Guy Aquiliméba rend hommage au docteur Raymond Vergès

« J’avais 10 ans... »

20 juillet 2007

J’ai découvert ce grand homme que fut le docteur Raymond Vergès, le jour de ses obsèques. C’était le 3 juillet 1957, le lendemain de son décès. Sur la place de la mairie de Saint-André, où il y avait une foule immense, silencieuse, plongée dans le deuil et le recueillement. J’en faisais partie en tant que délégué d’élèves des écoles de Saint-André. J’avais 10 ans.

La carte d’identité de Marie-Perrine Aquiliméba, sœur de la grand-mère de Guy, signée par le docteur Vergès alors qu’il était Maire de Saint-André. La détresse de cette citoyenne a été prise en compte par le maire : à la place du paiement du timbre fiscal, il y a cette expression : « indigente ». Raymond Vergès était attentif aux problèmes quotidiens - souvent pressants - auxquels les masses populaires de l’époque étaient confrontées.

Il se passait, ce jour là, quelque chose de grave pour tous ces gens rassemblés. Par la suite, j’ai compris : ces hommes et femmes étaient venus rendre un dernier hommage au docteur Raymond Vergès, leur maire et conseiller général, décédé la veille à Saint-André à l’âge de 75 ans. Je garde encore en mémoire l’éloge funèbre prononcé par Jean Hinglo, son compagnon, maire de Sainte-Marie.
Celui-ci, la gorge nouée, la voix cassée, sanglotant, sut trouver la force et les mots justes pour retracer la vie et l’œuvre du cher disparu. Dans l’assemblée, beaucoup de personnes avaient du mal à retenir leurs larmes...

Respect et reconnaissance

Plus tard, j’ai appris à mieux connaître cet homme cultivé et humble, dévoué à la cause des démunis et des plus faibles de la société de l’époque, à travers mes lectures (“Témoignages”, articles d’Eugène Rousse) et aussi au fil de tout ce que racontaient mes parents et grands-parents.
L’expression « Papa Vergès », qui revenait souvent dans leurs conversations, n’avait rien de paternaliste. C’était juste pour marquer leur respect et reconnaissance pour celui qui avait su les faire rêver et les mobiliser pour transformer leurs rêves en réalités dans un contexte social marqué par les disettes de la guerre, les maladies et la misère.
Pour ne prendre qu’un exemple, celui lié au versement des allocations familiales, ma mère me rappelait souvent cette anecdote : les gens avaient du mal à croire ce qu’anticipait le docteur Vergès. « Kosa ! nou va gaign’ larzan pou nout’ zanfan ?!! ». Ce fut une réalité, que la bataille pour l’égalité devait parfaire.
Les premières mesures sociales (l’argent famille nombreuse, l’aide médicale gratuite, la retraite des vieux) furent hautement appréciées et resteront pendant de longues années les sujets préférés des veillées familiales en rappelant à chaque fois qui en avait été le mobilisateur, l’auteur... « Ali la mèt’ départman La Rénion ! »

Beaucoup de souvenirs

Maire de Saint-André de 1946 à 1957, Raymond Vergès a laissé dans la population de Saint-André beaucoup de souvenirs et aussi des traces et documents de sa gestion en faveur des plus pauvres. Pour ma part, à l’occasion du 50ème anniversaire du décès de ce militant intellectuel, associatif, syndical et politique, en hommage à ce grand combattant, je rends publique la carte d’identité de la sœur de ma grand-mère, signée par le docteur Vergès alors qu’il était maire de Saint-André.
Un simple coup d’œil sur cette carte d’identité nous révèle ceci : le cas de détresse de cette citoyenne a été prise en compte ; en effet, à la place du paiement du timbre fiscal, il y a cette expression : « indigente ».
Raymond Vergès pouvait avoir à la fois un regard sur le long terme et mener une politique de proximité, répondre ainsi aux problèmes quotidiens - souvent pressants - auxquels les masses populaires de l’époque étaient confrontées.
Autre facette de cet illustre personnage : il se faisait un plaisir de répondre aux aspirations des jeunes de sa commune. Les fameux bals populaires du 14 Juillet, qui se tenaient dans le vieux bazar d’aujourd’hui, sont à jamais gravés dans les mémoires des jeunes gens de l’époque. Mon frère André n’y manquait jamais. Quelle ambiance !
Raymond Vergès était maire mais aussi docteur. Et en tant que tel, la nutrition des enfants de sa commune était aussi une de ses préoccupations. C’est dans cette optique qu’il faisait distribuer un petit goûter (pain et chocolat) en fin de journée aux élèves des écoles de Saint-André. Moment attendu avec impatience et apprécié par tous en cette période de misère ! Je n’ai jamais pu, 50 ans après, retrouver de pain ou de chocolat aussi délicieux. Paroles de fin gourmet !

Une politique municipale démocratique

Ces quelques faits évoqués ne sont que le faible reflet d’une politique municipale démocratique et populaire plus élaborée et vivante. Celle-ci a sans aucun doute marqué de son empreinte le peuple de Saint-André, qui a partagé, vécu l’expérience d’une gestion au service des plus démunis.
C’est cet héritage politique, fait de luttes pour la justice et de résistance à l’oppression, que le peuple de Saint-André continue à faire vivre et fructifier, dans la continuité, en phase avec ses dirigeants, ne laissant à l’adversaire et aux forces rétrogrades qu’une seule alternative : celle de se maintenir au pouvoir par les moyens malhonnêtes et frauduleux ; un pouvoir qui peu à peu leur échappe (les résultats des dernières consultations le montrent bien).
50 ans après le décès de Raymond Vergès, les démocrates et forces vives de Saint-André, fidèles à sa mémoire, croient plus que jamais à la reconquête de leur Mairie et sont en droit d’être exigeants avec les dirigeants qu’ils se donneront pour les conduire à la victoire. C’est aussi une donnée incontournable de la vie politique à Saint-André.

Guy Aquiliméba,
Saint-André

Raymond Vergès

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