Le PNUE propose une stratégie réaliste de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour limiter la hausse des températures à 2 degrés

Changeons de modèle en 10 ans pour atténuer le changement climatique

30 novembre 2011

Dans un rapport publié quelques jours avant l’ouverture de la Conférence de Durban sur le Climat, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement présente une stratégie réaliste de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le PNUE préconise de miser sur les énergies renouvelables, sur l’efficacité énergétique et sur d’autres pratiques de gestion des terres et de la forêt. Le PNUE estime que ces changements peuvent être accomplis dans les 10 ans, ce qui placera alors le monde sur les rails d’un nouveau modèle capable d’éviter chaque année 6 à 11 milliards de tonnes d’équivalent CO2 dans l’atmosphère.

Il est possible, d’un point de vue économique et technologique, de réduire les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 à un niveau qui permettrait de maintenir, au XXIème siècle, une augmentation de la température mondiale en dessous des 2 degrés Celsius. C’est ce que révèle une nouvelle étude complète rendue publique la semaine dernière par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE).
Le recours accru aux énergies renouvelables, la substitution des combustibles fossiles par des combustibles d’origine renouvelable et le renforcement de l’efficacité énergétique peuvent contribuer largement aux réductions nécessaires.
Parmi les autres mesures, citons les améliorations sectorielles allant de la montée en puissance des transports publics et des véhicules plus économes en carburant à des améliorations dans des domaines tels que l’agriculture et la gestion des déchets.

Réduire la vitesse des bateaux

Le rapport cite l’aviation et la navigation comme des cas spécifiques, mais importants, car actuellement, ces « émissions internationales » ne relèvent pas du Protocole de Kyoto — le traité sur la réduction des émissions.
Au total, elles représentent environ cinq pour cent des émissions de CO2 et pourraient représenter jusqu’à 2,5 gigatonnes (Gt) d’équivalent dioxyde de carbone (Gt-éq-CO2) par an, d’ici 2020.
« Les solutions pour réduire les émissions de ces deux secteurs consistent à améliorer l’efficacité énergétique et à utiliser des combustibles à faible émission de carbone. Pour le secteur de la navigation, une autre solution simple et prometteuse consiste à réduire la vitesse des bateaux », stipule le rapport auquel ont participé 55 scientifiques et spécialistes issus de 28 groupes scientifiques et de 15 pays différents.
Le rapport “Bridging the Emissions Gap” (Réduire l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions), publié quelques jours avant les négociations de la convention sur le climat des Nations Unies en Afrique du Sud et sept mois avant le Sommet de Rio+20 au Brésil, fournit des indicateurs très clairs selon lesquels le monde a déjà les solutions pour prévenir le risque d’un changement climatique.

Et maintenant, l’action

Il décrit clairement aux responsables politiques comment combler l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions d’ici 2020 qui, suite à une modélisation améliorée de l’évaluation de l’année dernière, est aujourd’hui estimé, selon les scénarios les plus optimistes, à 6 Gt-éq-CO2 et non à 5 Gt-éq-CO2.
Le rapport décrit également des scénarios beaucoup plus pessimistes, si les engagements des pays développés, y compris les niveaux de financement s’élevant à USD 100 milliards par an d’ici 2020, et les intentions des pays en développement ne sont pas totalement mis à exécution — l’écart alors, d’ici 2020, pourrait être de 11 Gt-éq-CO2. En cas de maintien du statu quo, il pourrait même atteindre les 12 Gt-éq-Co2.
« Le rapport annuel du PNUE est une contribution essentielle à l’effort mondial de lutte contre le changement climatique », a déclaré le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon. « Il révèle que nous avons beaucoup de choses à faire, à la fois en termes d’ambition et de politique, mais également que l’écart peut encore être réduit si nous agissons dès maintenant. C’est un message d’espoir et une forte incitation à passer à l’action ».

Conclusions

Le rapport conclut que les responsables politiques pourraient réduire ou éliminer l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions d’ici 2020 en prenant les mesures suivantes :

- Consentir à mettre à exécution leurs engagements les plus ambitieux en matière de réduction des émissions avec des règles plus strictes.

- Décider de cibler leurs systèmes énergétiques, en utilisant davantage de sources de combustibles non fossiles et d’énergies renouvelables, et améliorer de façon significative l’efficacité énergétique.

- Mettre en place des politiques sectorielles fermes, à long terme, pour atteindre tout le potentiel des différents secteurs économiques en matière de réduction des émissions de CO2.

Réduire l’écart entre les promesses et les actes

L’étude, intitulée “Bridging the Emissions Gap” (Réduire l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction des émissions), a rassemblé 55 scientifiques et spécialistes issus de 28 groupes scientifiques et de 15 pays pour examiner les derniers résultats de la recherche scientifique sur l’écart entre les engagements pris par les pays pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et ce qu’il faudra faire si nous voulons atteindre l’objectif de 2 degrés d’ici 2020.

« Ce rapport fournit aux gouvernements et responsables politiques des informations capitales sur les options qui s’offrent à eux si le monde veut réussir à relever le défi du changement climatique », a déclaré Achim Steiner, Directeur exécutif du PNUE et Secrétaire général adjoint de l’ONU. « Cette année, les pays pourront entamer les débats à Durban, en Afrique du Sud, en ayant à disposition les principaux scénarios technologiques et économiques qui décrivent l’écart entre l’ambition actuelle et la réalité scientifique ainsi que les mesures urgentes qui peuvent être prises pour combler cet écart en matière d’émissions ».

“Bridging the Emissions Gap” est le second d’une série de rapports du PNUE sur le sujet. Le premier — Rapport sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction d’émissions — est devenu une véritable référence dans les négociations internationales sur le climat qui se sont déroulées l’année dernière à Cancún, au Mexique.

Lors de ce Sommet, les responsables politiques ont demandé au PNUE de préparer un rapport de suivi pour mettre à jour les estimations sur l’écart entre les besoins et les perspectives en matière de réduction d’émissions, mais également pour proposer des suggestions sur la façon de réduire cet écart. Ce suivi est le nouveau rapport “Bridging the Emissions Gap”.

Christiana Figueres, Secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, a souligné la nécessité de renforcer l’action. « Cette étude, une fois encore, nous rappelle que les efforts pour lutter contre le changement climatique restent actuellement insuffisants », a-t-elle déclaré. « Mais elle montre également qu’il est possible pour les gouvernements de réduire l’écart entre ce qu’ils ont promis et les mesures qu’il faut prendre pour rester en dessous d’une hausse moyenne de la température mondiale de 2 degrés Celsius ».

« Nous n’avons pas beaucoup de temps, nous devons donc optimiser les outils à notre disposition. À Durban, les gouvernements doivent décider de l’avenir immédiat du Protocole de Kyoto, définir, à plus long terme, la voie vers un accord mondial à caractère contraignant sur le climat, lancer le réseau institutionnel convenu pour aider les pays en développement à faire face au changement climatique, et définir une voie pour assurer le financement à long terme de tout cela », a-t-elle ajouté.

Vers l’autonomie énergétique sans le fossile

Le rapport “Bridging the Emissions Gap” souligne la nécessité de modifier de façon réaliste le système énergétique, en améliorant l’efficacité énergétique et en accélérant l’introduction des énergies renouvelables.

En particulier, l’étude a passé en revue 13 scénarios de 9 groupes scientifiques différents. Ces scénarios permettent tous de réduire les émissions de gaz à effet de serre pour atteindre l’objectif de 2 degrés d’ici 2020 en utilisant une combinaison des éléments suivants :

- Améliorer l’efficacité énergétique : la baisse de la production d’énergie primaire devrait atteindre les 11% en 2020 par rapport au scénario de maintien du statu quo, et la quantité d’énergie utilisée par unité de PIB devrait baisser de 1,1 à 2,3% chaque année entre 2005 et 2020.

- La proportion d’énergie primaire issue de sources non fossiles devrait atteindre les 28% en 2020 (18,5% en 2005).

- La proportion d’énergie primaire totale issue de la biomasse devrait atteindre les 17% en 2020 (environ 10,5% en 2005).

- La proportion d’énergie primaire totale issue de sources renouvelables autres que la biomasse (soleil, vent, hydroélectricité et autres) devrait atteindre les 9% en 2020.

- La baisse des émissions de gaz autres que le CO2 atteindrait 19% d’ici 2020 par rapport au scénario de maintien du statu quo.

Les auteurs du rapport soulignent que tous les scénarios étudiés présentaient différentes combinaisons de ces options, indiquant qu’il existe de nombreuses trajectoires différentes pour réduire l’écart.

Fait important pour les responsables politiques, le rapport porte également sur le coût de ces options. Globalement, les coûts marginaux moyens vont de USD 25 à USD 54 par tonne d’équivalent dioxyde de carbone évitée, avec une valeur moyenne de USD 34 par tonne.

Tous les secteurs concernés

L’étude a également porté sur la recherche dans différents secteurs économiques pour étudier le potentiel technique de réduction d’émissions d’ici 2020. Il en est ressorti le potentiel suivant :

- Production d’électricité : 2,2 à 3,9 Gt-éq-CO2 par an grâce à des centrales plus efficaces, et en introduisant des sources d’énergies renouvelables, la capture et le stockage du carbone ainsi que la substitution des combustibles.

Industrie : 1,5 à 4,6 Gt-éq-CO2 par an en renforçant l’efficacité énergétique, la substitution des combustibles, la récupération de l’énergie, l’efficacité des matériaux et autres mesures.

- Transport (à l’exception des secteurs de l’aviation et de la navigation) : 1,4 à 2,0 Gt-éq-CO2 par an en renforçant l’efficacité énergétique, en adoptant des véhicules électriques, en passant aux transports publics et en utilisant des combustibles à faible émission de carbone.

- Aviation et navigation : 0,3 à 0,5 Gt-éq-CO2 par an en renforçant l’efficacité énergétique et les combustibles à faible émission de carbone et autres mesures.

- Construction : 1,4 à 2,9 Gt-éq-CO2 par an en renforçant l’efficacité du chauffage, de la climatisation, de l’éclairage et des appareils, et autres mesures.

- Sylviculture : 1,3 à 4,2 Gt-éq-CO2 par an en réduisant la déforestation et en modifiant la gestion des forêts pour augmenter les stocks de carbone sur et dans le sol.

- Agriculture : 1,1 à 4,3 Gt-éq-CO2 par an en modifiant les pratiques de gestion des cultures et du bétail afin de réduire les émissions de gaz autres que le CO2 et renforcer le carbone du sol.

- Déchets : environ 0,8 Gt-éq-CO2 par an en améliorant le traitement des eaux usées, la récupération du gaz résiduel sur les sites d’enfouissements et autres mesures.

Le potentiel total de réduction des émissions s’élève à environ 17 Gt-éq-CO2 plus ou moins 3 Gt-éq-CO2 avec des coûts marginaux s’élevant à USD 50-100 par tonne d’équivalent CO2. Cela correspond aux estimations des coûts des scénarios mentionnés ci-dessus.

Ce potentiel de réduction des émissions est supérieur à l’écart estimé de 12 Gt-éq-CO2 sous le scénario du statu quo, et cela donne aux responsables politiques un net aperçu des options prometteuses et de la marche à suivre pour rester en dessous de l’objectif de 2 degrés Celsius.

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