École de l’Îlet Quinquina condamnée

’On veut la mort des petites écoles’

22 août 2006

Quoiqu’en pensent les habitants de l’Îlet Quinquina, l’école du quartier est condamnée à la fermeture. Invitée hier à venir rencontrer les familles, la Mairie, qui a cherché à se défausser sur le Rectorat, n’a pas daigné faire le déplacement. En plus de fuir ses responsabilités à l’égard de ses concitoyens, elle use de méthodes pour le moins directives : décision de fermeture brutale et inscription d’office des 72 élèves concernés à l’école de Domenjod.

La Mairie de Saint-Denis peut finalement remercier les pluies de Diwa qui lui offrent un nouveau prétexte pour parvenir à la fermeture de l’école primaire de l’Îlet Quinquina. Selon Gérald Maillot, Conseiller général PS à la commission sociale et employé au service documentation de la Mairie, "depuis 2004, on parle de la fermeture de l’école dans les couloirs de la Mairie".

L’âme de tout un quartier

Quand bien même la Mairie ait cherché à renvoyer la responsabilité de la décision au Rectorat, personne n’est dupe. "Cette décision vient bien de la Mairie, soutient, si besoin, Gérald Maillot. Après l’Académie... elle est plutôt contente, c’est toujours ça en moins". L’école de l’Îlet est donc promise au même sort que l’école PK7 de Saint-François. La Mairie semble en avoir après les écoles rurales. Elle estimait déjà en 2004 que l’effectif de l’école de l’Îlet était insuffisant. Primaire, CP jusqu’au CM2 : les 72 enfants sont rassemblés en classes mixtes qui ont déjà fait la preuve de leur pertinence pédagogique et éducative. Mais à l’heure des classes de 30 élèves et plus, l’intérêt n’est pas que les conditions d’enseignement offertes par l’école soient optimums pour enfants et enseignants. Ce n’est pas la priorité.
Pour Patrick Damour, porte-parole des habitants du quartier, "à Domenjod, les élèves sont en surnombre dans les classes. On ne peut pas dire que les conditions idéales soient réunies pour étudier". Il parle de gâchis, de gaspillage et se demande ce qui va advenir du préau flambant neuf qui vient d’être construit, des 7 ordinateurs dernièrement livrés. Quant au personnel communal (à qui l’on a demandé de ne faire aucune déclaration à la presse), il sera "dispatché". Patrick Damour, comme beaucoup d’habitants du quartier, a suivi sa scolarité dans cette école construite en 1961. Plus qu’une école, ce sont l’âme et la mémoire de tout un quartier qui sont menacées.

Zone à risques : un prétexte

Selon Alain Didelot, Président de la Coordination des parents d’élèves et des éducateurs de Saint-Denis, présent le 6 juin à la commission d’affectation de la Mairie, "l’effectif est stable". À l’époque, des dérogations ont été accordées de l’Îlet à Domenjod, mais il n’a jamais été question de fermeture. "C’est une décision subite. On veut la mort des petites écoles, mais dans quel but ? Je ne sais même pas s’il s’agit d’une volonté réfléchie. On laisse planer des soupçons sur la qualité de l’enseignement, on laisse les choses se déliter". Il soutient qu’une réflexion sur toutes les petites écoles de l’île promises au même sort mérite d’être engagée et que ce n’est pas le découpage arbitraire fait par la Mairie qui doit prévaloir, mais bien le devenir des élèves. Quant à dire que l’école se situe en zone à risques, ce n’est pas un argument recevable, d’une part parce que le lit de la rivière est à distance, mais surtout parce que les écoles de Mafate, côté La Possession, sont aussi situées en zone à risques. "L’Adjoint au maire avance des raisons pédagogiques, l’Académie parle de raisons techniques, il faudrait s’entendre, estime Alain Didelot. On demande à voir les documents officiels".

Devant les grilles de Domenjod

La trentaine de parents rassemblés hier matin devant l’école de l’Îlet Quinquina, après 2 heures d’attente, finissait par gagner la colère. Le manque de considération qui leur est accordé, le peu d’intérêt réservé à leurs questions et inquiétudes rendent cette décision brutale d’autant plus inacceptable. Loin de se refuser au dialogue, les parents appellent à la concertation. Pourquoi ne pas laisser l’année scolaire se terminer plutôt que transférer les élèves des petites sections vers Domenjod en mars ? Pourquoi ne pas discuter du transport, des modalités de transfert pour permettre aux enfants d’intégrer ce changement dans de bonnes conditions ? Pourquoi les priver de l’âme de leur quartier ?
Force est de constater que tout est fait pour rechercher leur opposition. Ils seront donc demain dès 7 heures devant les grilles de l’école de Domenjod.

Stéphanie Longeras
[email protected]


Réactions

o Solange, habitante de l’Îlet, mère de 2 enfants

"Zanfan lé bien ousa li lé"

Cette mère de famille dit ne jamais avoir reçu aucun courrier ni de la Mairie, ni de l’Académie pour l’informer du transfert de ses enfants vers l’école de Domenjod. Le plus jeune, Éric, 3 ans, doit faire sa rentrée à l’école de l’Îlet (avant un transfert sur Domenjod en mars) et le plus grand doit partir sur Domenjod. "Mwin la apri komsa, du bouche à oreille. Pou mwin, mon marmay i devé rant an CE1 isi. Dernié minut, dernié zour, i di i sa Domenjod ! Koman mi fé maintenant èk inn isi, inn laba ? Mwin na pwin transport. Kwa mi fé ? Mi dsann a pié ? Pou mwin, lé mal fé. Zanfan lé bien ousa li lé, lé pli pré. Pou Domenjod, nou koné mèm pa si le transpor lé assuré. Mi refuz la fermeture. Nou abitt isi, marmay i dwa alé lékol isi". Quant à dire que l’école est située dans une zone à risques, pour Solange, c’est un prétexte. "Si zot lavé pa ravaz... Zot i fé travo i sèr pa rien. Pli èk siklon na touzour u, navé pwin d’problèm avansa".

o Marie, habitante du quartier, mère de 3 enfants

"Nou sé pa d’gens isi"

Ses enfants ont tous suivi leur scolarité à l’école de l’Îlet Quinquina et ne sont pas directement concernés par la fermeture de l’établissement. Pourtant, Marie, par solidarité pour les autres familles, mais aussi pour le bien de son quartier, refuse les méthodes aujourd’hui employées et dénonce le manque de considération des élus à l’égard des habitants de l’Îlet.
"Dopi dé troi zan, té i voulé ferm lékol. Débi, bana la di na pa asé d’marmay. Èk Diwa, i di lékol lé an danzé. Le vré motif, nou koné pa, solman la Mairie i dwa konèt. Parlfèt, nou sé pa d’gens isi. La touzour pri nout marmay pour zilétré, somansa bann profésèr lé kom partou, i donn nout marmay in bon lédikasion. Mi ve pa bat su mon lestoma, soman mon gran fiy la rèt lékol là i sa rant dan in lékol lotèlri, é lo dezièm i sa rant an sinkièm... Lé kom pou bann fèt, sat i dézol anou sé na touzour gran podium pou Domenjod, anou rienk in ti moné. Nou lé ant de galé é i ve kwins anou plis ankor. Non, vréman, nou sé pa d’mounn isi".


o Séléna, Tiana et Elvina

Des avis partagés

Pour Séléna, 9 ans, élève de CE2 : "Tant p’ti, mwin lé a lékol l’Ilet. Demain mi vien isi. Domenjod lé tro lwin, i fo pey le bus".
Tiana, 7 ans, élève de CE2, même si sa maman s’oppose à la fermeture, se dit quant à elle "contente.
Ça ne me gêne pas d’aller à Domenjod. J’ai plein de copines là-bas".
Enfin, pour Elvina, 8 ans, élève de CE2, tout se résume à un timide non de la tête. Non pour la fermeture de l’école et non pour le transfert vers Domenjod.

Propos recueillis par SL


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Messages

  • je viens de prendre connaissance de l’actualité de mon ancien village ilet quinquina, ou je suis né et fais ma scolarité.J appporte modestement mon soutiens aux familles ,de ilet quiquina et leurs dire de continuer le combat .Je me souviens ,mon père s’est battu pour cette école,il sait battu pour l’ endiguement de la rivière des pluies en vaint.Il est des combats en FRANCE qui dur une éternité ,mon frère que je salut continue se combat,je suis très fière de lui.Il est impensable de délocaliser,les habitans de cette ilet.IL n’existe aucun principe de précaution, qui donne le droit de spolier les gens de leurs patrimoines,bien que modeste fut t’il !Mais en revenche si on avais écouté,ou plus modestement entendu mon père a son époque,nous serions pas là aujourd’hui,et je vous parle pas des économies effectuer depuis.BREF de toulouse ou je vous soutiens, moi l’ enfant de l’ilet quinquina en(exile )je voudrai dire au élus, ilet quinquina n’est pas seulement un petit bout de terre,sais pour moi mes racines ,s’est toutes la vie d’ un homme ,mon père qui fit grandir 11 de ses enfants ,moi j’aimerais a mon retour dans l’iles faire découvrir a mon fils l ’ilet quinquina.

    • ils ne veulent pas que la mort des petites écoles mais la mort de tout un quartier la réunion chasse ses habitants il y aurait t’il des gros promoteurs


Témoignages - 80e année


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