Hommage à Raymond Vergès, décédé il y a 50 ans - X -

« Un exemple pour les jeunes générations »

12 juillet 2007

Voici le 10ème et dernier volet de la série d’articles d’Eugène Rousse commencée le lundi 2 juillet 2007 à l’occasion du 50ème anniversaire, jour pour jour, du décès du docteur Raymond Vergès (1882 -1957). L’annonce de ce décès a plongé le peuple réunionnais dans une grande tristesse, en raison de l’œuvre immense accomplie par un des pères de la loi du 19 mars 1946 pour son pays.
“Témoignages” remercie Eugène Rousse pour le rappel de tous les combats menés par “le médecin des pauvres”. Ce rappel est un travail important au service de notre mémoire historique réunionnaise afin de construire ensemble un avenir meilleur.

Peu de temps avant sa mort, le docteur Raymond Vergès reçoit à la mairie de Saint-André des femmes de sa commune qui lui remettent une gerbe de fleurs.

La rumeur courait depuis quelques mois que le maire de Saint-André était malade. Effectivement, il se présentait de plus en plus rarement à la mairie.
Mais grâce à son fidèle secrétaire général de mairie, Bruny Payet, qu’il avait recruté le 1er janvier 1953 et qui lui rendait régulièrement visite, il était tenu informé des affaires de la commune. On savait aussi qu’il ne pouvait pratiquement plus lire et qu’il était donc privé d’une de ses distractions favorites.
Mais très rares étaient les personnes qui estimaient que la fin du robuste médecin était proche.

Une vive stupeur
et une profonde angoisse

Aussi, la nouvelle de son décès, survenu en tout début d’après-midi le mardi 2 juillet à son domicile de Saint-André, provoqua-t-elle une vive stupeur et une profonde angoisse. Tant à Saint-André que dans toute l’île.
La population laborieuse de Saint-André se sentait d’autant plus accablée que, 24 heures plus tôt, elle avait conduit à sa dernière demeure Issop Affeejee, le plus dévoué des adjoints du maire de Saint-André.

L’hommage des écoliers
à leur maire

L’opinion fut rapidement informée que le Docteur Vergès s’est éteint en présence de Joséphine Savigny, une sage-femme réunionnaise qui était devenue son épouse en avril 1946. En présence aussi de son fils Paul, de sa belle-fille Laurence et du médecin saint-andréen le docteur Beauté.
Une chapelle ardente fut aménagée en toute hâte à la mairie, où des milliers de personnes - y compris les écoliers de Saint-André, conduits par leurs enseignants - vinrent se recueillir devant la dépouille du "médecin des pauvres" et premier magistrat de la ville.

L’hommage de son
compagnon Jean Hinglo

Le 3 juillet à midi, le maire de Sainte-Marie, Jean Hinglo, vieux compagnon de lutte du défunt, rendit un vibrant hommage devant la mairie de Saint-André à celui qui s’était tant battu pour que les Réunionnais sortent de la nuit coloniale.
Après quoi, l’imposant cortège funeste prit la direction de Saint-Denis, où le cercueil fut placé dans une grande salle au domicile du docteur Vergès, dont le fils Paul accueillit avec beaucoup d’émotion les innombrables personnalités, amis et camarades venus rendre hommage à l’illustre disparu au cours de l’après-midi.

L’hommage du professeur
Henri Lapierre

À 17 heures, l’immense foule qui s’était rassemblée rue de l’Est et rue Pasteur prit la direction du cimetière de l’Est. Des centaines de porteurs de couronnes et de gerbes précédaient le cercueil, porté par des hommes qui se relayaient tous les 10 ou 20 mètres.
À l’arrivée au cimetière, le véritable fleuve humain s’écoula dans un silence pesant, en empruntant les nombreuses allées conduisant au caveau familial, où un podium avait été dressé.
Désigné par la Fédération réunionnaise du PCF, Henri Lapierre eut le douloureux privilège de rendre un ultime hommage à l’homme, au militant, au grand Réunionnais qui avait si courageusement combattu pour le respect des droits de ses compatriotes, pour la justice, le progrès et la liberté.

« Rien ne fut épargné »
au docteur Vergès

Dans ce dur combat, rappela le professeur de philosophie, « rien ne fut épargné » au docteur Vergès. « On tenta de l’atteindre dans ses affections les plus chères et, tout récemment encore, dans son honneur ».
Mais il ne baissa jamais les bras, apparaissant ainsi « comme un libérateur des masses de ce petit pays et, comme tel, son nom est déjà entré dans l’histoire locale, à l’égal de celui de Sarda Garriga ».
Visiblement très ému, Henri Lapierre conclut son allocution par ces mots : « Docteur Vergès, cher ami, cher camarade, (...) vous demeurerez un exemple pour les jeunes générations et un réconfort pour ceux à qui vous passez le flambeau ».

Un « briseur
de chaînes »

Voilà ce que fut la vie du docteur Raymond Vergès, de ce « briseur de chaînes », de ce géant de la politique réunionnaise, qui m’a fait l’honneur de le représenter dans les bureaux de vote de Saint-Denis à plusieurs reprises au cours des années 1950.
Voilà ce que je tenais à rappeler à l’occasion du 50ème anniversaire du décès de celui qui a « ouvert aux Réunionnais les chemins de l’avenir ».
Que toutes celles et tous ceux qui m’ont apporté leur concours dans l’accomplissement de ce devoir de mémoire trouvent ici l’expression de mes très sincères remerciements.

Eugène Rousse

Raymond Vergès

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