“Démons et merveilles, le surnaturel dans l’océan Indien”

Un colloque merveilleux

29 octobre 2004

Pendant quatre jours, au fil de vingt-cinq communications toutes plus passionnantes les unes que les autres, enseignants et chercheurs ont confronté leurs éléments d’analyses sur les notions de “sacré” et de “surnaturel”.

Les démons et merveilles ne connaissent pas les frontières. Du 26 au 29 octobre se tient à la faculté des Lettres (amphi 4 L) un colloque international dont le thème invite aux explorations les plus merveilleuses, à travers des études portant sur les littératures indienne, malgache, chinoise, réunionnaise et mauricienne.
Organisé par Jean-Claude Carpanin Marimoutou, Valérie Magdelaine et Bernard Terramorsi du CRLHOI - un département de recherche pluridisciplinaire sur la littérature et l’histoire de l’océan Indien - et une unité littéraire et textuelle du CNRS (UMR 8143), ce colloque vise à réunir des chercheurs de spécialités complémentaires (anthropologues, folkloristes, littéraires...), tous concernés à des titres divers par l’étude des contes, du surnaturel, du fantastique ou du merveilleux, mais généralement cantonnés chacun à son domaine de recherche.
“Démons et merveilles, le surnaturel dans l’océan Indien” se propose de réunir dans un même ouvrage (à paraître) les réflexions croisées de ces enseignants-chercheurs et des meilleurs de leurs étudiants.

Créer de nouvelles notions

Pendant quatre jours, au fil de vingt-cinq communications toutes plus passionnantes les unes que les autres, ils ont confronté leurs éléments d’analyses et leurs interprétations sur les notions de “surnaturel”, de “sacré”, à partir d’exemples puisés aux différentes littératures de notre région, en les distinguant des notions de “Merveilleux” ou de “Fantastique” dans la littérature occidentale, tels que les ont éclairés les travaux d’anthropologues ou de philosophes sur la mort, la peur, la folie en Occident...
"L’étude des objets de peur ou d’émerveillement dans les récits indianocéaniques, sera articulée à l’évaluation et l’identification de leurs sources culturelles et esthétiques diverses (africaine, indienne, malgache, occidentale)", expliquent les organisateurs du colloque dans une présentation du travail en cours, en citant par exemple la façon dont "l’altérité - fascinante ou terrifiante, merveilleuse ou démoniaque - s’inscrit dans le folklore et dans les littératures de l’océan Indien".
Leur recherche comporte des interrogations sur les notions existantes dans les littératures d’Orient et d’Occident et sur la nécessité de créer de nouvelles notions pour rendre compte de ce qui se passe dans les littératures de l’océan Indien.

P. David


Le surnaturel libère les mœurs des femmes

Mardi, le thème de la demi-journée d’étude (après la séance inaugurale du matin) portait sur “Femme et surnature”, abordé en quatre communications.
Dans “l’adultère et le surnaturel dans le théâtre indien contemporain”, Vijayalakshmi Rao, de l’université Jawaharlal Nehru de New Delhi, a évoqué la façon dont Girish Kannad, auteur de théâtre, a intégré des thèmes d’inspiration folklorique dans deux œuvres du théâtre urbain actuel, Hayavadana (l’homme à la tête de cheval) et Nagamandala (Histoire de serpent), dont les thèmes et les conventions semblent parler très directement au public indien d’aujourd’hui : l’exaltation de la sexualité dans toutes ses dimensions, les dualismes corps/esprit, aspect diurne/aspect nocturne, visible/invisible, société/érotisme, etc.
Dans Nagamandala, le personnage de la femme qui a un mari diurne et un amant nocturne - le serpent envoûté et métamorphosé (à l’image du mari) - évoque une femme-déesse proposée comme modèle d’identification à des “femmes réelles” enfermées dans une morale et un carcan social nettement moins merveilleux.

Femme-renarde, lumineuse

Puis une étudiante réunionnaise, Geneviève Chan-Pit-Chu, a présenté le personnage de la femme-renarde dans les contes chinois de Pu Songling (Contes fantastiques du Pavillon des loisirs). Dans un genre mêlant réalisme et surnaturel, c’est une autre figure de l’érotisme (sexualité = savoir), affranchi des règles sociales et de leur aliénation : offrant un versant essentiellement positif, voire salvateur (loin des images de “femme fatale” ou “femme corruptrice”), la femme-renarde comme figure emblématique de la littérature chinoise est une figure lumineuse, affranchie, mise sur la route des hommes pour leur montrer la voie de leur propre liberté.
L’étudiante a fini son exposé sur le regret que l’intégration des immigrants chinois à la société réunionnaise, et la déculturation qui en a résulté, n’ait pas favorisé l’émergence d’un “surnaturel chinois” dans notre littérature.

P. D


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