4e Congrès dravidien

Ary Yée Chong Tchi Kan : « l’avenir est en nous, entre nous »

29 avril 2019, par Ary Yée-Chong-Tchi-Kan

Voici le discours prononcé ce 28 avril au 4e Congrès dravidien par Ary Yée Chong Tchi Kan, qui est intervenu sur le thème du réchauffement climatique et ses conséquences.

« Mesdames et Messieurs,
Chers Congressistes,
Je vous remercie de me donner l’occasion d’intervenir devant votre honorable assemblée. J’ai intitulé mon intervention : “l’avenir est en nous, entre nous”.

Cela fait des dizaines d’années que Daniel et moi, nous nous connaissons et échangeons nos réflexions. Bien évidemment l’avenir de La Réunion et des Réunionnais prend une grande place dans nos conversations. Pourquoi ? Parce que nous vivons sur une île et nous devons imaginer la vie dans cet espace cerné par la mer.

Un espace de 2500 km2 dont 1/3 seulement est utile, soit environ 800 km2. Dans cet espace réduit, comment organiser la vie d’un million d’habitants, assurer la cohésion de la société et son unité ? Impossible de rejeter nos problèmes et nos déchets chez le voisin. Alors, nous disons que les solutions durables sont en nous, entre nous.

Le réchauffement climatique.

Pour le moment, notre préoccupation est la suivante. La Terre se réchauffe et ce phénomène met en danger tout ce qui est vivant. Et, si la vie disparaît, la planète va toujours continuer son chemin, mais sans nous, car l’être humain aura cesser d’exister. La mer va monter et noyer des îles et les territoires maritimes. Les nappes phréatiques seront envahies par l’eau salée. L’agriculture sera menacée par la sècheresse.

Quand on ouvre ce débat, ici, le nom de Paul Vergès, apparaît. Qu’a-t-il fait de si exceptionnel ce compatriote Réunionnais ? Il a fait passer la question du réchauffement climatique et ses effets de l’expertise scientifique à la décision politique.

Le 4 septembre 1996. Il tient une Conférence de presse pour alerter sur le réchauffement climatique et nous mettre en garde contre les conséquences. Deux ans après, en 1998, au Sénat, il fait voter une loi qui fait du réchauffement climatique et de ses effets, une cause nationale. Cette loi fut votée à l’unanimité des Députés et des Sénateurs.

Paul Vergès a montré que lorsque le combat est juste, nous trouvons le chemin de l’union. De cette loi, il a été crée un Observatoire de recherche (ONERC) qu’il a présidé durant 15 ans, jusque sa mort. Il a remis une douzaine de rapports à divers gouvernements. C’est le plus gros travail d’aide à la décision politique qu’il a laissé aux décideurs et à la jeunesse du monde entier. Tous les compartiments de la vie ont été explorés. Qui connaît son œuvre ?

Cet homme politique réunionnais refusait l’appellation d’élu. Il n’a jamais porté l’écharpe d’élu. Partout, en Inde, en Chine, en Afrique, ce Réunionnais était reçu avec respect et dignité. C’était un homme politique responsable ; cet homme exceptionnel qui a toujours honoré les invitations de Daniel, jamais la Télévision lui a donné la parole pour expliquer les enjeux climatiques et le résultat du travail de recherche qu’il menait pour la sauvegarde de la vie sur la planète, en France et en outre-mer, notamment vis-à-vis des Etats Insulaires.

De tout ce gros travail, retenons les stratégies d’atténuation et d’adaptation aux changements climatiques. L’Atténuation vise à stopper la production du gaz carbonique et son rejet dans l’air. L’Adaptation dit que de toutes manières, il faut se préparer aux conséquences catastrophiques.

Prenez le flambeau.

Mesdames et messieurs,

Mon intervention, ici, à votre assemblée, c’est pour vous dire prenez le flambeau de ce combat fondamental. Vous avez réussi à construire une religion, adaptée au contexte réunionnais, ouverte sur le monde, utilisez donc la force dans vos croyances et la confiance en l’homme réunionnais. Il n’y a pas de petits peuples et de grands peuples. Il n’y a que des dirigeants qui étudient ce qui va arriver et qui prennent de bonnes décisions. Si nos solutions sont justes, partageons avec d’autres peuples.

Le Traité sur le Climat a été adopté à la COP21, le 15 décembre 2015, à Paris. Il est entré en vigueur le 4 novembre 2016. Le Traité est désormais opposable aux Etats, aux Collectivités, aux entreprises, aux associations, aux individus.

C’est la première fois qu’un texte universel a été écrit en commun par des délégations qui ne se connaissaient pas et ratifier en moins d’un an. Il y a vraiment le feu dans notre maison commune.

L’objectif de ce Traité est d’agir ensemble pour que, durant ce siècle et sur toute la planète, l’augmentation moyenne de la température ne dépasse pas 2 °C. Chaque partie signataire doit déposer ses “instruments de ratification” c’est dire les mesures qu’il compte prendre pour atteindre cet objectif commun. Nos habitudes doivent changer pour aller vers une civilisation bas carbone.

C’est un acte de responsabilité énorme

Le président actuel des Etats Unis a retiré son pays du Traité sur le Climat. Mais la Californie a organisé un “sommet mondial” à San Francisco, en septembre 2018. A ce sommet, le gouverneur de Californie, Jerry Brown a appelé à la suppression du gaz à effet de serre en quelques décennies. De nombreuses villes présentes se sont engagé sur le mot d’ordre : Zéro carbone, Zéro voiture à essence, Zéro déchet. Devant des milliers de délégués, un acteur américain très connu, Harrison Ford a déclaré : “Arrêtons pour l’amour de Dieu de dénigrer la science. Arrêtons de donner le pouvoir à ceux qui ne croient pas à la science ou qui prétendent ne pas y croire par intérêts…C’est la plus grande crise morale de notre temps.”
Quant au Maire de Los Angeles, il s’est engagé à éliminer le charbon d’ici 2025, avant d’éliminer complètement le carbone de son économie. Le nouveau seuil de tolérance est d’arriver à un bilan carbone neutre.

A La Réunion, il est égoïste et irresponsable de continuer à importer du charbon et du pétrole alors qu’on a le soleil, l’eau, le vent, la mer, la chaleur du volcan, le végétal pour faire de l’énergie et une jeunesse intelligente qui peut faire la part des choses. La nature que nous avons reçue en héritage est généreuse. Elle a été dégradée. C’est à nous de porter les corrections nécessaires. Les générations futures nous remercierons d’avoir pensé à elles.

Mesdames, messieurs,

Pour conclure, je reprends cette remarque : tous les combats sont légitimes mais si nous perdons le combat contre le réchauffement et ses effets, alors les autres sont inutiles. Nous apprenons de notre histoire que du chaos de l’esclavage, de l’engagisme et du colonialisme, nous avons fait émerger un peuple, un peuple dont nous essayons d’en être de dignes représentants. Alors, soyons en tête de cette civilisation nouvelle. L’avenir est en nous et entre nous ».

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