Changements climatiques

Les tropiques sont un maillon essentiel pour comprendre

10 novembre 2007, par Edith Poulbassia

La recherche sur les changements climatiques a tout intérêt à s’amplifier à La Réunion, et dans la zone Océan Indien. D’abord, parce que les îles tropicales sont particulièrement vulnérables face au réchauffement climatique. Ensuite, parce que les tropiques, et donc notre région, sont propices aux observations scientifiques, à la compréhension du phénomène. Le Symposium international sur l’état et l’évolution de l’atmosphère (qui s’est déroulé du 5 au 9 novembre) jette les bases d’une plus grande coopération mondiale.

Le Grenelle de l’Environnement a permis de le confirmer : La Réunion est particulièrement en avance dans le domaine des énergies renouvelables. Elle pourrait bien l’être aussi dans un autre domaine, celui de la recherche sur les changements climatiques. La situation de La Réunion, au sein de la zone Océan Indien, est une position idéale pour l’étude de ce phénomène, pour tenter de mieux en comprendre les causes et les évolutions. Ce n’est pas vraiment une découverte pour la communauté scientifique, les tropiques sont des lieux d’étude incontournables pour mieux connaître l’état et l’évolution de l’atmosphère. Mais si les recherches se focalisaient jusqu’à présent sur les régions polaires, c’est, confie Hassan Benchérif, « pour des raisons économiques qui intéressent les régions tempérées ». « Pour mieux comprendre comment les changements vont arriver, poursuit le chercheur, l’impact qu’ils auront sur la planète, il faut s’intéresser au moteur de la circulation atmosphérique qui se trouve au niveau des tropiques ».
Plus de 90 scientifiques de 15 nationalités différentes ont participé à ce premier Symposium organisé par le professeur Hassan Benchérif, Directeur adjoint du LACy (Laboratoire de l’atmosphère et des cyclones). Depuis 1992, le LACy effectue des mesures continues des paramètres atmosphériques avec le CNRS, l’Université et Météo France. Une trentaine de chercheurs ainsi que des étudiants en Master ou en Thèse travaillent au sein de ce laboratoire et en partenariat avec des scientifiques de l’Inde ou encore de l’Afrique du Sud, au total, 6 laboratoires de l’Océan Indien. « Le LACy est arrivé à un degré de maturité, à la fois de recherche et d’observation, qui permettait d’organiser un symposium de ce genre à La Réunion », précise Hassan Benchérif. Le LACy avait donc une vraie légitimité à organiser cette rencontre de la communauté scientifique sur le rôle des tropiques dans les changements climatiques. C’est en effet à La Réunion que les premières études ont été entreprises pour le tropique Sud. Des études qui intéressent de plus en plus la communauté scientifique internationale.
L’un des résultats du LACy est la découverte d’une pollution à l’ozone juste au-dessus de La Réunion. « Nous avons constaté qu’un pic de pollution revenait de manière régulière entre septembre et novembre, affirme Hassan Benchérif. Nous avons pu identifier les sources de cette pollution, c’est-à-dire le brûlage de la biomasse. C’est donc en partie l’activité humaine en Afrique australe et à Madagascar qui entraîne cet épandage de fumée et qui produit de l’ozone, un gaz à effet de serre qui participe au réchauffement climatique ».

« Obligation territoriale de recherche dans l’Océan Indien »

À la clôture de ce symposium, les chercheurs ont évoqué « l’obligation territoriale de recherche dans l’Océan Indien ». Une obligation que La Réunion a les moyens de prendre en charge, car elle est déjà, pour reprendre les propos de Dominique Le Quéau, Directeur de l’Institut national des sciences du climat, « un milieu riche de compétences avec l’Université, l’Ifremer, Météo France, le Cirad, l’IRD, etc... ». C’est le sens de ce symposium qui a permis de planifier les thèmes de recherche à venir.
« Nous allons renforcer la coopération dans la zone Océan Indien, notamment avec l’Inde et l’Afrique du Sud, car nous manquons de mesures sur le rôle de l’eau dans le réchauffement climatique. Cette rencontre était d’ailleurs l’occasion de rassembler les connaissances sur ce sujet. Il s’agit pour nous de mettre en évidence le changement dynamique qui peut avoir un impact important sur le changement climatique pour les 5 ans à venir ». En clair, il s’agit de comprendre les mécanismes qui conduisent cette saisonnalité plus extrême, avec des hivers plus prononcés, des étés plus chauds.
En 2010, La Réunion va disposer d’un nouvel outil pour la recherche : l’Observatoire de physique (OPAR), installé sur le site du Maïdo, sera équipé d’instruments pour mesurer la température jusqu’aux aérosols, le vent, l’évolution de la dynamique stratosphérique et la vapeur d’eau. L’objectif est aussi de donner une visibilité internationale à cet observatoire, lui donner la possibilité d’accueillir des expériences internationales.
L’Université de La Réunion a également demandé aux chercheurs présents de participer à la formation des étudiants, réunionnais et de la zone Océan Indien. Dominque Le Quéau a souligné le rôle que peut jouer le CNRS à Johannesburg à ce niveau. « Il met en place un réseau spécifique d’observation avec l’Afrique de l’Ouest et les îles de l’Océan Indien. Des bourses peuvent être envisagées pour les étudiants qui travaillent sur les sujets liés à l’atmosphère ». Lors de ce symposium, 18 jeunes chercheurs venant des pays en voie de développement ont pu obtenir des bourses de voyage.

Edith Poulbassia


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