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Un système en bout de course

Ecole à La Réunion :

mercredi 5 mai 2010, par Geoffroy Géraud-Legros


Les débrayages et manifestations se multiplient dans les écoles réunionnaises. Hier, des parents d’élèves ont exprimé leur colère face à la fermeture de classes à Sainte-Suzanne et à Saint-Denis. Loin d’être des mouvements marginaux, ces mobilisations sont autant de symptômes des profonds déséquilibres qui frappent l’école des Réunionnais.


Les études sont accablantes : l’Académie de La Réunion est aujourd’hui classée en queue de peloton de l’école de la République. Une situation qui impliquerait un renforcement des moyens mis à disposition de l’école réunionnaise, et un véritable traitement de fond de ces problèmes. Or, c’est l’orientation inverse qui est mise en œuvre : alors que la population scolaire de La Réunion est en croissance, notre pays subit de plein fouet la politique gouvernementale qui vise à la suppression massive de postes dans l’Éducation nationale.
En plus d’endurer les effets de la casse orchestrée par Paris, La Réunion continue de faire face à des problèmes spécifiques, dont le plus brûlant demeure la discrimination qui frappe les Réunionnais dans leur propre pays pour l’accès aux postes dans l’enseignement.

Un "système"... de discriminations

Peu avant la dernière rentrée scolaire, l’UNEF avait porté sur la place publique le scandale que constituait l’envoi à La Réunion de 70 professeurs des écoles « excédentaires », au détriment du recrutement. Après avoir tenté successivement de discréditer les syndicalistes étudiants — qualifiés de « menteurs » par le Recteur — puis avoir invoqué une « erreur », les services de l’Etat avaient fini par admettre l’existence d’un véritable « système », dans lequel notre pays devenait, selon les termes utilisés alors par Gilles Leperlier, le « déversoir de la République », au détriment des diplômés réunionnais.
A ce mécanisme bien rôdé de recrutement d’enseignants issus d’autres académies correspond un courant inverse, qui oblige les candidats réunionnais aux professions de l’enseignement à s’expatrier dans le cadre des concours nationaux, où encore à subir une concurrence bien plus rude que leurs homologues de l’Hexagone lors des concours menant au recrutement académique.

Déclarations sans suites

Le constat d’un désaxement général de l’école à La Réunion avait émergé des Etats généraux de l’Outre-mer (EGOM), et semblait avoir fait l’objet d’une reconnaissance au plus haut niveau. Le sénateur UMP Eric Doligé, rapporteur de la Chambre haute pour les Etats-généraux, n’avait-il pas alors dénoncé à son tour un « système » où les Réunionnais n’occupaient que 100 des 1.000 postes créés chaque année dans l’Éducation nationale ?
Le Conseil interministériel de l’Outre-mer (CIOM) avait lui aussi laissé entendre que les choses pouvaient enfin changer : face à une Assemblée composée de plusieurs centaines d’Ultramarins, Nicolas Sarkozy avait évoqué en particulier la nécessité de réformer une obligation de mobilité. Le chef de l’Etat n’avait pas hésité à stigmatiser la « caricature » que constitue la sous-représentation des Ultramarins dans la fonction publique, au sein des institutions de leurs propres régions.

La démagogie de l’UMP éclate au grand jour

C’est bien connu, les paroles s’envolent. Les écrits, pourtant, ne sont pas restés. Actées, les déclarations du CIOM n’ont donné lieu à aucun changement : premier ministre d’Etat à se rendre à La Réunion après le discours présidentiel, Luc Chatel n’a aucunement pris en compte les doléances des Réunionnais. Aujourd’hui, c’est l’UMP Didier Robert, Président de la Région Réunion, qui multiplie les annonces en faveur d’une priorité à l’éducation, et se fait fort de donner satisfaction aux revendications des enseignants réunionnais. A peine élu, il a été confronté aux doléances des lauréats du CAPES, qui refusent de se rendre dans l’Hexagone alors que des postes sont disponibles dans l’école réunionnaise… et seront pourvus par des titulaires extérieurs à notre Académie. Le nouveau Président de la Région a multiplié les manifestations de sympathie envers ces jeunes, qu’il a même assurés de sa « solidarité ». Mais les déclarations séduisantes ne peuvent faire indéfiniment écran à la réalité : reçus hier par Didier Robert, les néo-titulaires sont une fois de plus repartis bredouilles.

Geffroy Géraud-Legros


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