L’Académie a 20 ans

Bilan et perspectives

10 décembre 2004

Soutenue par les progressistes réunionnais mais contestée par les “départementalistes”, la création de l’Académie de La Réunion en 1984 a permis un décollage du système éducatif de l’île. Mais des lacunes persistent, comme le prouve le chiffre des 100.000 à 120.000 illettrés, tandis qu’on attend de l’institution académique qu’elle puisse accompagner et aider La Réunion dans son dialogue avec le monde.

(Page 2)

En demandant pour La Réunion le statut de département français, les pères de la loi du 19 mars 46 et leurs amis voulaient faire bénéficier à notre île du progrès social : extension du système de protection sociale, meilleures conditions sanitaires et développement de l’instruction. Dans la même logique, quelques années plus tard, les progressistes réunionnais et, au premier plan les communistes, ont demandé la transformation de l’ancien vice-rectorat - qui dépendait de l’Académie d’Aix-Marseille - en une entité autonome propre.
Ce fut, en pleine bataille pour ou contre l’autonomie, une rude bataille. La création de l’Académie a été contestée et combattue par tous ceux qui se qualifiaient de “départementalistes”. Ils voyaient en la nouvelle structure un signe annonciateur d’un prochain “largage” de l’île. Les déclarations ou les écrits de l’époque d’un Albert Ramassamy, par exemple, sont les témoignages d’une vive résistance de la part de conservateurs qui ne voulaient rien changer.
Aujourd’hui, personne ne conteste le fait que l’Académie a permis un véritable décollage du système éducatif réunionnais. Mais sans la décentralisation, qui a permis aux collectivités locales de jouer un rôle dans la construction de nouveaux établissements, on peut se demander quels auraient été les résultats. Pour ne rendre qu’un exemple : le projet d’un deuxième collège au Port dans les années 70 pour désengorger le seul qui existait alors sur la commune fût contesté par les services du vice-recteur qui ne voyaient pas son intérêt.
Si les résultats sont là et sont incontestables pour démontrer que la création de l’Académie a été un plus pour La Réunion, plusieurs éléments témoignent des limites de la politique menée.
Le chiffre de 100 à 120.000 illettrés que l’on cite habituellement souligne que le système ne remplit pas encore parfaitement son rôle. Les enquêtes d’insertion dans la vie active que réalisent les services du rectorat 6 mois après le bac montrent qu’une part importante de jeunes quittant le système scolaire ont des difficultés à s’insérer. La question du créole à l’école est toujours sujet de polémique. Le calendrier scolaire tel qu’il est ne donne pas entièrement satisfaction, etc., etc.
Pour son développement, La Réunion ne peut plus ignorer les phénomènes de la mondialisation. Elle doit s’ouvrir au monde. Elle doit à la fois améliorer ses relations avec la Métropole et l’Europe, s’intégrer dans son environnement immédiat et s’insérer dans l’axe d’échanges qui est en train de se développer entre l’Afrique australe et l’Asie dont la Chine et l’Inde. Il est logique d’attendre de l’Académie et aussi de l’Université qu’ils accompagnent ce mouvement. Les structures éducatives réunionnaises, de la base au sommet, sont parmi les meilleurs instruments que nous avons pour donner corps à une parole réunionnaise au monde.

J. M.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus