Changement climatique
Salazie manque d’eau
L’aménagement du territoire bouleversé par le changement climatique
/ 31 décembre 2016
Depuis quelques années, la sécheresse devient la norme y compris dans l’Est de La Réunion, alors que cette zone était considérée comme le château d’eau de notre île. Les coupures d’eau à Salazie soulignent que le changement climatique a pris de court les décideurs. Aujourd’hui, ces derniers n’ont plus d’excuse pour mettre l’aménagement de La Réunion aux normes du changement climatique. C’est une question de protection de la population, et aussi de bonne utilisation des deniers publics.
Depuis quelques années, la sécheresse devient la norme y compris dans l’Est de La Réunion, alors que cette zone était considérée comme le château d’eau de notre île. Les coupures d’eau à Salazie soulignent que le changement climatique a pris de court les décideurs. Aujourd’hui, ces derniers n’ont plus d’excuse pour mettre l’aménagement de La Réunion aux normes du changement climatique. C’est une question de protection de la population, et aussi de bonne utilisation des deniers publics.
L’année se termine par un événement. Le maire de Salazie a pris des mesures pour économiser l’eau : interdiction d’arrosage, ainsi que de lavage des véhicules. Par ailleurs, le fermier, la CISE, a ordonné des coupures d’eau pour faire remonter le niveau des réservoirs. Si la situation de La Réunion n’est pas aussi grave qu’à Mayotte, c’est une sérieuse alerte. En effet, Salazie se situe sur la côte au vent. Le cirque fait donc partie de la région la plus arrosée, traditionnellement, de l’île. C’est d’ailleurs cette réalité qui a inspiré les concepteurs du chantier du basculement de l’eau de l’Est vers l’Ouest.
L’idée était de prendre dans la côte au vent une partie de l’eau qui tombait en abondance pour la transférer vers l’Ouest, région beaucoup plus peuplée mais se situant sous le vent, et donc en manque d’eau.
À son époque, le Docteur Raymond Vergès avait proposé un captage à la rivière de l’Est et un acheminement de l’eau par un canal à ciel ouvert passant par les hauts de l’île. Quand le Conseil général a lancé le projet dans les années 1980, l’orientation retenue a été de prendre l’eau dans deux rivières situées dans le cirque de Mafate, et deux dans celui de Salazie - la rivière du Mat et la rivière Fleurs jaunes.
Après de nombreux aléas, le chantier de creusement s’est terminé en 2014. Mais depuis le premier coup de pioche, la situation n’est plus la même. En effet, la sécheresse s’installe petit à petit sur La Réunion. Comme partout dans le monde, les années se suivent et sont toujours plus chaudes. Une des conséquences est le manque d’eau. Cela se vérifie notamment dans l’Est de La Réunion, qui est pourtant considéré comme son château d’eau naturel.
Résultat : les habitants du cirque de Salazie subissent des restrictions de l’usage et des coupures d’eau. Or, c’est précisément dans ce secteur que se trouvent la moitié des captages du basculement des eaux.
Accélération du changement climatique
Si au moment de la conception du projet, la région Est connaissait une sécheresse comme actuellement, sans doute aurait-il été modifié. Les 30 ans qui ont séparé le lancement des travaux de leur achèvement a laissé le temps au climat de changer. La réalité d’hier n’est donc plus celle d’aujourd’hui. Et cette réalité actuelle, les décideurs du passé ne l’ont pas anticipée.
Au-delà des coupures d’eau à Salazie, c’est tout l’aménagement du territoire de La Réunion qui est bouleversé par le changement climatique. La montée du niveau de la mer va menacer des infrastructures aussi importantes que l’aéroport de Gillot ou le port de commerce. La route en mer est d’ores et déjà condamnée par ce phénomène. La différence entre les décideurs d’hier et ceux d’aujourd’hui, c’est que ces derniers disposent de données leur permettant de prévoir. Le changement climatique fait en effet l’objet d’une prise de conscience mondiale. Si un traité comme l’Accord de Paris a été ratifié, c’est bien parce que les dirigeants du monde savent que si tout continue comme avant, ce sera la catastrophe.
L’ONERC pas écouté à La Réunion
Etrangement à La Réunion, des projets sont lancés sans prendre en compte les effets inéluctables du changement climatique. C’est un des nombreux paradoxes réunionnais. En effet, c’est un Réunionnais, Paul Vergès, qui a fait voter une loi faisant de la lutte contre le changement climatique une priorité nationale. De cette loi a découlé la création de l’ONERC, Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, une institution présidée par Paul Vergès jusqu’à son décès. L’ONERC avait notamment pour tâche de donner aux responsables politiques un éclairage afin qu’ils puissent prendre en compte les effets du changement climatique dans leurs décisions. Tous les ans, un rapport était remis au gouvernement. Cela a été le point de départ de la réalisation de Plan climat territoriaux. Force est de constater qu’à La Réunion, les données de l’ONERC n’ont pas été prises en compte. Il est encore temps de redresser la situation avant qu’il ne soit trop tard, à condition d’agir maintenant pour que l’aménagement du territoire de La Réunion prenne en compte le changement climatique. C’est une question de protection de la population, et aussi de bonne utilisation des deniers publics.
M.M.