Sauver l’objectif +1,5°C à un mois d’une COP28 sous haute tension

Les émissions mondiales ne diminuent toujours pas

30 octobre 2023

Même si les émissions mondiales, essentiellement issues du charbon, du pétrole et du gaz, n’ont pas entamé leur décrue. Huit ans après l’Accord de Paris, 2023 tutoie pour la première fois +1,5°C sur une année entière et les océans explosent des records de chaleur depuis six mois.

Confrontés aux effets accrus du réchauffement climatique et à une confluence de crises géopolitiques, les États s’activent à dénouer leurs oppositions sur les énergies fossiles ou sur la solidarité Nord-Sud à un mois de la COP de Dubaï, la plus importante depuis la COP21 à Paris.

Quatre semaines avant cette 28ème conférence climat des Nations unies (30 novembre-12 décembre), censée établir officiellement que les objectifs de l’accord de Paris ne sont pour l’instant pas tenus.

Les ministres d’une cinquantaine de pays se réunissent les 30 et 31 octobre aux Émirats arabes unis pour une "pré-COP" à huis clos.

Sortir des énergies fossiles, financer la transition énergétique, partager les responsabilités entre les pays développés, pollueurs historiques, et les émergents, qui les rattrapent, créer la solidarité avec les pays plus vulnérables : tout reste encore à faire.

Face à ces défis pour le monde, l’humanité doit réduire de 40% ses émissions de gaz à effet de serre (GES) actuelles d’ici à 2030, afin de tenir l’objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris. Le but est de limiter le réchauffement à 1,5°C depuis le début de l’ère industrielle.

Mais avec la guerre Israël-Hamas, "il est difficile de savoir où nous serons dans un mois au Moyen-Orient", a expliqué Alden Meyer, expert du centre E3G. Car ce conflit risque de "rendre plus difficile une coopération multilatérale déjà compliquée à cause de l’Ukraine et de la Russie, des tensions Chine-États-Unis et de la crise de la dette, entre autres".

Huit ans après Paris, 2023 s’approche pour la première fois +1,5°C sur une année entière et les océans explosent des records de chaleur depuis six mois. Sur les continents, canicules, incendies, déluges et ouragans frappent les populations. La situation est encore plus alarmante.

Dans ce contexte, la COP28, présidée par les Émirats arabes unis, concentre les attentes comme les attaques. Plus de 80.000 personnes et 5.000 journalistes y sont attendus. Ils participeront à l’immense foire économique en marge des négociations, s’ajouteront aux scientifiques, ONG et délégués des 198 signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur la lutte contre le changement climatique.

La présidence émiratie espère y attirer un nombre record de chefs d’États les 1er et 2 décembre. La présence, rare, du président chinois Xi Jinping ou celle, inédite, du pape François sont évoquées.

Le réchauffement du monde s’oriente vers +2,8°C

Même si les émissions mondiales n’ont pas entamé leur baisse, des avancées ont été accomplie depuis Paris. A l’époque, le monde se dirigeait vers un climat réchauffé de 2,9 à 3,1 degrés en 2100. Or au rythme des émissions actuelles, le réchauffement s’oriente désormais vers +2,8°C selon le Giec, voire +2,4°C si les Etats respectent leurs engagements existants.

Les engagements des États doivent être rehaussés, pour éviter certains points de bascule, tels que la fonte des pôles, le dépérissement des forêts ou dégel du pergélisol, les colossales réserves de GES supplémentaires.

"La COP28 offre l’opportunité d’accélérer la transition en construisant le système énergétique du futur, tout en décarbonant rapidement le système énergétique d’aujourd’hui afin de maintenir la limite de 1,5°C à portée de main", a affirmé Sultan Al Jaber, président de la COP28, dans son dernier courrier aux négociateurs.

Chaque pays a ses revendications

Le débat sur la sortie des énergies fossiles, soigneusement évité à la COP27, est cette fois fermement ancré dans les travaux sur le bilan de l’accord de Paris.

Les pays insulaires réclament un moratoire, tandis que l’UE veut accélérer la sortie des énergies fossiles. De plus, plusieurs pays veulent une "transition juste" leur donnant plus de temps pour ne pas compromettre leur développement. Et des pays producteurs développent l’idée d’"énergies fossiles propres", reposant sur des technologies de captage et des crédits carbones controversés.

En parallèle, l’essor des renouvelables est une bonne nouvelle, car un accord pour tripler leur capacité d’ici à 2030 semble possible, voire réaliste, selon l’Agence internationale de l’énergie, notamment grâce aux lourds investissements américains (IRA), chinois et européens (Green deal).

Cependant, tout accord final sera suspendu à des progrès sur la finance et la solidarité avec les pays en développement, à laquelle sont tenus les pays riches par la convention climat de l’ONU.

Le blocage des négociations sur la concrétisation d’un fonds "perte et dommages", principal succès de la COP27 et ligne rouge des pays en développement, n’augure rien de bon pour les négociations de la COP28.

En cas de blocages, "le risque est qu’on nous vende plein de déclarations et de coalitions annexes qui ne remplacent pas un accord ambitieux sur le bilan de l’accord de Paris, dont les fossiles et les pertes et dommages", a avertit Lola Vallejo, experte à l’Institut du développement durable des relations internationales (IDDRI).


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