Après la réunion du Conseil de la langue et Culture régionale

Une série de dispositifs en ordre de marche

1er octobre 2007

Jeudi s’est tenu sous l’égide du recteur, un Conseil de la Commission Langue et Culture régionale. Ses 33 membres ont fait le point sur la place du créole dans l’enseignement primaire - maternelle et élémentaire - et ce qui reste à mettre en place, sur la base des textes parus et... à venir. “Témoignages” a fait le point avec Jean-Bernard Huet, chargé de mission “LCR” pour le Premier degré et Axel Gauvin, Président de Lofis La lang kréol réyoné.

“Temoignages” : Jean-Bernard Huet, quel a été l’état des lieux en cette rentrée 2007-2008, après l’émoi et la confusion semés à la fin de l’année dernière ?

J-B Huet  : Le texte académique en préparation est un arrêté qui permet l’enseignement de la Langue et Culture régionale (LCR) en concomitance avec les Langues vivantes étrangères (LVE). Les programmes de 2002 avaient intégré la LCR au programme des LVE ; cela avait d’abord paru être une bonne chose, mais il s’est avéré qu’on ne pouvait pas proposer deux langues vivantes aux enfants. Donc dans les faits, les familles ont été mises devant un choix. Le texte du Recteur tranche cette question et les grandes lignes de son texte posent la possibilité de garder les LVE tout en mettant en place, en cycles 2 et 3, un enseignement LCR.
Dans le bulletin officiel du 27 septembre 2007, une circulaire intitulée LVR (langue vivante régionale) permet de mettre en œuvre un enseignement en langue régionale à partir du cycle 2 et jusqu’au cycle 3 compris. Sur la façon de mettre en place cet enseignement, l’arrêté du 4 avril 2007 indiquait les horaires des différentes disciplines, selon un système d’horaires minima et maxima. Les enseignants disposent d’une fourchette de 26 heures d’enseignement, avec un minima de 25 heures en cycle 2, qui permet d’aménager une heure pour le créole et 1h30 en cycle 3. C’est, disons, le cadre général. L’arrêté académique en préparation vient officialiser ces dispositifs pour le créole et transposer au niveau de l’Académie le texte du 27 septembre.

Où en sont également les habilitations d’enseignants LCR ?

- La décision du Recteur devrait relancer la campagne d’habilitation. Cette campagne aura pour but de faire le point sur les enseignants du premier degré qui sont intéressés. Une commission - qui est en train de se mettre en place - appréciera les compétences disciplinaires des candidats. Puis, il y aura un temps de formation. La commission d’habilitation opère, en effet, en deux temps. Dans un premier temps, on donne une habilitation provisoire, suivie de moments de formation et d’une visite d’évaluation par Fabrice Georger, chargé de mission LCR avec moi. Je pense que cela pourrait être fait d’ici les vacances de la Toussaint.

Et en maternelle, qu’est-ce qui est prévu pour l’accueil des enfants ?

- Dans le cadre de l’installation prioritaire d’une classe bilingue (créole/français), on a mis en place une commission d’habilitation qui va se charger de recevoir les candidatures et d’évaluer les projets. Ceux-ci devront être adressés au Rectorat. En maternelle, ces projets doivent aussi recevoir l’accord des parents. C’est une étape nécessaire. De plus, à chaque fois qu’on a bien expliqué aux parents le contenu des projets (à thème culturels divers), on a constaté qu’ils sont d’accord.

Est-ce que vous pouvez en dire un peu plus sur les moyens dont dispose l’enseignement LCR ?

- L’enseignement s’appuie sur un dispositif d’habilitation, avec appels à candidatures. C’est un dispositif individuel. Un autre dispositif - celui du précédent projet académique (2004-2007) comportait 3 postes itinérants. Des enseignants itinérants ont été recrutés et ont travaillé, chacun dans son domaine respectif, à la mise en œuvre de l’enseignement LCR dans les classes, en épousant les demandes des enseignants et leurs centres d’intérêt. L’an dernier, les itinérants ont pu mettre en place un enseignement dans quatre classes (100 élèves) et ils ont touché, dans une démarche de sensibilisation, 104 classes (2600 élèves). La presse n’a cité que la classe de Saint-Paul, mais les itinérants ont mis en place un enseignement dans leur secteur. Dans 9 autres classes (222 élèves de maternelle et primaire), ils sont intervenus pour l’enseignement du français en milieu créolophone. La règle est de ne jamais forcer la porte.
Pour préparer la continuité entre école primaire et collège, on a décidé de définir des “zones d’intervention”.
Un 4e poste itinérant a été créé à Saint-Denis (secteur de la Montagne). Les itinérants sont formés à répondre à la demande des enseignants et des projets d’école.

De quels outils disposent-ils ?

- Les outils sont effectivement en voie de validation. Cela se fait avec les enseignants bien sûr, sous la responsabilité de Fabrice Georger. En fin de parcours, c’est la mission LCR qui valide. Les trois premiers itinérants ont fonctionné à Saint-Joseph, Saint-Benoît et au Port. Ils avaient démarré en 2005, en maternelle et au primaire. Sur la base de leur travail, on s’est aperçu que 80% des enfants en fin de maternelle avaient des difficultés à distinguer les deux langues. Les itinérants ont notamment travaillé avec des marionnettes monolingues (une parlant créole, l’autre le français), pour aider à clarifier les compétences linguistiques des enfants.

Pour résumer, pensez-vous que le développement de la LCR repart sur une bonne voie ?

- Désormais, les enseignants ont tout un ensemble de possibilités, organisé par trois documents ou série de documents différents. Nous avons cet arrêté du Recteur posant le créole aux côtés des LVE ; c’est la transposition académique de la circulaire du 27 septembre. Un deuxième groupe de textes organise les campagnes d’habilitation. Enfin, un troisième document, en cours d’adoption, est une circulaire du Recteur qui incite à la pratique de la LCR, en développant tout un argumentaire sur la question. Le texte est prêt et son adoption sera définitive après examen par les collectivités territoriales. Je suis plutôt optimiste pour l’avenir et nous verrons, dans une première étape, ce que sera le succès des habilitations.

Propos recueillis par P. David


Axel Gauvin, Lofis la lang kréol réyoné

« On en revient à la situation de 2000 »

Après la “lettre ouverte” faite au Recteur en juillet dernier, comment appréciez-vous l’évolution de la situation du créole ?

Axel Gauvin : Il y a des aspects positifs et nous attendons la concrétisation. Quand je dis qu’il y a des aspects positifs, on en revient en fait à la situation de 2000. Ces trois dernières années, il fallait choisir entre LVE et LCR. La situation est rétablie, c’est tout. Après une première campagne d’habilitation, il y avait eu huit classes de LCR. Puis une application restrictive des textes a cassé cette dynamique. Il y a plus que de la mauvaise foi, quand on nous dit qu’“il n’y a pas de demande sociale”. Normalement, la campagne des habilitations devrait pouvoir être relancée. Il n’est pas trop tard, il me semble. J’espère qu’on ne va pas encore perdre un an.

Quelle décision positive gardez-vous de la réunion LCR de jeudi ?

- Un deuxième point important, après le rétablissement du droit à la LCR, est la création d’une commission pour réfléchir et préparer un programme. L’année prochaine, nous devrions pouvoir travailler à partir d’un programme. L’absence de programme n’est pas rédhibitoire, mais si nous pouvons nous appuyer dessus, c’est mieux.
L’autre nouveauté apportée par le texte officiel du 27 septembre est la Convention qui doit être signée, avant 2008, entre les collectivités territoriales et l’Etat (le Rectorat). Cela existe déjà pour l’Alsace, la Corse et la Bretagne. Cela permet des avancées, mais il faudra être vigilant sur l’application et le respect de la Convention. Un groupe de travail a été constitué autour de Roger Ramchetty pour la Convention, et d’Evelyne Pouzalgue pour le Programme.
Cette Convention, ainsi que la mise en place d’un programme sont des points nouveaux et positifs.


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