À Berlin

Hommage à Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht : plusieurs dizaines de milliers de participants

15 janvier 2008, par Manuel Marchal

Le 15 janvier 1919, Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht tombaient sous les coups des corps-francs chargés de la répression de l’insurrection spartakiste de Berlin. Dimanche dans la capitale allemande, plusieurs dizaines de milliers de personnes sont venues rendre hommage à deux fondateurs du mouvement communiste allemand.

Le combat de Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht pour la justice sociale et la paix est aujourd’hui plus que jamais d’actualité, a déclaré dimanche au Mémorial de Friedrichsfelde, Gregor Gysi, président du groupe des députés du Linkspartei, rendant hommage à deux militants qui ont donné leur vie pour leurs convictions.
70.000 personnes selon les organisateurs ont participé à un hommage rendu dimanche à Rosa Luxemburg et à Karl Liebknecht, deux fondateurs du Parti communiste allemand, assassinés lors de la répression de l’insurrection de Berlin.
Outre Gregor Gysi, Lothar Bilsky et Oskar Lafontaine, dirigeants du Linkspartei, ont participé le cortège qui, parti de la Porte de Francfort, s’est dirigé vers le Mémorial où se dressent les tombes des deux dirigeants communistes. Elles ont été recouvertes de couronnes de fleurs, de tulipes et de roses par des milliers de participants.
Les mots d’ordre des manifestants mettaient en garde contre la politique de casse sociale qui soumet par exemple les chômeurs à de nombreux contrôles violant les droits constitutionnels (voir encadré), et appelaient à lutter contre « le système économique capitaliste ». Une fanfare jouait l’Internationale et d’autres chants traditionnels de la classe ouvrière allemande.
Comme tous les ans depuis la réunification de l’Allemagne, l’hommage à Rosa Luxemburg et à Karl Liebkecht a rassemblé un nombreux public.

Manuel Marchal


Rosa Luxemburg : une vie de luttes

Née en Pologne, Rosa Luxemburg poursuit ses études en Suisse où elle rencontre Leo Jogische qui sera son mentor. Elle participe à la création du Part social-démocrate du royaume de Pologne et de Lituanie.
A 26 ans, elle conclut ses études par une thèse sur le développement industriel de la Pologne, son pays natal alors partagé entre trois empires.
Deux ans plus tard, elle s’installe en Allemagne, qui est alors le centre de gravité du mouvement ouvrier européen. Première femme rédactrice en chef du "Journal du peuple de Leipzig", elle participe à la rédaction de "Vorwärts", l’organe du SPD (Parti social-démocrate allemand), et enseigne le marxisme et l’économie à l’école du Parti. Parmi ses élèves se trouve par exemple le premier président de la République allemande et futur dirigeant du SPD, Friedrich Ebert.
Bien avant le commencement de la Première guerre mondiale, elle milite contre le militarisme. Elle prône la solidarité internationale des travailleurs et s’engage dans les grandes luttes de l’époque. En 1905, elle est emprisonnée deux mois pour son action dans la Révolution russe. Deux ans plus tard, elle réussit à obtenir le vote d’une résolution appelant les partis progressistes à la solidarité contre la guerre, lors d’un congrès de l’Internationale.
En 1912, elle représente le SPD lors d’une tournée européenne au cours de laquelle elle rencontre Jean Jaurès. Ils conviennent d’appeler les partis progressistes européens à lancer une grève générale pour répondre à l’éventuel déclenchement d’une guerre.
Mais quand débute la Première guerre mondiale, le SPD, comme d’autres partis sociaux-démocrates européens, vote les crédits de guerre. Quelques députés refusent malgré tout de cautionner la décision de leur parti et votent contre. C’est le cas de Karl Liebknecht.
Le 5 août, Rosa Luxemburg fonde avec Clara Zetkin et Franz Mehring le Groupe international, embryon de la future Ligue spartakiste à partir de laquelle se construira le Parti communiste allemand.
A travers les lettres de Spartacus rédigées en collaboration avec Karl Liebknecht, elle demande au SPD d’arrêter de soutenir la guerre et de participer au déclenchement d’une grève générale pour la paix avec comme objectif le déclenchement de la Révolution internationale du prolétariat.
A partir de 1915, Rosa Luxemburg est emprisonnée. Libérée au moment de la Révolution allemande de novembre 1918, Rosa Luxemburg retourne à Berlin.
Avec Karl Liebknecht, elle crée le journal "Die Rote Fahne". Le 9 novembre 1918, la République est proclamée. Un parlement révolutionnaire se met en place à Berlin. Les dirigeants de la sociale-démocratie s’allient alors avec les militaires pour empêcher Berlin de basculer dans le camp de la Révolution. À la fin de décembre, la capitale est investie par les corps-francs. C’est pendant cette lutte qu’a lieu la création du Parti communiste allemand, le 1er janvier 1919, issu de l’union de la Ligue spartakiste et d’autres partis.
Quatre jours plus tard, se déclenche l’insurrection spartakiste. Les dirigeants de la jeune République allemande appellent l’armée au secours. Ces derniers écrasent les révoltés, capturent Rosa Luxemburg, Leo Jogisches et Karl Liebknecht, avant de les exécuter sommairement. Le corps de Rosa Luxemburg est jeté dans un canal où il flottera plusieurs semaines.
Quatorze ans plus tard, Adolf Hitler décréta l’amnistie totale pour les assassins et ordonna de leur verser une pension.


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