À propos du rapport de l’ONERC

Paul Vergès pour ’une mobilisation de moyens à la hauteur des enjeux’

28 juin 2005

Samedi dernier, “Témoignages” a rendu compte de la conférence de presse tenue la veille par Paul Vergès à l’occasion de la parution du rapport de l’ONERC intitulé : ’Un climat à la dérive : comment s’adapter ?’. Nous publions aujourd’hui l’introduction du président de l’ONERC à ce rapport remis au Premier ministre et au Parlement. Les intertitres sont de “Témoignages”.

(page 6)

La canicule de l’été 2003 en France, après les tempêtes de décembre 1999 et les nombreux épisodes d’inondations qui se sont succédé ces dernières années, a ancré chez les Français l’idée de la réalité du réchauffement climatique, et suscité une inquiétude sur ses conséquences actuelles et à venir. De fait, le réchauffement climatique a cessé d’être une question uniquement globale, inscrite dans un espace-temps qui nous dépasse pour être une question qui concerne de plus en plus notre quotidien. Il met en cause tant l’avenir de la planète, c’est-à-dire de l’humanité et de l’ensemble des espèces, que nos habitudes de vie, notre santé ou l’aménagement de nos communes.
La multiplication des événements climatiques extrêmes sur l’ensemble de la planète comme sur notre territoire confirme bien l’urgence d’une politique ferme en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre ; mais elle oblige aussi à mieux comprendre les effets du réchauffement, et à mettre en œuvre une véritable politique pour s’adapter à cette évolution.
De l’avis unanime des experts du GIEC, de l’Agence européenne de l’environnement comme de l’Organisation météorologique mondiale les changements climatiques sont déjà en cours et ses effets commencent à entrer en action.

Deux piliers

Des changements profonds sont désormais inéluctables, quels que soient les efforts de réduction des émissions qui pourront être déployés. Ceux-ci vont affecter de nombreux secteurs : agriculture, tourisme, pêche, aménagement du territoire, bâtiments et infrastructures, protection des populations... En ce sens, la question des changements climatiques a cessé d’être une question strictement scientifique concernant un avenir lointain pour devenir un enjeu actuel éminemment politique.
La création de l’ONERC (Observatoire national des effets du réchauffement climatique) par une loi votée par le Parlement à l’unanimité témoigne de la prise de la conscience qu’il n’est plus permis d’attendre mais qu’il est urgent d’agir pour adapter nos politiques sectorielles, nationales et locales, aux perturbations climatiques annoncées. L’adaptation de notre territoire aux changements climatiques est devenu un enjeu majeur qui appelle une mobilisation nationale.
Sur proposition du conseil d’orientation de l’ONERC, pour la première fois cette année, figure dans le plan climat - à côté du volet relatif à l’atténuation - un volet spécifique consacré à l’adaptation. C’est là une avancée importante car une politique aussi globale qu’équilibrée doit impérativement reposer sur ces deux piliers.

Un chantier immense

L’ONERC a précisément été créé pour informer sur les conséquences de cette dérive du climat, et pour offrir au gouvernement, aux élus et aux collectivités, acteurs du développement, les moyens d’élaboration d’une véritable politique de prévention et d’adaptation.
C’est là un chantier immense, où tout est à faire, où tout est à imaginer dans l’échange d’informations entre la communauté scientifique, les associations et les élus. C’est là un champ nouveau dans lequel il importe de s’engager avec autant de modestie et de prudence que de fermeté et d’ambition. C’est là une construction inscrite dans la durée dont ce premier rapport trace les premières grandes lignes. Entre la sous-estimation de l’enjeu et le catastrophisme, il existe un espace d’action fondé sur la rigueur scientifique et la responsabilité de l’élu.

Point de départ

Bien sûr, la mise en œuvre de ces mesures de prévention et d’adaptation appelle une mobilisation de moyens à la hauteur des enjeux. Mais l’attentisme aurait un coût autrement plus onéreux tant sur le plan humain qu’économique.
Le lourd tribut payé par les pays en voie de développement face aux catastrophes naturelles, par absence de système d’alerte et de mesures de prévention, confirme bien l’importance de forger, à tous les niveaux, une véritable culture du risque. Ainsi, à titre d’exemple, il nous faudra évaluer la vulnérabilité de nos zones littorales, aussi bien en France continentale que dans les îles de l’Outre-mer, face à l’élévation annoncée du niveau de l’océan et en tirer toutes les conséquences.
Cela appelle également une révolution conceptuelle dans les processus de décision.
Il importe que la donnée climatique soit systématiquement intégrée à tous les niveaux, qu’il s’agisse des documents de planification, notamment en matière d’aménagement du territoire, que dans la réalisation des infrastructures et des bâtiments.
Puisse ce premier rapport de l’ONERC et les recommandations qui y sont contenues être le point de départ d’une politique nationale ambitieuse en faveur de l’adaptation du territoire aux impacts des changements climatiques afin de placer tous les territoires de la République en situation d’affronter dans les meilleures conditions des bouleversements devenus aujourd’hui irréversibles.

Paul Vergès


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