La faute au pétrole

19 juin 2006

Vendredi 16 juin. Quelle sacrée soirée de football ! Nos coqs pays n’étaient pas encore dans les pieds de bois pour roupiller du juste sommeil des volatiles de l’hémisphère Sud, que là-bas dann péi l’Europe, à Gelsenkirchen, commençait un match dans ce groupe de la mort entre deux équipes au football si réputé techniquement : Argentine contre la Serbie-Montenegro. Le score inattendu et surprenant, 6-0 pour les successeurs de Maradona. Ce sera sûrement le score le plus gros de ce 1er tour et peut-être même de la compétition. Ce genre de match nous indique toute la différence de niveau entre une nation de football d’Amérique du Sud qui donne, qui a donné et donnera encore tant de joies, de bonheur, de frissons à ses supporters, et un pays de l’Est recomposé, issu de la grande Yougoslavie, au football si technique, tout en arabesques dont les joueurs étaient surnommés les Brésiliens de l’Europe. La Serbie-Monténégro est une des petites nations mortes-nées après la guerre fratricide, d’extermination ethnique, de nationalismes exacerbés, de génocides honteux - purification ethnique exécutée souvent dans l’indifférence des grands, à quelques heures de Paris. La faute au pétrole qui n’y existe pas ?
Le score de l’Argentine n’est pas une surprise en soi, disais-je, tant son jeu est fluide, limpide, tout en mouvement, avec un minimum de touches de balle. Exit donc la Serbie qui avait déjà perdu le territoire monténégrin il y a quelques mois, dans un de ces tours de passe-passe de la politique nationaliste des Balkans. Les joueurs de la Pampa, encouragés par leur grand frère Diego Maradona aux formes physiologiques plus épurées, se préparent maintenant pour les 8èmes de finale.

Cruel football !

Quel dilemme à 20 heures pour ces fabuleux Pays-Bas - Côte d’Ivoire, deux de mes équipes préférées, au-delà de la couleur orange qui m’habite au quotidien, deux footballs de panache, de puissance, de spontanéité. Mon disque dur a imprimé pour toujours les grands mouvements de jeu des oranges mécaniques des années 70 emmenées par le maestro Yohan Cruyff et aujourd’hui managée par un ex-buteur de grande classe, Marco Van Basten. Malgré tout, mes hésitations ne durèrent pas longtemps. Dès les premières secondes, mon cœur se mit à battre pour ces guerriers ivoiriens, unis autour du football, oubliant les déchirements ethniques du pays de Laurent Tapé, l’ancien joueur de Saint-Philippe que j’avais recruté de l’ASEC d’Abidjan il y a presque 30 ans et bien intégré aujourd’hui dans la vie réunionnaise.
J’étais malheureux avec lui. Les Ivoiriens ne méritaient pas de perdre et de se faire éliminer après ces deux matchs héroïques. Déçu et triste, je le suis aussi pour Henri Michel que j’apprécie pour ses qualités d’homme, de technicien et de joueur talentueux qu’il fut dans l’autre équipe de mon cœur, le FC Nantes.
Ah ! le foot est cruel, injuste : on peut bien jouer et perdre quand même...

Goulam Gangate


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus