Les étudiants étrangers premières victimes d’un vieux rêve des adversaires de la mobilité sociale par l’éducation

Hausse incroyable des frais d’inscription pour les étudiants étrangers : le gouvernement impose la sélection par l’argent dans les Universités

23 avril 2019, par Manuel Marchal

2770 euros pour une licence et 3770 euros pour un master au lieu de 170 et 243 euros : le gouvernement instaure une sélection par l’argent visant les étudiants non-européens. Un tiers des Universités ont déjà pris position contre cette augmentation qu’elles refusent d’appliquer, malheureusement celle de La Réunion n’est pas sur cette liste. La cible choisie n’est-elle pas un test pour la résistance à une mesure aussi inégalitaire ? N’est-elle pas une première brèche visant à transformer les Universités sur le modèle des USA, obligeant les moins riches à s’endetter auprès des banques pour payer leurs frais d’inscription ? En effet, dans certaines écoles d’ingénieurs, les étudiants européens inscrits avant le 1er septembre 2018 paieront 601 euros, tandis que ceux inscrits après cette date devront s’acquitter de 2500 euros de frais d’inscription.

L’arrêté instituant une inégalité des frais d’inscription selon l’origine est paru le 19 avril sous la signature de Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, Gérald Darmanin, ministre des Comptes publics, et Annick Girardin, ministre des Outre-mer. Il augmentant plus de 1000 % les frais d’inscription à l’Université pour les étudiants non-originaires de l’Europe ou qui n’y vivent pas actuellement.

Au lieu de payer 170 euros pour une année de licence, et 243 euros pour une année en master, les étudiants concernés par ce changement devront s’acquitter de frais d’inscription astronomiques : 2770 euros en licence, et 3770 euros en master.
Pour le moment, les étudiants déjà inscrits dans une Université, et ceux qui préparent un doctorat ne sont pas concernés par cette hausse.

Difficile de croire que cette hausse permettra de « renforcer l’attractivité » comme l’indique « Le Monde » citant une source du gouvernement. Ne faut-il pas plutôt voir la volonté de faire une brèche dans le droit à l’accès à l’enseignement supérieur reconnu à tous les bacheliers, qui sont titulaires du premier grade universitaire ?
En effet, dans le modèle républicain, les frais d’inscription ne représentent qu’une petite fraction du coût de fonctionnement de l’Université, qui est un service public. Mais dans d’autres pays, notamment aux USA, ils servent à financer l’Université. D’où des coûts très élevés, qui obligent les étudiants à s’endetter auprès des banques pour payer leurs frais d’inscription. L’arrêté visant les étudiants étrangers n’est-il pas un premier pas vers la sélection par l’argent dans les Universités ?

En effet, dans certaines écoles d’ingénieurs, « dans les écoles centrales constituées sous la forme d’une école extérieure aux universités et à l’école des mines de Nancy », les étudiants européens inscrits avant le 1er septembre 2018 paieront 601 euros, tandis que ceux inscrits après cette date devront s’acquitter de 2500 euros de frais d’inscription.

24 Universités refusent cette sélection

« 25 institutions d’enseignement supérieur (24 universités sur les 75 universités en France, et l’EHESS) se sont déjà prononcées fermement contre l’augmentation des frais d’inscription depuis le 19 novembre 2018. Il s’agit des universités de Lorraine, Paris-Sud, Paris 8, Paris 13, Paris 3, Grenoble, Clermont-Ferrand, Aix-Marseille, Rennes 1, Rennes 2, Angers, Paris Nanterre, Toulouse 2, Tours, Le Mans, Caen, Strasbourg, Rouen et Lyon 2, Reims. La plupart ont annoncé une non application de la hausse des frais d’inscription pour les étudiants extra-communautaires pour la rentrée 2019-2020 », précise « Sauvons l’Université ». Malheureusement, La Réunion ne figure pas sur cette liste.

Exonérations en fonction des intérêts de la France ou de l’Université

Un autre arrêté a été publié le même jour au « Journal officiel ». Il précise les cas où des exonérations partielles ou totales de droit d’inscription sont prévus :
« Le ministre des affaires étrangères peut exonérer partiellement les étudiants étrangers du paiement des droits d’inscription afférents à la préparation d’un diplôme national ou du titre d’ingénieur diplômé dans les établissements mentionnés à l’article R. 719-49. La décision prend en compte la politique étrangère culturelle et scientifique de la France et la situation personnelle des usagers, y compris leur parcours de formation. L’attribution de l’exonération est notifiée par le ministre à l’étudiant et à l’établissement concernés ».
« Les étudiants qui en font la demande en raison de leur situation personnelle, notamment les réfugiés et les travailleurs privés d’emploi ;
« Les étudiants dont l’inscription répond aux orientations stratégiques de l’établissement ; »
« La décision est prise par le président de l’établissement en application de critères généraux et des orientations stratégiques fixés par le conseil d’administration, dans la limite de 10 % des étudiants inscrits », non comprises les exonérations accordées à des étudiants entrant dans les critères suivants : en application d’un accord conclu entre l’établissement concerné et un autre établissement, dans le cadre d’un programme européen ou international d’accueil d’étudiants en mobilité internationale ; qui suivent un enseignement à distance depuis un État situé hors de l’Espace économique européen ; qui suivent un enseignement dispensé dans un établissement étranger en application d’une convention conclue avec un établissement français ; hospitalisés ou détenus dans un établissement pénitentiaire ou un établissement de santé habilité à recevoir des détenus et suivant un enseignement à distance. »

M.M.

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