Un statut pour les réfugiés climatiques

Les migrants environnementaux désormais pris en compte

15 octobre 2015, par @celinetabou

Mardi 13 octobre, 110 Etats, réunis à Genève, ont adopté un « agenda pour la protection des personnes déplacées au-delà des frontières en contexte de catastrophes et du changement climatique ». Un « pas essentiel » pour le HCR, à deux mois de la Conférence internationale sur le climat à Paris (COP21).

Maisons détruites à Tacloban aux Philippines après le passage du cyclone Haiyan. (photo Eoghan Rice/Caritas)

Dans une interview accordée à l’agence de presse Xinhua, François Gemenne, spécialiste des migrations environnementales à sciences Po Paris, avait affirmé que « l’immigration liée au dérèglement climatique ne doit pas être considérée comme une menace future mais une réalité déjà présente ».

Un premier document prometteur

Raison pour laquelle, l’ensemble des acteurs concernés et le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) se sont félicités de cette avancée qui est une première en la matière. En effet, cet agenda est le premier document international visant à assurer une meilleure protection des personnes déplacées au-delà des frontières pour cause de catastrophes et changement climatique.
Il aura fallu trois ans pour que ce texte soit adopté, sous le nom d’initiative Nansen, du nom du norvégien Fritjof Nansen qui fut le premier haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés. Lancé en octobre 2012 par la Norvège et la Suisse, les deux pays souhaitaient combler le vide juridique autour du statut de ces migrants, victimes des dérèglements climatiques.

Selon l’International Displacement Monitoring Center (IDMC), cité par Le Monde, les catastrophes naturelles ont déplacé 166 millions de personnes, soit en moyenne chaque année 27,5 millions, entre 2008 et 2014. Certains parviennent à rester dans leur pays, d’autres doivent partir à l’étranger. Jusqu’à aujourd’hui ces victimes du climat n’avaient aucun statut mais surtout aucun système de protection.
Ces derniers ne pouvaient pas se référer à la convention de Genève de 1951, car elle garantit une protection aux personnes « craignant avec raison d’être persécutées du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs opinions politiques ».

Des ajustements à réaliser

Bien que ce texte représente un changement, il ne s’agit pour le moment que d’un consensus entre les gouvernements sur la meilleure manière d’assister et de protéger les personnes victimes des phénomènes climatiques, devant quitter leur pays.
Le texte adopté n’est pour l’instant qu’un outil destiné à « voir comment les moyens d’adaptation qui seront notamment discutés lors de la COP21 à Paris pourront désormais être mobilisés, notamment pour mettre en œuvre cet agenda de protection des déplacés et pour faciliter l’idée que la migration puisse devenir une solution », selon François Gemenne.
D’après Le Monde, l’« agenda de protection » propose des recommandations précises sur la victime (état civil, niveau des diplômes…), sur les outils leur permettant d’obtenir une protection et sur les mécanismes pertinents de coopération entre Etats d’une même région.

Les experts pensent que la Conférence internationale sur le climat à Paris en décembre devrait mettre en œuvre les préconisations, notamment sur les mesures préventives et de relocalisation des populations en cas de catastrophe, l’octroi de visas de circulation et de permis de séjour temporaire…
Laurent Neyret, professeur de droit et spécialiste de l’environnement, a souligné auprès du quotidien Le Monde que ce document est « le début d’une prise en compte partagée par les Etats de l’enjeu de la protection des déplacés environnementaux ».

Solidarité et coopération

Pour ce dernier, la prise de conscience « suppose de mettre en œuvre des mécanismes de dialogue, de solidarité, de coopération entre Etats. Les lignes de conduite proposées ne sont certes pas contraignantes, mais elles appellent à adapter les règles à l’échelle régionale ».
Laurent Neyret est optimiste, car il assure que « le terme d’agenda montre bien que l’on s’intègre dans un processus qui doit conduire à d’autres étapes ». Adopté mardi 13 octobre, le texte est une avancée, comme les négociations de ce mercredi autour du thème « Climat et défense, quels enjeux ?".

Le but de cette conférence aura été de trouver des moyens pour faire face aux risques sécuritaires résultant des changements climatiques. Entre l’insécurité alimentaire et hydrique, l’aggravations des conflits, les risques de santé publique, les tensions sur la sécurité économique, les migrations… Les ministres de la défense présents à Paris ont débattu autour de ces défis.

D’ailleurs, l’OTAN a, selon le site catnat.net, fait part de son inquiétude vis-à-vis des risques liés au changement climatique qui « affecteront la sécurité internationale ». Raison pour laquelle, l’assemblée a demandé aux membres de l’institution de reconnaitre que les changements climatiques sont « d’importants multiplicateurs de menace ».

Dans un tel contexte, la COP21 devient un évènement crucial sur le plan international et national. D’autant plus qu’en dépit des promesses de réduction des gaz à effet de serre annoncées par les pays, la planète s’achemine vers un réchauffement de 2,7°C d’ici la fin du siècle, a affirmé Climate Action Tracker (CAT), organisme regroupant quatre centres de recherche.

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