Mobilité : réunion d’information à la Région

Une bataille décisive pour l’avenir de La Réunion

Québec, Australie, France : des centaines de jeunes concernés

23 février 2008, par Manuel Marchal

L’Etat baisse de plus de 70% les crédits pour la mobilité des jeunes Réunionnais en 2008, la Région a informé les personnes concernées des conséquences catastrophiques de ces mesures. Deux décisions ont été prises à l’unanimité : l’adoption d’une motion et la création d’une association regroupant les jeunes et leur famille afin de faire respecter le droit des jeunes Réunionnais. C’est l’avenir de La Réunion qui est en jeu.

À la suite de l’annonce par l’Etat de la baisse de plus de 70% des crédits qu’il affecte à la mobilité des jeunes Réunionnais pour cette année, la Région a informé les personnes concernées des conséquences catastrophiques de ces mesures lors d’une réunion organisée au Conseil régional. Avec les jeunes, les parents de stagiaires en formation en mobilité, la Région fait part de sa détermination à s’engager dans la lutte pour que l’Etat maintienne sa contribution à la hauteur des fonds versés l’an passé.

Deux décisions ont été prises à l’unanimité : l’adoption d’une motion et la création d’une association regroupant les jeunes et leur famille afin de faire respecter le droit des jeunes Réunionnais d’avoir droit à une formation débouchant sur un emploi assuré. Il est essentiel que tous les candidats aux responsabilités en mars prochain prennent position et soutiennent cette bataille qui dépasse largement les clivages politiques : c’est l’avenir de La Réunion qui est en jeu. Rendez-vous est donné à une prochaine réunion dans le même lieu pour connaître les résultats de la démarche et fêter la victoire.

« L’avenir de La Réunion est en cause », Paul Vergès a rappelé la situation sérieuse créée à la suite de l’annonce du gouvernement. Une baisse de 71% des crédits concerne tous les jeunes candidats à la formation à la mobilité, et également ceux qui mènent actuellement leur projet. C’est-à-dire, par exemple, les 600 jeunes Réunionnais inscrits dans un CEGEP au Québec.

La réunion d’information a débouché sur un engagement de la Région : celui de tout mettre en œuvre pour que l’Etat maintienne le montant de sa contribution à 11,3 millions d’euros, soit les crédits versés en 2007. Cet engagement est partagé par les personnes concernées. Parents et jeunes ont adopté à l’unanimité deux décisions. Tout d’abord, une motion demandant au gouvernement de revoir sa décision qui met en cause « l’avenir de la jeunesse réunionnaise ». Ensuite, la création d’une association regroupant jeunes Réunionnais en mobilité et leurs familles, afin de converger vers un objectif : que l’Etat réponde rapidement aux attentes de milliers de jeunes Réunionnais et rétablisse sans tarder les crédits qu’il versait l’an passé pour la mobilité.

En préalable au débat, le président de la Région rappelle les orientations stratégiques qui déterminent la politique de la collectivité depuis 1998. Dans la perspective du million d’habitants en 2030, La Réunion aura à cette date une population active de 440.000 habitants, soit 50% de plus qu’en 2000. La formation est au centre des orientations de la Région, car c’est la jeunesse d’aujourd’hui qui aura la responsabilité de régler cette question. C’est la jeunesse réunionnaise qui devra relever le défi du développement durable de La Réunion du million d’habitants.

Pour atteindre cet objectif, la Région fait le maximum pour développer la formation initiale et continue à La Réunion. Ce sont les investissements dans les lycées, et à l’Université notamment. C’est également ouvrir La Réunion sur le monde en donnant la possibilité à des jeunes d’avoir droit à des formations qui n’existent pas à La Réunion, et qui débouchent sur un emploi quasiment assuré : en France, mais également au Québec, en Australie, en Inde et en Chine.

Le président de la Région souligne que 80 à 90% des jeunes en formation au Québec sont embauchés dès la fin de leur stage.

« Pas le droit de briser le rêve des jeunes »

Tirant les enseignements du succès de cette action, le gouvernement canadien, la France et la Région ont signé une convention sur 3 ans afin d’amplifier ce dispositif. Actuellement, 600 jeunes Réunionnais sont au Québec, et 210 se préparent à partir. Ce sont des jeunes motivés, qui ont la capacité d’exercer un métier pour lequel ils auront été formés au terme de leur formation dans un CEGEP québécois. Mais tout cela est remis en cause par la baisse de 71% des crédits versés par l’Etat au titre de la mobilité.

Au-delà des formations au Québec, des milliers de jeunes sont concernés. Wilfrid Bertile, Vice-président délégué à la Mobilité, rappelle que 6.500 jeunes ont eu droit à une aide l’an dernier, dont 1.500 ont obtenu une aide à la formation.

Même si l’Etat est confronté à une situation qui l’amène à faire des choix budgétaires, des secteurs prioritaires ne doivent pas être touchés, dit en substance Paul Vergès. Car la formation, c’est l’avenir de La Réunion. L’Etat « n’a pas le droit de briser le rêve des jeunes », souligne Wilfrid Bertile. Ce sentiment est partagé unanimement par toutes les familles et les jeunes concernées (voir encadré).

Détermination pour une cause juste

Par ailleurs, Paul Vergès constate que cette décision coïncide avec le 400ème anniversaire de la fondation de Québec par un explorateur français. Pour cette occasion, les gouvernements français et canadiens veulent donner un éclat particulier à cette célébration. C’est ce moment que choisit le gouvernement français pour réduire de 70% sa contribution à un dispositif salué comme un succès par tous les partenaires.

Pour conclure, le président de la Région souligne la contradiction entre les intentions du gouvernement et ses actes. Dans le projet de loi-programme, il affirme le principe de l’ouverture économique vers l’extérieur, et il ferme en même temps la porte. Pourquoi interdire l’application d’une solution qui contribue à faire reculer le chômage à La Réunion, interroge-t-il.

Pour montrer au gouvernement toute la détermination de La Réunion, Paul Vergès appelle tous les jeunes ayant un projet de formation en mobilité à poursuivre leurs démarches. Parce que l’avenir des jeunes Réunionnais, c’est le droit à un travail durable, parce que le futur de la jeunesse, ce n’est pas être condamné aux contrats aidés et au RMI, Paul Vergès appelle le gouvernement à rétablir rapidement les crédits, et ajoute que la Région pèsera de tout son poids pour atteindre cet objectif. Il donne rendez-vous à tous les participants à la Région pour une prochaine réunion où les résultats de la démarche seront connus publiquement. Une réunion pour fêter la victoire.

Manuel Marchal


Motion adoptée à l’unanimité

« Défendre les intérêts de notre jeunesse et l’avenir de notre île »

Voici le texte de la motion adoptée hier à l’unanimité à la Région par les jeunes et les parents de stagiaires en mobilité.

« Nous, futurs étudiants et stagiaires en mobilité, parents de candidats à la mobilité ou d’étudiants actuellement au Québec, anciens élèves infirmiers ayant suivi un parcours de formation en mobilité ;
Exprimons notre émotion et notre désarroi devant l’annonce d’une baisse des crédits drastiques de l’Etat à la mobilité en 2008, mettant en cause l’avenir de la jeunesse réunionnaise ;
Demandons au gouvernement de prendre la mesure d’une telle décision et de rétablir les crédits nécessaires pour permettre à ces centaines de jeunes Réunionnais de mettre en œuvre leur projet de formation ;
Décidons de mettre en place une association des étudiants, des candidats et des parents d’élèves de jeunes en mobilité, pour défendre les intérêts de notre jeunesse et l’avenir de notre île ».


Ne pas briser le rêve de la jeunesse réunionnaise

Jeunes et parents s’organisent

Stagiaire à la CCI, Jean-Denis Técher est inquiet : il doit partir à la fin de l’année en stage en France. Pourra-t-il valider sa formation ? Il lit alors le texte d’une motion qui est adoptée à l’unanimité (voir encadré).
Mère d’un jeune en formation au CEGEP de Trois-Rivières au Québec, Monique Payet fait part de l’inquiétude des centaines de jeunes qui sont dans ce pays. Elle propose de mettre en place une association regroupant les Réunionnais en formation au Québec, en Australie et ailleurs. Cette proposition est adoptée à l’unanimité.
Pour sa part, Mme Payet indique qu’un de ses enfants est en formation au CEGEP de la Pocatière. Force est de constater que son fils a été surpris au-delà de ses espérances par l’accueil, l’encadrement et la qualité de la vie au Québec. A un point tel que son jeune frère envisage de suivre l’exemple de son aîné.
Pour Samuel Christophe, le départ prévu en août au Québec est l’aboutissement de deux ans de démarches. Il a déjà vendu ses meubles et se prépare à rendre les clés de son appartement. Que va-t-il devenir ? Sera-t-il privé du résultat de ses sacrifices ?
Cinthia Gaillard voit dans la décision de l’Etat « la volonté d’asphyxier les jeunes Réunionnais ». « Si on nous enlève la mobilité, que reste-t-il pour nous en sortir ? Allons-nous attendre 25 ans pour avoir un revenu ? Quand nous sommes candidats à un travail, on nous demande des années d’expérience, où allons-nous avoir cette expérience ? ».


Des partenariats mis à mal, des projets remis en cause

Wilfrid Bertile, Catherine Gaud et Denise Delorme sont revenus en détail sur les conséquences de la baisse des crédits d’Etat.
Wilfrid Bertile rappelle que pour un jeune qui part au Québec, 3 partenaires interviennent dans le financement de la formation. C’est tout d’abord le Québec qui prend en charge les frais de scolarité dans le CEGEP, soit 25.000 euros pour 3 ans.
La Région s’engage sur 18.000 euros sur la même période par le biais d’une allocation mensuelle de 395 euros pendant les 2 premières années, et 700 euros la troisième.
Pour sa part, l’Etat verse 9.882 euros. C’est une aide mensuelle de 305 euros par mois pendant 2 ans. Si l’Etat diminue sa contribution, alors la bourse n’est plus suffisante pour justifier des 700 euros mensuels nécessaires pour être autorisé à séjourner au Québec. Autrement dit : sans la garantie de 700 euros, pas de permis d’étude, et donc pas de possibilité de suivre une formation qui débouche quasi-immédiatement sur un emploi.
Les élèves infirmiers sont dans la même situation. La bourse régionale co-financée par la Région permet de donner la possibilité d’étudier à des jeunes qui ont le niveau pour être infirmiers, mais qui ne peuvent pas s’inscrire à La Réunion par manque de places.
Catherine Gaud rappelle que depuis que la formation aux carrières paramédicales est la compétence de la Région, le nombre de places a augmenté de 185 à 218, et va évoluer à 258. Mais 250 jeunes sont sur la liste complémentaire. La mobilité leur donne accès à des écoles en France. Cette formation débouche sur l’emploi directement. A La Réunion, chaque année, une centaine d’infirmiers venus d’Espagne ou de Belgique viennent travailler dans les hôpitaux car les effectifs sont insuffisants. Et avec le vieillissement de la population, les besoins seront toujours croissants.
Denise Delorme rappelle pour sa part que plus de 3.000 jeunes partent chaque année en stage de formation, principalement en France. Des partenariats établis avec des AFPA et des Grandes écoles sont mis à mal par la décision de l’Etat. C’est un coup d’arrêt. Un point de vue partagé par Yves Sauget, Directeur du centre de formation consulaire de la CCI. Il appelle chacun à se rassembler pour faire face à cette situation.
Denise Delorme conclut en appelant à la mobilisation : « continuons, la jeunesse ne peut pas perdre ».

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