Mon point de vue

Cinquantenaire...

28 mars 2006

La départementalisation a fêté ses 60 ans (1946 - 2006), en grande pompe. Rarement, La Réunion tout entière - toutes générations confondues, tous les partis politiques de droite et de gauche - a vécu en commun un événement politique aussi intensément, sincèrement et dignement. Aujourd’hui, tous se plaisent à dire que c’était un bon projet, un bon statut. Une seule personnalité politique de l’Ancien régime, dont le parti, le milieu familial et la profession favorisaient une opposition farouche à la suppression de la colonisation dans les années 40, m’a semblé gêné aux entournures, avouant quand même que ’les communistes ne sont plus indépendantistes’. Excusez cette petite digression, c’est le côté militant qui revient. Car ce n’est pas de cet anniversaire que je voulais parler, mais d’un autre à peine plus récent. Un anniversaire dans le paysage sportif : Le cinquantenaire de la LRF (1956 - 2006)

Le 9 mars 1956, la Ligue réunionnaise de football naît sous l’impulsion de Jean Moysan, aidé en cela par quelques personnes du milieu footballistique et aussi de Eugène Raude, directeur de la D.D.J.S. (Direction départementale de la jeunesse et des sports). Cette naissance mettait fin à la Fédération sportive réunionnaise (F.S.R.) qui gérait depuis 1930 le football et d’autres sports mais qui était devenue "archaïque et inefficace".
Le football a évolué : de sport des quartiers d’avant-guerre "sport de rue", "jeu du peuple" et sport de loisirs, il devient un sport collectif structuré à tous les niveaux et fortement médiatisé. Le football a permis l’intégration, le métissage ethnico culturel en devenant sport de promotion et d’insertion sociales, sport de compétition, source de revenus essentiels ou complémentaires, source d’emplois divers. À la fin de ce demi-siècle d’existence.
"Dans les années 50, le football exprime déjà une tradition, des épopées, une histoire. Il accompagne la société réunionnaise dans son évolution. Il appartient à la vie quotidienne, aux rendez-vous dominicaux, aux festivités officielles. En un mot, il est intégré, admis, assimilé comme s’il avait toujours existé", note Evelyne Combeau Mari.
En créant sa ligue, le football est pionnier en la matière. D’autres ligues lui emboîteront le pas pour organiser leur sport favori localement.

"Cette évolution structurelle était devenue inéluctable compte tenu de l’activité footballistique sur le Département... les missions de la Ligue sont multiples : organisation d’un championnat local structuré, ouverture des compétitions au niveau international, gestion et répartition d’installations sportives sommaires et insuffisantes, formation des arbitres, puis des initiateurs et éducateurs sportifs, gestion des subventions attribuées par l’État via les organismes départementaux, régulation des conflits survenant entre les clubs ou en compétition, impulsion d’un championnat de jeunes, amélioration du niveau technique des joueurs. La création de cette Ligue scelle le destin du football réunionnais à celui du football français avec la déterminante affiliation de la LRF à la Fédération française de football (FFF)", souligne Hosman (*) dans son mémoire de Maîtrise d’Histoire.
L’organisation administrative et technique amorcée, amplifiée, consolidée au fil des décennies sera capitale pour la LRF qui comptait 1883 licenciés en 1965, l’année de la prise de fonction de René Fleurian CTR, dont 603 jeunes (32,77%) pour culminer aujourd’hui, 40 ans après, à plus de 30.000 licenciés dont 14.820 jeunes, soit près de 50% de l’effectif.

La LRF s’est professionnalisée : de 2 ou 3 bénévoles à l’embauche de 2 permanents, puis 3 au siège de la rue Juliette Dodu à 6 dans les locaux modernes (propriété de la LRF) de la rue Roland Garros dans les années 70-80, elle approche ces dernières années à une vingtaine d’employés entre Saint-Denis route de la Digue et Saint-Pierre Antenne Sud. Le président actuel Yves Éthève a structuré et modernisé la Ligue.
Parallèlement, la politique technique définie par la Fédération française de football avec la création de la DTN au début des années 70, est appliquée au niveau local. "La LRF possède à partir de 1973 une politique technique puisqu’il y a politique lorsqu’il y a un projet consciemment et explicitement défini. Toute politique est anticipation dans le temps, projection dans l’avenir immédiat ou lointain pour changer les choses" (extrait du sujet de maîtrise d’histoire du football local (1973 - 1991) d’Hosman).
La fusion, le mariage, le “pacsage” du secteur technique (les éducateurs, entraîneurs, spécialistes du football) et du secteur administratif (les dirigeants bénévoles) suivi de la professionnalisation par l’embauche de secrétaires, comptables, directeur... ont été primordiaux pour permettre la progression et le succès de la première Ligue sportive du département.
Cette osmose de techniciens-dirigeants a connu ses heures de gloire dans la décennie 70-80 avec Gilbert Annette, Axel Royé, Alex Eyquem, Isis Prémont (éducateurs) associés à Francis Corré, Yves Ethève, Jean Pierre Sabiani... (dirigeants).

Enfin, insistons sur le rôle primordial qu’ont joué les enseignants, instituteurs et directeurs d’école, les professeurs et les fonctionnaires d’État dans la construction technique de la LRF pendant ces 5 décennies.
Dès les premiers pas de la LRF, les Pierre Bahuet, Agénor du Tremblay, Damase Legros, Yves Ringwald, Jean Pierre Sabiani, Axel Royé, Roland Sida, Noël Grondin, Jean-Claude Chabriat, Pierre Suffren, Roger Sabiani, Yves Dupuy, Jacques Rasamvela, Raymond Lauret, Pierre Louvat, Christian Boyer, Jean Albert Rollin... Jean-Claude Sham-Fane, Maximin Elizéon, Clément Gérard, Stelio Vitry et mes amis de Saint-Joseph et moi-même et tant d’autres encore, nous avons lancé le football des jeunes (poussins) en lever de rideau des matchs de D1 au début des années 70, initiative (évidemment) décriée et mal perçue par les spectateurs et dirigeants de l’époque !
J’ai cité les anciens, mais d’autres jeunes éducateurs ont pris le relais suite à la formation de nombreux Brevets d’État pendant la période du CTR Axel Royé. Ces éducateurs devraient rendre au football ce que le football leur a donné : le savoir, l’expérience, un emploi.
Aujourd’hui, la LRF a sûrement besoin d’un nouveau projet pour relooker et dynamiser la machine cinquantenaire. Yves Éthève, Président depuis plus de vingt ans, en est conscient et y pense sérieusement, avec ses principaux collaborateurs.
J’ose espérer que des entraîneurs, éducateurs occuperont une place active et efficace dans le nouveau projet de la Ligue Réunionnaise de Football.

Goulam Gangate

* Hosman Gangate, l’actuel entraîneur de l’Excelsior.


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