« Le seul endroit au monde à l’heure actuelle où les conditions semblables à la famine ont été provoquées par le climat et non par les conflits »

Faim à Madagascar : l’ONU appelle à solidarité avec les victimes du changement climatique

8 janvier 2022, par Manuel Marchal

L’ONU renouvelle son appel à la solidarité avec Madagascar : « Au moins 1,3 million de personnes dont 30.000 souffrant de la faim ont besoin d’une aide alimentaire et nutritionnelle d’urgence dans le sud de l’île, le seul endroit au monde à l’heure actuelle où les conditions semblables à la famine ont été provoquées par le climat et non par les conflits. L’appel à la solidarité de l’ONU recevra-t-il une réponse favorable de la part des institutions qui gèrent de l’argent public à La Réunion ?

Une femme recueille l’eau de pluie sur une route dans le sud de Madagascar, frappé par la sécheresse. (Photo UNICEF/Safidy Andrianantenaina)

Pour l’ONU, la faim dans le Sud de Madagascar est un des principaux problèmes devant mobiliser la communauté internationale. C’est en effet la première fois que le changement climatique est responsable d’une situation aussi dramatique :

« Madagascar est le premier pays confronté à une détresse alimentaire liée au réchauffement climatique. Et la crise de la faim qui sévit depuis plus d’un an dans le sud du pays pourrait s’aggraver dans les mois à venir. C’est l’avertissement lancé début novembre par le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies.
Au moins 1,3 million de personnes dont 30.000 souffrant de la faim ont besoin d’une aide alimentaire et nutritionnelle d’urgence dans le sud de l’île, le seul endroit au monde à l’heure actuelle où les conditions semblables à la famine ont été provoquées par le climat et non par les conflits.
Environ un demi-million d’enfants de la région souffrent de malnutrition et 110.000 d’entre eux risquent de perdre la vie s’ils ne reçoivent pas d’aide, a indiqué le PAM.
Selon l’agence onusienne, Madagascar a souffert de plusieurs années consécutives de sécheresse, ce qui, ajouté aux tempêtes de sable, aux infestations de criquets et aux effets de la pandémie de Covid-19, a plongé l’île d’Afrique australe dans une grave crise humanitaire.
« Lorsque j’ai visité le Grand Sud de Madagascar, j’ai vu le visage humain de la crise climatique mondiale », a déclaré de son côté le Coordinateur humanitaire pour Madagascar, Issa Sanogo.
« Des femmes, des enfants et des familles mangent des cactus ou des criquets pour survivre à cette sécheresse et plus d’un demi-million d’enfants souffrent de malnutrition aiguë. Cela se produit dans un pays et une région qui ont le moins contribué au changement climatique », a-t-il ajouté, appelant la communauté internationale à augmenter de toute urgence son soutien aux personnes confrontées à la faim dans le sud de Madagascar. »

Premiers réfugiés climatiques de notre région

C’est donc à moins de 1.000 kilomètres de La Réunion qu’a lieu ce dramatique fait sans précédent : la première famine causée par le changement climatique. Elle touche un pays qui n’a que très peu contribué à la pollution de l’atmosphère par les gaz à effet de serre qui favorisent le réchauffement climatique.
Une baisse de 50 % des pluies au cours des 10 dernières années a considérablement changé le paysage, transformant en désert des zones de culture. Se pose alors la question de l’habitabilité de certaines régions, s’il n’est plus possible d’y pratiquer l’agriculture pour nourrir la population.
C’est pourquoi cette première famine causée par le changement climatique est aussi à l’origine des premiers réfugiés climatiques de notre région. Des milliers de personnes ont en effet préféré vendre leurs derniers biens pour quitter une terre devenue inculte et se rendre dans des villes plus au Nord.

Conséquences à La Réunion ?

Si à La Réunion la situation est beaucoup moins dramatique, le changement climatique s’est malgré tout également installé. Il oblige des agriculteurs de Salazie à arroser leur plantation avec de l’eau potable faute de réseau d’irrigation prévu pour cela, et pour cause : Salazie tout comme l’Est de notre île sont considérés comme le château d’eau de La Réunion. C’est pour cela qu’a été mis en œuvre le transfert de l’eau de l’Est vers l’Ouest afin d’utiliser le surplus de l’eau tombée en abondance pour irriguer la région sèche de notre île. Entre la conception du projet et sa réalisation, le changement climatique a eu le temps de s’installer dans notre île. Cela signifie qu’une nouvelle politique de l’eau est nécessaire en prenant en compte cette donnée qui s’impose à tous.
En attendant qu’une prise de conscience se traduise par des mesures concrètes en ce domaine, l’appel à la solidarité de l’ONU ne pourra rester cette année sans réponse de la part des institutions qui gèrent de l’argent public. En effet, La Réunion est une région européenne qui bénéficie à ce titre d’importants transferts d’argent public pour abonder le budget des institutions. Aux yeux de nos voisins ainsi que de la majorité de la population mondiale, ces milliards d’euros gérés à La Réunion sont une manne. Cet argent peut servir à aider les victimes du changement climatique à Madagascar. Cela permettra aussi de préparer l’avenir en montrant que les Réunionnais sont solidaires de leurs voisins.

M.M.

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