tourisme intercommunal, s’est offerte dans tous ses états. Et pour cause, un concours culinaire était organisé dimanche, pour le plus grand plaisir d’un jury constitué “de connaisseurs”, qui notait les différentes créations culinaires autour cette orchidée qui ne cessera jamais de nous étonner. Occasion aussi pour beaucoup, de découvrir des sensations gustatives nouvelles.
Originalité de cette manifestation : des acteurs de l’improvisation “Les Cafards modestes” offraient des saynètes reconstituant la découverte d’Edmond Albius, ou encore des scènes historiques sur la vanille. Il est vrai que Sainte-Suzanne est une ville riche en histoire. Une histoire portée par un homme, dont le nom est maintenant connu à travers le monde entier. Edmond, comment ?

Bbj


Respecter l’Histoire et ses acteurs

Il y a deux visions de la vie et de l’œuvre d’Edmond Albius. Une vision “folklorisante” dans le sens négatif du terme, et une vision respectueuse des personnes et des faits historiques.
Dimanche matin, sur Radio-Réunion, on nous a présenté la vie d’Edmond Albius sous la forme d’un conte, selon lequel le jeune esclave refusait la contrainte du système, s’échappait de la propriété, “ravageait” et “faisait le singe dans les arbres”. Puni par son maître, il a abîmé une plantation de vanilliers pour se venger et c’est ainsi que fut découverte de façon accidentelle la fécondation artificielle de la vanille.
En réalité, comme le rapportent les historiens, Edmond Albius avait attiré déjà tout jeune l’attention de son propriétaire par son intelligence, son sens de l’observation et son goût pour la recherche, qui lui ont permis de découvrir ou de participer à plusieurs innovations. C’est cette passion, cette curiosité qui l’ont conduit à découvrir le procédé de fécondation artificielle de la vanille.
Il est donc temps de laisser de côté la vision “folklorisante” de notre passé et de donner toute sa place à une vision historique. Il faut en finir avec l’idée qu’un être humain, parce qu’il avait été réduit en esclavage, ne pouvait être intelligent.
En privilégiant la version folklorisante, nous perpétuons la tradition esclavagiste qui niant l’humanité de l’esclave pour l’exploiter tel un animal. Un animal à l’image d’un singe tout juste capable d’imiter.
En restituant la vérité des faits, c’est l’humanité de tous les Réunionnais que nous respectons. Ainsi nous rendrons justice aux personnes qui ont fait La Réunion et respecterons notre Histoire.

L. B.


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