Rassemblements à Saint-Denis et à Saint-Pierre

Hommages à Samuel Paty : forte mobilisation à La Réunion

21 octobre 2020

Deux rassemblements en hommage à Samuel Paty « contre la barbarie et l’obscurantisme pour la liberté d’expression, la liberté pédagogique, pour l’enseignement laïc et républicain » se sont déroulés hier à Saint-Denis, parvis des droits de l’Homme et de la Laïcité et à Saint-Pierre, Place de la Laïcité, Bd Hubert de Lisle. Un public nombreux a répondu à l’appel de la Ligue des Droits de l’Homme à l’origine de cette initiative. Le PCR était représenté par des délégations lors de ces hommages. Voici le message dit par la Ligue des Droits de l’Homme lors de ces deux rassemblements.

« Réunionnaises, Réunionnais,

A nom de nous tous, ici rassemblés, quelle que soit notre origine, notre culture, notre religion ou notre athéisme, quelles que soient nos opinions politiques ou nos convictions philosophiques, quelle que soit notre fonction, notre métier ou notre responsabilité particulière, au nom de tous, la Ligue des Droits de l’Homme à la Réunion salue la mémoire de cet enseignant décapité par la fureur sanglante de l’extrémisme islamiste, M. Samuel Paty.

Ce professeur d’histoire a fait son devoir et remplit sa mission éducative, en tentant d’éveiller, dans la conscience de nos jeunes concitoyens, les vertus de la liberté d’expression, de la Laïcité et les valeurs communes de la République.

Au nom de tous, nous pleurons sa mort et adressons nos condoléances aux siens.

Au nom de tous, nous voulons, affirmer notre détermination à ne pas céder à la terreur, à continuer à combattre l’obscurantisme, la haine de l’autre et les idéologies mortifères d’où qu’elles viennent.

Nous voulons de même affirmer notre volonté de défendre la Liberté d’expression et la liberté pédagogique des enseignants laïcs et républicains, artisans de notre vivre ensemble et fierté de notre république, à qui nous exprimons notre totale solidarité.

Quelle que soit la conception que l’on ait de la divinité, aucun Dieu ne saurait être affecté par des dessins, caricatures ou critiques visant telle ou telle religion.

Quelle que soit la conception que l’on a de la vie, que l’on soit athée, agnostique ou irréligieux, rien ne nous permet d’interdire à autrui de croire, de pratiquer son culte et de propager ses convictions religieuses.

Que l’on soit chrétien, musulman, hindouiste, tenant de telle ou telle autre religion, rien ne nous permet d’interdire à autrui d’exprimer et de propager son athéisme ou ses convictions philosophiques.

L’Histoire nous l’enseigne assez : toutes les cultures, religions et civilisations ont tenté de traduire les aspirations humaines vers l’amour, la liberté, l’égalité et la fraternité Mais toutes les cultures et civilisations ont aussi, tour à tour, méconnu ses idéaux, pratiquant l’esclavage, la domination coloniale, ou les guerres de religions.

Hier, au 19e siècle, à Baudelaire qui, venu chez nous à la Réunion, avait exprimé son « désir de vivre ensemble… au pays qui te ressemble », on interdisait encore, par exemple, de publier ce passage : « Saint Pierre a renié Jésus 3 fois… Il a bien fait ! ».

A l’évidence, une telle expression peut choquer. Mais c’était la liberté de Baudelaire et nous avons fait le progrès de cesser d’interdire ses poèmes. Le blasphème est par définition une notion propre aux adeptes d’un culte. Il n’y a pas de blasphème pour ceux qui n’y appartiennent pas. La liberté d’expression c’est aussi la liberté de déplaire ou de choquer.

Aujourd’hui, dans notre pays, « la loi protège la foi aussi longtemps que la foi n’impose pas sa loi ». Croyants et incroyants sont logés à la même enseigne. Chacun a le droit de s’exprimer et de propager ses convictions et de critiquer celles des autres.

Nous attendons des uns et des autres le même engagement explicite en faveur de la liberté d’expression et de la Laïcité.

Car la Laïcité, c’est la liberté pour tous et la neutralité de l’état républicain et de ses agents.

Oui, au nom de tous, aujourd’hui nous voulons réaffirmer notre détermination à défendre notre bien commun, la Laïcité, ciment de notre vivre ensemble.

Oui, la Laïcité est un progrès commun, dont l’ADN est la tolérance mutuelle. Nous pouvons promouvoir nos idées, nos convictions, combattre ce qui constitue, à nos yeux, une erreur. Mais nous voulons partager la VIE de nos frères et sœurs en humanité, même dans l’erreur, plutôt que de les tuer !

Nous voulons que la règle de Laïcité et les valeurs de tolérance, de liberté, d’égalité et de fraternité qui lui sont associées, soient enseignées à nos enfants, quelle que soit leur appartenance confessionnelle ou philosophique.

Nous voulons que les vertus et les règles de la liberté d’expression, sous toutes ses formes, soient enseignées à nos enfants et que les enseignants disposent de la liberté pédagogique pour assurer la transmission de notre héritage commun de principes et de valeurs partagés.

Nous faisons nôtre la pensée du grand philosophe Avicenne : « L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine et la haine conduit à la violence. Voilà l’équation ».

C’est bien en transmettant les savoirs, en développant dès le plus jeune âge l’esprit critique de nos enfants, en les amenant à comprendre que la réalité est bien plus complexe que les préjugés simplistes, que l’on combattra le mieux l’intolérance qui nait toujours de l’ignorance.

Alors ensemble, redisons-le une nouvelle fois :

Vive la Laïcité, Vive la liberté d’expression, Vive l’enseignement laïc et républicain. »

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