Germain Narassiguin

« Une vie marquée par le souci de servir son pays »

8 octobre 2013

Voici un article d’Eugène Rousse retraçant la vie de Germain Narassiguin, qui nous a quittés le 30 septembre dernier.

Germain Narassiguin.

Germain Narassiguin est décédé le 30 septembre dernier à son domicile du Port, où une grave maladie l’immobilisait depuis de longues années.

Fils du directeur d’école de Bras-Panon Antoine Narassiguin, une grande figure du syndicalisme enseignant et de la politique réunionnaise, Germain Narassiguin eut le privilège de fréquenter le lycée Leconte de Lisle à Saint-Denis — l’unique lycée de La Réunion jusqu’en 1965 — où je l’ai eu comme condisciple en classe de Première et en Terminale.

Titulaire du Baccalauréat en 1949, il s’inscrit à la Faculté de Pharmacie de Montpellier en France, où il obtient en 1954 le diplôme de pharmacien. Il se marie alors à Élisabeth Virapin, pharmacienne comme lui, et rentre à La Réunion. Dès février 1955, il ouvre une pharmacie au Port et restera pendant près d’un demi-siècle au service d’une population qui appréciait ses précieux conseils ; cela d’autant plus qu’au milieu des années 1950, un seul médecin exerçait à la fois au Port et à La Possession.

À la mort de son père, survenue le 11 août 1960, Germain Narassiguin facilite l’installation de sa mère à Saint-Paul et prend à sa charge ses jeunes frères, scolarisés au Port, où ils sont placés dans des conditions idéales pour réussir. Cette initiative du pharmacien mérite d’être soulignée, car à cette époque, il était déjà père de deux enfants.

La défense de la liberté des Réunionnais

Mais Germain Narassiguin ne s’est pas seulement intéressé à sa famille et à sa profession. Il a participé également à de nombreux combats, relatifs au respect de la laïcité comme à la défense des libertés et de la dignité des Réunionnais. Je me bornerai à rappeler trois faits :

• Au cours du premier trimestre 1960, il est au Port, avec son épouse, parmi les premiers signataires d’une pétition diffusée dans toute la République et visant à obtenir l’abrogation des lois anti-laïques du 31 décembre 1959, dites "lois Debré".

• Le 20 octobre 1957, devant l’institutionnalisation de la fraude électorale à La Réunion, qui s’accompagne d’actes d’extrême violence dans toute l’île, un Comité de Défense des Libertés Républicaines est créé à Saint-Denis ; présidé par Agénor Dutremblay, le Bureau de ce Comité est composé de nombreuses personnalités, dont Germain Narassiguin.

• Le 3 septembre 1961, Germain Narassiguin fait partie du Comité d’action pour l’abrogation de l’ordonnance du 15 octobre 1960. Ce Comité, présidé par le gouverneur retraité Anatolien Vincent-Dolor, regroupe des démocrates de tous bords politiques et accomplit un énorme travail, qui s’achèvera le 10 octobre 1972 par le vote à l’Assemblée nationale d’une loi abrogeant l’ordonnance prise par Michel Debré en 1960.

Des engagements politiques

Après avoir œuvré au sein des Comités dont il vient d’être question, Germain Narassiguin estime que le moment est venu pour lui de s’engager dans un parti politique. Son choix se porte sur le Parti Socialiste Réunionnais (PSR), né le 1er octobre 1972 et dont il est l’un des co-fondateurs.

C’est un choix logique lorsque l’on sait qu’il avait approuvé la résolution votée à Morne-Rouge (Martinique) en août 1971 par des organisations démocratiques des DOM ; une résolution relative à un changement du statut politique de La Réunion et des trois autres DOM. Il avait également approuvé le Programme Commun de Gouvernement du Parti communiste français et du Parti socialiste (27 juin 1972). Un programme qui prévoyait notamment « le droit à l’autodétermination des peuples des DOM et des TOM ». Ce sont les liens étroits tissés avec ces deux partis qui l’ont conduit à mettre sa villa de La Saline les Bains à la disposition de leurs dirigeants, lors de leur séjour à La Réunion.

Au service du développement économique

Il me faut ajouter que Germain Narassiguin s’est efforcé de participer au développement économique du pays en accordant un précieux soutien à la SEMADER, à l’Armement des Mascareignes, à la SOLPAC... Il a été aussi l’un des initiateurs de la construction de la Clinique Jeanne d’Arc au Port, à une époque où cette ville était encore pratiquement un désert médical.

On lui doit également l’ouverture à La Réunion des magasins "Optique de Bourbon", ainsi que la parution régulière du magazine "Télé 7 Jours".

Voilà succinctement évoqué ce qu’a été la vie de Germain Narassiguin. Une vie marquée par le souci de servir son pays et particulièrement la ville du Port, dont la municipalité a tenu à lui exprimer sa gratitude lors de ses obsèques, qui ont eu lieu mercredi dernier à Saint-Denis. Que ses enfants et ses proches trouvent ici l’expression de nos condoléances attristées. Adieu Germain.

Eugène Rousse


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Messages

  • Merci à E. Rousse pour avoir retracé le parcours de G. Narassiguin dont bon nombre de Portois n’avaient pas connaissance.
    Mr Narrassiguin a été notre voisin et notre pharmacien à une époque où les pharmacies étaient rares.
    Je garde le souvenir d’un homme aimable, toujours disponible, à l’écoute et de bons conseils.
    A ses enfants et à ses proches, j’adresse mes très sincères condoléances.Marie-Paule Fanchin


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