6 milliards de tonnes de sable sont arrachées chaque année aux océans

7 septembre 2023

"Quelque six milliards de tonnes de sable sont arrachées chaque année aux océans, une exploitation à la limite de ce qui est soutenable et avec des conséquences dramatiques pour l’environnement et la biodiversité marine", a alerté l’ONU.

Pour la première fois, les Nations unies sont parvenus à faire l’estimation de six milliards de tonnes, et ce grâce à l’intelligence artificielle et au système automatique d’identification des navires permettant de les localiser et d’analyser leurs déplacements et activités à travers le monde.

L’analyse, lancée par la division scientifique du Programme des Nations-Unies pour l’Environnement (PNUE), n’a pas encore rendu ses résultats définitifs, et seulement 50% des navires sont pour l’instant suivis. Ainsi, l’extraction artisanale ou celle à petite échelle le long de côtes peu profondes ne peut encore être détectée.

Mais l’ONU estime que sur les 50 milliards de tonnes de sable et de gravier que l’humanité utilise chaque année, entre quatre et huit milliards proviennent des mers et océans. Cela représente six milliards de tonnes en moyenne chaque année, « soit l’équivalent de plus d’un million de camions par jour ou de deux kilogrammes par jour et par personne », a expliqué le directeur du centre d’analyse des données pour le PNUE, Pascal Peduzzi, en conférence de presse.

Ce dernier a indiqué que « les écoles, les hôpitaux, les routes, les barrages hydroélectriques, les éoliennes, les panneaux solaires, le verre… en fait toute notre société dépend du sable comme matériau de construction ».

Le sable joue aussi un rôle crucial pour l’environnement, mais c’est également un matériau dont de nombreux pays auront besoin pour se protéger contre l’élévation du niveau des mers, a-t-il conclu.

L’ONU espère pouvoir publier cette année de nouveaux chiffres concernant la période 2020-2023. Mais les données montrent que l’extraction de sable ne cesse de croître et « commence à prendre des proportions gigantesques », a indiqué Pascal Peduzzi.

Ce dernier expliqué qu’en comparaison les rivières transportent, elles, dans les mers et océans entre 10 et 16 milliards de tonnes de sédiments chaque année. « Si nous utilisons énormément de sable, à un moment donné cela dépasse les capacités du système à pourvoir ce sable », a-t-il dit.

Les navires extracteurs sont comme des « aspirateurs » qui « broient les fonds marins » et les « stérilisent », faisant disparaitre les micro-organismes océaniques et mettant en danger la biodiversité et les ressources halieutiques, selon l’expert.

La mer du Nord, l’Asie du Sud-Est et la côte est des États-Unis sont les lieux où les activités de dragage marin sont les plus intenses. Arnaud Vander Velpen, expert scientifique, a indiqué que les pays ayant de plus grandes flottes de navires extracteurs sont la Chine, les Pays-Bas, les États-Unis et la Belgique.

La Belgique, qui extrait le sable de la mer du Nord, « sait déjà qu’elle n’a encore que 80 ans de volume à disposition si elle continue au rythme actuel », a relevé Pascal Peduzzi.

Au-delà des chiffres, l’ONU espère avoir des discussions avec les pays et les entreprises du secteur pour que ces dernières soient plus respectueuses de l’environnement en améliorant leurs pratiques d’extraction.

Selon Arnaud Vander Velpen, seul un petit nombre de pays sait quelles sont ses ressources en sable marin. De plus, les pratiques internationales et les cadres réglementaires varient considérablement.

Certains pays, dont l’Indonésie, la Thaïlande, la Malaisie, le Vietnam et le Cambodge, ont au cours des vingt dernières années interdit l’exportation de sable marin, tandis que d’autres ne disposent d’aucune législation ni d’aucun programme de surveillance efficace.

Le PNUE appelle "la communauté internationale à élaborer une règlementation internationale afin notamment d’améliorer les techniques de dragage et il recommande d’interdire l’extraction du sable des plages en raison de son importance pour la résilience des côtes, l’environnement et l’économie".

Il préconise également "une reconnaissance stratégique du sable afin qu’il ne soit plus considéré comme un matériau commun dont l’humanité pourrait disposer à volonté".


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