Paul Vergès : « Laurent n’avait rien du notable »

12 octobre 2007

Dans un des entretiens qu’il a eus avec Christian Béguinet, de l’association Mémoires vives, Paul Vergès évoque son engagement et ce qu’il pense avoir transmis à ses quatre enfants. Nous remercions Christian Béguinet pour avoir transmis à “Témoignages” l’extrait suivant, dans lequel le président de la Région évoque la mémoire de Laurent, aujourd’hui disparu.

1965, lors de la clandestinité de Paul Vergès : une épreuve précoce qui renforça très tôt sa lucidité politique.
Photo extraite de “Laurent, Jeunesse Rebelle”, 1989.

« Compte tenu de tout ce qu’il avait souffert pendant ma clandestinité, il [Laurent] avait des choix et une détermination beaucoup plus forte dès le début. (...) Il a donc milité un peu à La Réunion, il a milité à Paris, dans l’émigration, il a fait un temps comme photographe à l’Humanité. Il est parti en Amérique centrale. Il a vu les dégâts de la guerre civile au Guatemala, au Salvador... Ça l’avait beaucoup impressionné de voir des cadavres dans les rues, sur les trottoirs (...). Il était un peu inconscient parce que, (...) comme il y a beaucoup de jeunes, d’étudiants qui traversaient [le pays], il n’a pas été l’objet d’une surveillance ou autre. Il a vu son beau-frère au Panamá (...), épouvanté qu’il ait pu transporter des tracts contre la dictature et il a traversé le Guatemala pour les remettre à des gens qu’il connaissait (...). Il est revenu en France.
Il y a une chose qui l’indignait, c’était la guerre entre l’Éthiopie et la Somalie qui, tous les deux, se prétendaient, se proclamaient socialistes. Mais manifestement... l’Éthiopie avait l’appui de l’Union soviétique, et la Somalie s’appuyait sur des solidarités arabes notamment. Mais les deux se battaient pour des objectifs de société socialiste... comme ils disaient, mais enfin...
Laurent a voulu aller voir, et il est allé au Yémen, il a traversé la mer Rouge et il est allé dans les maquis somaliens. Et il en a rapporté des impressions terribles sur le courage des gens, leur solidarité, leur courage face à l’agression éthiopienne etc... Il avait ramené beaucoup de photos.
Donc il était sur ce plan, très très combatif et, en même temps, il lisait beaucoup, il s’enrichissait.
Comme il était sur notre liste et comme Élie Hoarau et moi-même avons démissionné, automatiquement, il est devenu député (...) Mais, ma satisfaction, c’était que, il était jeune comme député, et ça ne lui avait vraiment pas tourné la tête du tout. Pour lui, c’était une responsabilité plus grande de militant, un point c’est tout... Il n’avait vraiment rien du notable. »

Laurent VergèsPaul Vergès

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