Le football... Agent de voyages

4 mars 2006

À l’A.S. Excelsior, nous avons un jeune joueur de 12 ans et demi, Huguet Grondin, petit-fils d’un vieux militant du P.C.R. Elio Ethève, qui chaque jour que Dieu fait, revêt une chemise ou un polo rouge. Il a déjà beaucoup voyagé pour son âge. "Cela fait 6 fois que je vais en métropole grâce au football", me disait -il au mois de janvier dernier quand nous étions ensemble à Nantes, lui pour un bout d’essai avec deux autres jeunes saint-josephois à la Jonelière, l’entraîneur du club et moi-même pour consolider notre mariage en crampons avec le F.C. Nantes.
Oui, le sport aide aux voyages. Le football, grâce au travail des éducateurs et dirigeants, chaque année, depuis une bonne décennie, permet à des dizaines de jeunes de se rendre mobiles en quittant pour quelques jours cette insularité qui donne du sens aux mots “vacances”... “coupure”... “liberté”... “nouveaux horizons”...
Mon premier voyage hors de La Réunion s’effectua grâce au service militaire obligatoire en 1968 - encore un vecteur de notre mobilité civique supprimé trop vite par les gouvernants. Le deuxième voyage, ce ne fut pas trop loin, à l’Île Maurice, comme éducateur des cadets de l’Excelsior, sous la houlette de Henri Ganowski, l’imprimeur-sponsor-dirigeant.
Le troisième voyage, comme joueur de l’Excelsior bien sûr, me permit la découverte de Madagascar en 1970 avec des coéquipiers dont je devins plus tard l’entraîneur et qui firent ensuite les beaux jours de cette belle histoire des tangos : Henri Chane Kan Shu, les frères Baret, les Elizéon, Tobi et Antoine, Gilbert Hoareau... coachés par le président André Lauret, notre prof d’E.P.S. et d’autres dirigeants, à l’image d’Henry Ganowski, le mécène, en passant par notre fidèle soigneur-cordonnier-maroquinier Maurice Lebon.
Vinrent ensuite de nombreux voyages, dans l’océan Indien, comme éducateur, entraîneur, Manager Général et surtout en métropole avec les jeunes, en Basse Normandie avec les séniors ; puis en Loire-Atlantique et sur les sites des différentes Coupes nationales minimes et cadets.
Un déplacement m’a particulièrement marqué : une mission Jeunesse et Sport au ministère de la Coopération en 1979 aux Comores pour remplacer un entraîneur "zoreil" qui avait mal supporté l’ambiance et la pesanteur “Abdallesque” qui régnait à Moroni.
Son épouse aurait aperçu un ou deux rats qui folâtraient dans les recoins du bungalow de l’hôtel. Bref affolement et retour précipité en France ! Conséquence : l’équipe nationale se retrouvait sans entraîneur français pour épauler les locaux pour préparer l’équipe nationale des Comores à 3 semaines des premiers Jeux des îles de l’océan Indien organisés à La Réunion. J’avais 31 ans, mon fils Djamil avait à peine 1 mois, c’était en plein ramadan. Là encore, ma passion-foot me fit partir à l’aventure, sans réfléchir, quittant les miens au plus mauvais moment, pour 3 cocos, 6 dattes et un plat de manioc (c’est bien sûr une image !).
Les conditions de travail étaient pénibles, les moyens limités. Les problèmes entre les composantes du tissu sportif et des ministères comoriens étaient ubuesques.
Je retiens malgré tout une aventure et une expérience enrichissantes, tant sur le plan humain, sportif que culturel dans un Moroni où la révolution estudiantine grondait au pied du Karthala toujours prêt à faire jaillir ses laves incandescentes aux abords de la ville, sous l’œil attentif des mercenaires de Bob Denard.
Ah ! Cette réunion-convocation à la villa du président Abdallab : inoubliable et surréaliste !

Coupe d’Afrique 2006

Mais, revenons à Tana. 1970... 2006 : Trente cinq ans sans voir Mada, hier comme joueur, aujourd’hui comme Manager Général de notre équipe qui dispute sa 1ère coupe d’Afrique des Ligues des Champions. Quel honneur ! Quel bonheur ! Quelle responsabilité pour toute la délégation !
Je m’attends au meilleur tellement il ne peut y avoir, dans de tels moments, quelque pire que ce soit...
L’évènement footballistique est double ce week-end dans la capitale malagasy. Aujourd’hui, samedi 4 mars, l’U.S.J.F., l’équipe du frère de Léon Dimba (ex Capricorne, ex Excelsior...) doit gagner à tout prix contre l’équipe de Tanzanie pour se qualifier au prochain tour de la coupe de la CAF.
L’USCAFOOT : l’équipe du maire de Tana, entraînée par le frère de Rado, a la mission de "passer" à l’Excelsior 2 buts sans en encaisser un seul. C’est devenu le pronostic des Malgaches. Les journaux, l’opinion footballistique malgache ont décrété "l’attaque à outrance"... "tout pour l’offensive". Face à cette armada, l’Excelsior vendra chèrement sa peau pour se qualifier et espérer voyager encore demain à travers l’Afrique et s’enrichir des échanges humains que nous laissent ces déplacements à travers les continents, grâce au football.
A bientôt.

Goulam Gangate


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