Technologie et recherche

Le cyclotron est dans ses murs

18 avril 2007

Moment symbolique important hier, dans le parc de la Technopole : le cyclotron, un engin de 22 tonnes à peine plus volumineux qu’une grosse voiture, a été entré par le toit du bâtiment qui, désormais, lui sert d’écrin.

L’entrée du cyclotron dans le bunker.

Il fallait être matinal, hier, pour voir arriver le cyclotron - outil de haute technologie servant à l’imagerie médicale - livré à 7h du matin dans le parc de la Technopole. Il aura pour voisin le futur pôle technologique de l’Université, le futur “Village des entreprises” et le CIRAD.
Le côté spectaculaire de la livraison tient au fait qu’il s’agit d’un engin de 20 tonnes qu’il a fallu introduire par le toit dans un bâtiment de deux étages en cours de construction, et dont le cyclotron est désormais le cœur. Le bâtiment lui-même, d’une très haute technicité, est construit autour de la machine, en fonction d’elle et des adaptations qu’elle requiert. Le projet d’ensemble coûte 14 millions d’euros, dont 2,5 millions pour le cyclotron seul. L’ensemble du bâtiment comprend des cellules blindées et un système de production très sophistiqué dans lequel l’aération, par exemple, coûte plus cher que la totalité des murs. Le haut niveau de technicité du bâtiment intègre un système de protection et d’alarme, et des normes sanitaires drastiques pour une hygiène absolue (taux de poussière zéro, etc...).

La grue nécessaire à cette opération d’enchâssement de haute précision est venue du chantier de la route des Tamarins et pèse environ 4 fois le poids de l’engin à lever.
Le cyclotron, désormais dans ses murs, y est pour une période d’environ 25 ans, horizon au-delà duquel on peut prévoir que nos besoins seront sans doute différents et les machines pour les satisfaire, encore perfectionnées. Il a été réceptionné par le Président et le Directeur du CYROI (Cyclotron Réunion Océan Indien), respectivement Serge Svizzero et Christian Mériau, par Maya Césari, Chercheuse à l’Université et Conseillère régionale, chargée du suivi de ce projet, ainsi que par Jean-Hugues Lavarel, jeune ingénieur réunionnais issu du lycée Lislet-Geoffroy et formé depuis 1 an à la conduite du cyclotron sur 6 des 10 plateformes existant dans l’Hexagone. Jean-Hugues Lavarel aura avec lui une équipe de 4 ou 5 personnes - radio-chimiste, radio-physicien, radio-pharmacien et autres techniciens.

Fabriqué à Upsala (Suède), le cyclotron de La Réunion a une originalité par rapport aux 10 plateformes installées dans l’Hexagone, dont 7 sont dédiées à la seule production industrielle de marqueurs de glucose. La plateforme de notre île servira à la production automatisée de marqueurs mais aussi à la recherche, pour des raisons liées à la durée de vie du radio-élément produit par le cyclotron. Le cyclotron est en effet un accélérateur de particules, qui produit le fluor-18, d’une durée de vie de 2h à 6h, ce qui nous impose de le produire sur place. « Le fluor-18 sert à marquer une solution sucrée qui, lorsqu’elle est injectée aux patients, permet de visualiser, grâce à une caméra adaptée (PET-scan), des cancers, des métastases en évolution ou d’éventuelles récidives. C’est aujourd’hui le système d’imagerie des cancers le plus fin et le plus performant. Il améliore dans 30% des cas la prise en charges thérapeutique dont dépend la survie des patients », explique Maya Césari.
Dans le volet recherche, le cyclotron produira des “marqueurs” qui pourront servir sur d’autres molécules et peut-être déterminer d’autres pathologies (autres cancers, maladies du cœur...). La plateforme aura aussi pour fonction de valider les propriétés thérapeutiques d’autres molécules, comme par exemple celles des plantes de la pharmacopée traditionnelle, en vérifiant quelle molécule agit et comment on peut l’utiliser.
« Les grands groupes pharmaceutiques le font déjà et captent les résultats pour leurs profits ; si nous arrivons à travailler ne serait-ce que sur une partie du procès, nous aurons une meilleure connaissance de la valeur de ce dont on dispose dans l’Océan Indien et nous serons mieux en mesure de le valoriser, y compris dans une coopération avec nos voisins », poursuit Maya Césari, pour souligner l’importance de la recherche dans ce projet.
L’importance de cet équipement est de portée régionale et ne concerne pas uniquement La Réunion.
« La plateforme va commencer à travailler en juillet 2007, pour une phase de qualification de 6 mois, et notre objectif est de pouvoir imager les premiers patients à partir du 3 janvier 2008 », a déclaré hier Christian Mériau, Directeur du CYROI (Groupement d’intérêt public). Les tests réalisés entre juillet et décembre seront sous le contrôle de 3 organismes publics - l’Inspection régionale pharmaceutique, l’AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé) et l’Autorité de Sûreté nucléaire (ASN). « L’équipe de La Réunion sera également chargée d’écrire les protocoles pour chacune des phases utiles à la production des médicaments. En année pleine, mille patients seront concernés par un bilan initial et un bilan d’extension des cellules, soit deux mille actes par an », a poursuivi Christian Mériau.
Si tout se passe comme prévu, les premiers rendez-vous seront pris en fin d’année pour les premiers patients.

P. David


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