Projet Fillon

Loi d’orientation : Nouvelles réactions syndicales

22 novembre 2004

Jeudi dernier, le ministre de l’Éducation nationale, François Fillon, a fait connaître ses propositions de réforme de l’enseignement au cours de l’émission “100 minutes pour convaincre” (voir “Témoignages” de samedi). Après la présentation par le ministre des grandes lignes de son projet de loi d’orientation sur l’École, de nouvelles réactions syndicales ont été publiées.

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- Le SNUEP-FSU :

Inégalité des chances pour le Bac pro

Le ministre de l’Éducation nationale a présenté, sans grande ambition, les grandes lignes de son futur projet de Loi d’Orientation sur l’École. Ses déclarations confirment toutes les attaques que subissent depuis de longs mois le Service public et ses personnels. La présentation de nouvelles mesures en l’absence de moyens pour l’École est une manipulation médiatique. Depuis deux ans, le budget de l’Éducation nationale n’est pas à la hauteur des ambitions déclarées. Annoncer qu’aucun jeune ne doit sortir du système éducatif sans qualification n’est pas une proposition novatrice, puisque les précédents objectifs étaient 80 % d’une classe d’âge au niveau du Baccalauréat et aucune sortie sans une qualification minimum de niveau V.
La définition d’un socle commun de connaissances, s’il est indispensable, est une arme destructrice aux mains de ceux qui souhaitent que l’École s’occupe de quelques savoirs fondamentaux et qui reportent sur d’autres, et notamment sur l’entreprise, la Formation professionnelle.

Les propositions pour la voie professionnelle confirment nos inquiétudes comme la promotion de l’apprentissage comme modèle de formation, idée chère au MEDEF et dispositif qui n’a jamais fait ses preuves. Elles reprennent largement les thèses que tentent d’imposer depuis longtemps les défenseurs de l’ultra libéralisme. Déclarer qu’il est indispensable de réduire les filières de formation et de mettre en œuvre une parfaite adéquation avec les besoins de l’économie, donc des entreprises, en est une des illustrations. D’ailleurs le ministre a repris à son compte les dispositions de la Loi Borloo de Cohésion sociale figurant dans son volet relatif à l’apprentissage, en souhaitant une maîtrise d’une part de ce dispositif par le Service public. Le SNUEP rappelle son opposition à ce système, quel que soit son lieu d’implantation. L’utilisation du mot “alternance” en lieu et place du mot “apprentissage” ne doit pas tromper l’opinion publique, l’objectif est de remplacer, à terme, les sections de l’Enseignement professionnel par des contrats d’apprentissage dont on connaît les conséquences néfastes sur la formation des jeunes..

Privilégier l’insertion immédiate au détriment de la formation - seule capable de donner les bases pour les futures adaptations - est un non-sens politique au moment où l’on affirme la nécessité de former des personnels hautement qualifiés, capables d’évoluer et d’accéder à la formation continue.
Le SNUEP-FSU n’acceptera pas la réduction des options proposées et tout particulièrement en Baccalauréat professionnel, options qui sont à l’origine de la richesse et de la réussite de ces diplômes.
Il est contradictoire de se déclarer préoccupé par l’égalité des chances alors que l’on fait la promotion du Baccalauréat professionnel en trois ans (souvent en apprentissage) privant ainsi à terme l’accès à ce diplôme des jeunes de niveau V issus des sections de BEP. Encore une fois, le ministre réserve au collège, l’option “découverte de la voie professionnelle” aux seuls élèves en difficulté.
L’orientation vers la voie professionnelle méritait une plus grande attention, une plus grande vigilance et un plus grand courage politique.


- Le SGPEN-CGTR :

Des objectifs contredits par les propositions

Après les réactions suscitées par le rapport Thélot, la présentation des propositions du ministre s’est voulue rassurante. Il s’est placé dans la continuité de la précédente Loi d’Orientation, reprenant l’objectif de “100% de qualification et 80% au niveau du Baccalauréat” allant même jusqu’à montrer plus d’ambition en ciblant “50% d’une classe d’âge” dans l’enseignement supérieur.
Cependant, les 14 propositions ne traduisent pas une volonté d’atteindre ces objectifs. Elles s’appuient sur une démarche individualiste, utilitaire et rétrograde, basée uniquement sur les responsabilités individuelles de l’élève, de ses parents et des enseignants.

L’école sera-t-elle plus efficace, plus juste, plus ouverte ? Non, les propositions ne permettront pas d’assurer les acquisitions culturelles préparant les activités scolaires et professionnelles futures, d’élargir l’horizon culturel de tous, de comprendre les mécanismes de la société et développer l’esprit critique.
C’est de la responsabilité collective, principalement de l’État, que de donner les moyens de la réussite de tous.
Le “socle commun”, seul engagement garanti par l’École, reste un minimum culturel dans sa définition.
Le contrat individuel de réussite pourrait répondre à des difficultés passagères rencontrées par les élèves. Il ne constitue pas une remédiation pour les élèves en grave difficulté.
Plus encore, il les culpabilise et ne résout pas la question des établissements ghettos.

L’Institution ne donne pas les moyens de la réussite scolaire. Les personnels vont tenter d’y répondre en aggravant leurs conditions de travail, parce qu’ils ont une conscience professionnelle.
Les parents continueront de chercher des palliatifs pour remédier à cette situation.
L’attribution de “bourses au mérite” ne garantit pas l’égalité de traitement sur l’ensemble du territoire. Il faut instaurer une réelle gratuité de l’Éducation qui s’appliquerait à la scolarité obligatoire et au delà, jusqu’à l’obtention d’une qualification.
Pour des questions idéologiques et comptables, le ministre programme la fin de la formation professionnelle sous statut scolaire au profit de l’apprentissage. Ceci entraînera inévitablement des changements de statut pour les établissements et les personnels.

Dans le cadre de l’Éducation au choix de l’orientation, la “découverte professionnelle” devrait faire partie du tronc commun, condition pour qu’elle ne soit pas vecteur d’une orientation précoce avant la 3ème.
Promouvoir les filières professionnelles uniquement par le biais de l’accès au BTS des élèves de Bac pro “méritants” nie la notion d’égalité entre les trois voies.
Cette démarche générale basée sur le mérite des élèves, des parents et des enseignants est contredite tant par la réduction des moyens budgétaires et l’insuffisance des recrutements envisagés.
Le ministre dit vouloir engager une phase de concertation avec les organisations syndicales. Dont acte. Mais la future Loi d’Orientation nécessite la vigilance et l’intervention des personnels. Le rapport de force que nous serons en capacité de construire pèsera sur ses orientations et ses contenus.


- Le CNGA-CGC :

Inadmissible le système de deux heures supplémentaires

Ayant pris connaissance des propositions du ministre de l’Éducation nationale pour la Loi d’Orientation, le CNGA

- approuve la réhabilitation de la notion d’autorité de l’institution scolaire et de ceux qui l’incarnent, enseignants et non enseignants ;

- se félicite que le ministre reconnaisse la liberté pédagogique du professeur et l’efficacité du redoublement décidé par l’équipe pédagogique ;

- estime inadmissible le système de deux heures supplémentaires imposées pour assurer dans l’établissement des remplacements pour les absences de courte durée, proposition qui prouve la méconnaissance de ce que représentent la préparation et le déroulement d’un cours dans le second degré.
En ce qui concerne le volet pédagogique, le CNGA

- apprécie la priorité donnée à l’apprentissage du français dans le socle commun et le retour de l’importance de la culture générale humaniste et scientifique ;

- prend acte de la volonté de proposer l’enseignement d’une langue
vivante qui ne serait pas forcément l’anglais - dès le primaire, à condition que les finalités en soient claires ;

- approuve l’idée d’un socle commun minimal de connaissances à acquérir au collège et d’un “certificat” pour le vérifier, sous réserve que cela n’exclue pas des enseignements complémentaires diversifiés dès le collège correspondant aux talents de chacun ;

- regrette que l’objectif arbitraire de “80% d’une classe d’âge au Baccalauréat” n’ait pas été écarté, mais considère comme pertinents, même s’ils sont ambitieux, les deux objectifs mis en avant : 100% de qualification pour tous et 50% de diplômés dans l’enseignement supérieur. (...)


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