Service public de l’environnement

Restaurer les forêts : un moyen éprouvé d’aider l’économie et de réduire la pauvreté

10 septembre 2012

Le programme quinquennal de restauration de paysages forestiers dans 23 pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine a démontré leur rôle crucial dans la création d’emplois et l’augmentation des revenus de leurs habitants.

Mise en œuvre entre 2007 et 2011 par l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) avec le soutien du gouvernement néerlandais, la stratégie des Moyens de subsistance et des Paysages a été conçue pour renforcer la résilience de paysages forestiers et pour dégager des ressources génératrices de revenus ayant un impact durable sur la vie de leurs populations.

« La stratégie des Moyens de subsistance et des Paysages a provoqué un véritable changement chez les ménages dépendant de la forêt au sein de différents paysages », déclare Chris Buss, responsable de programme au Programme mondial sur les forêts et le changement climatique de l’UICN. « En ce faisant, le programme a détruit le mythe selon lequel les forêts ne serviraient que de filet de sécurité économique pour les pauvres. Bien au contraire, elles peuvent être cruciales pour le développement des moyens de subsistance de toutes les classes sociales et elles méritent d’être prises sérieusement en considération dans les politiques publiques nationales et locales ».

Stratégie des Moyens de subsistance et des Paysages

Dans le district de Mi-Youn, en Chine, les revenus locaux ont fait un bond estimé à 50% grâce à l’afflux de touristes par suite de travaux poussés de restauration forestière, tandis que le nombre de résidents y vivant dans la pauvreté a chuté de moitié à moins de 15%. Outre sa contribution à l’accroissement des revenus monétaires de la population, le programme a également accru l’approvisionnement en aliments et en combustibles de la région.

Cela a amené le gouvernement de Pékin à recommander que les travaux de restauration des paysages soient étendus sur l’ensemble du bassin hydrographique de Mi-Youn, qui fournit 80% de l’eau de Pékin. Des succès semblables ont été enregistrés dans de nombreux autres pays où la stratégie des Moyens de subsistance et des Paysages a été déployée.
« Un ensemble adapté d’initiatives a été défini pour chaque paysage en fonction des conditions sur le terrain », précise José-Arturo Santos, Coordonnateur régional de l’UICN pour les droits et la gouvernance environnementale auprès de l’Initiative Mésoamérique et Caraïbes. « Mais nous avons dans chaque cas négocié des droits d’accès locaux, appuyé la gestion forestière sous contrôle local ainsi que le développement d’activités génératrices de revenus ».


130 milliards de dollars de revenus annuels

Le programme a également obtenu d’importants succès de politique en suscitant un intérêt accru pour l’amélioration de l’état de santé des paysages. Au Rwanda, par exemple, le gouvernement a fait part de son engagement à lancer un grand programme destiné à réaliser la restauration écosystémique du territoire national entier d’ici à 2035.

Lors de ces travaux, l’UICN a estimé que la foresterie sous contrôle local dans les pays en développement apporte aux ménages environ 130 milliards de dollars par an en moyens de subsistance, un montant qui dépasse les réserves d’or combinées de la France et de la Suisse et qui équivaut à peu près au total annuel de l’Aide publique au développement (APD).
« Les pays doivent reconnaître la vraie valeur des forêts et les tenir au cœur des politiques de développement et non à leur périphérie », déclare Chris Buss.

Du modèle "axé sur les ressources" au modèle "axé sur les droits"

Pour améliorer les revenus des populations à travers le monde qui dépendent aujourd’hui de la forêt et dont on évalue le nombre à 1 milliard de personnes, le modèle actuel d’investissement forestier doit être revu entièrement. Il ressort d’une initiative de grande ampleur menée par le The Forests Dialogue (TFD), l’UICN et Growing Forests Partnerships (GFP) que pour optimiser les avantages et la productivité de la forêt, il s’agira d’évoluer du modèle « axé sur les ressources » à un système « axé sur les droits » de « foresterie sous contrôle local » plaçant la maîtrise locale des forêts au cœur du processus d’investissement.

Ces trois dernières années, The Forests Dialogue (TFD), en partenariat avec l’UICN, a organisé une série de dialogues au niveau des pays, auxquels plus de 400 propriétaires et investisseurs forestiers, ONG, agences gouvernementales et intergouvernementales ont été conviés. Le rapport qui en a résulté “Investing in Locally Controlled Forestry” (Investir en foresterie sous contrôle local), lancé aujourd’hui au Congrès mondial de la nature de l’UICN, montre qu’en mettant des processus corrects en place et dans les conditions appropriées, il est possible à pratiquement n’importe quel individu ou groupe de lancer une entreprise forestière avec succès.
« Une première étape consiste à reconnaître que de nombreuses forêts et de nombreux paysages forestiers sont habités par des populations détenant des droits fonciers sous une forme ou une autre », explique Chris Buss, responsable de programme au Programme des forêts et du changement climatique de l’UICN. « Les investisseurs sont de plus en plus conscients de la nécessité de respecter ces droits au moyen de processus reconnus, bien que les conséquences pratiques de ces processus n’aient guère attiré l’attention jusqu’ici ».


À la population de décider

Les enseignements de cette initiative montrent que les processus adoptés à ce jour consistent fréquemment à indemniser les populations concernées de la perte de terres ou de ressources, et non à les intéresser à une véritable entreprise partagée. En revanche, un système « axé sur les droits » situe le contrôle local au cœur du processus. En vertu d’un tel système, ceux qui possèdent la forêt ou détiennent des droits sur celle-ci sont ceux-là mêmes qui trouveront des investisseurs et des partenaires et les inviteront à gérer leurs ressources naturelles.
« L’approche axée sur les droits reconnaît l’autonomie des populations locales et leurs droits à déterminer la vocation de leurs terres et de tirer un revenu de leur gestion efficace », déclare Minni Degawan, Coordonnateur de projet pour KADIOAN, une organisation de peuples autochtones des Philippines.

« Donner aux populations locales les moyens de prendre des décisions sur la gestion commerciale de terres et de forêts tout en bénéficiant de droits d’occupation assurés, et leur permettre de bâtir leurs propres organisations et d’accéder aux marchés et à la technologie s’avérera une voie efficace pour relever les revenus et protéger les ressources forestières ».
« Investir en foresterie sous contrôle local ne peut qu’être profitable aux communautés, aux gouvernements et aux investisseurs. Néanmoins, lancer une entreprise commerciale viable n’est pas sans poser des problèmes et exige une adaptation des approches conventionnelles de l’investissement », déclare Peter Gardiner, responsable des ressources naturelles chez Mondi.

« Pour faciliter ce processus, Growing Forest Partnerships, qui réunit l’UICN et TFD, a élaboré un manuel du praticien qui sera publié à la fin du mois afin de proposer aux investisseurs et aux détenteurs de droits une approche étape par étape menant à la conclusion d’accords commerciaux ».


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